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Forêt Méditerranéenne

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ux questions fondamentales ont été soulevées au cours de ces dernières années. Dans quelle mesure ces aménagements peuvent-ils avoir un effet durable sur la biodiversité et l’état final de l’environnement ainsi créé est-il pire ou meilleur que la situation de départ ?

Effet sur la biodiversité stationnelle

Les travaux récents menés sur l’impact du débroussaillement sur la richesse floristique d’écosystèmes méditerranéens ont montré que ce traitement permettait soit l’apparition d’un cortège de nouvelles espèces au détriment des espèces des milieux fermés (Hadar et al., 1999), soit un enrichissement net de la flore (Étienne, 2000). La technique de dégagement de la strate arbustive est souvent la cause principale des substitutions d’espèces observées. Le broyage mécanique va favoriser les espèces capables de rejeter au détriment des espèces se régénérant obligatoirement par semis. S’il est trop fréquent, il va mettre en danger la régénération de la forêt. Le brûlage dirigé va également favoriser les espèces à rejet mais aussi certaines espèces dites pyrophytes dont la germination est stimulée par le passage du feu. Il peut aussi accentuer la prédominance des espèces forestières à écorce épaisse (pins, chênes) au détriment des espèces feuillues à écorce fine (érables, frênes, sorbiers). Enfin, le dessouchage entraîne une élimination presque radicale des espèces à rejet et une recomposition complète des horizons supérieurs du sol, facteurs qui favorisent l’installation d’espèces héliophiles de milieux pauvres. Si le pâturage d’animaux domestiques est associé à l’ouverture du milieu, la modification est prolongée et des changements importants sont enregistrés, dans un deuxième temps, dans la richesse

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Agriculture et biodiversité des plantes

floristique des stations comme dans leur structure et composition. Même si le pâturage ne suffit pas, à lui tout seul, à endiguer la fermeture du sous-bois, il est capable d’engendrer des substitutions d’espèces en faisant progressivement disparaître certaines espèces ligneuses appétentes (grande coronille, bruyère arborescente, filaire à petites feuilles) ce qui peut favoriser la dominance d’espèces compagnes non appétées (buis, bruyère à balais, ciste de Montpellier). C’est toutefois la fertilisation qui occasionne les changements les plus drastiques et les plus durables. Cependant, ce ne sont généralement pas les espèces introduites qui sont les plus favorisées mais les familles d’espèces autochtones réagissant le mieux au type d’amendement effectué (graminées annuelles ou vivaces avec la fertilisation azotée, légumineuses annuelles ou vivaces avec la fertilisation phosphatée). Au bout de 20 ans de gestion continue par débroussaillement ou sylvopastoralisme d’une station forestière, la richesse floristique augmente respectivement de 10 et 20 espèces, sans perte de taxons dans le premier cas et avec la disparition de 3 à 5 taxons oligotrophes dans le deuxième cas (Étienne, 2000). Les espèces qui apparaissent sont soit des héliophiles liées à l’augmentation de l’éclairement, soit des mésophiles favorisées par l’amélioration des conditions de minéralisation. On peut également observer l’apparition d’espèces biologiquement intéressantes comme Genista linifolia en suberaie littorale sèche (Quertier, 2000). Une gestion pastorale raisonnée peut également favoriser le développement de populations préexistantes d’espèces d’intérêt patrimonial comme plusieurs espèces d’orchidées du genre Serapias dans les aménagements mis en place dans l’Estérel (Étienne et al., 2001).

Effet sur la biodiversité paysagère

Un aménagement DFCI n’a de sens que s’il concerne l’ensemble de la forêt à protéger ; il est donc important de mesurer son impact à la fois sur la diversité α1 mesurée à l’échelle du peuplement et sur la diversité γ mesurée à l’échelle du massif forestier. Deux indicateurs sont souvent mesurés à cette dernière échelle : la richesse floristique globale et la diversité des structures de végétation. Dans la mesure où les peuplements forestiers méditerranéens actuels ont été fortement soumis au passage des incendies (pinèdes de pin d’Alep, suberaies) ou sont le fruit d’un abandon généralisé (accrus de pin sylvestre, taillis vieillissants de chêne vert), ils se présentent généralement sous la forme de vastes étendues de structure homogène, dominées par un nombre très réduit d’espèces. La mise en place d’aménagements DFCI engendre systématiquement une fragmentation du massif forestier par le biais des coupures de combustible et une forte diversification des structures de végétation sous l’effet d’une dynamique naturelle vers des faciès plus matures sur les zones protégées et grâce au rehaussement du couvert forestier permis par la gestion sylvopastorale des zones aménagées (Chaumontet et al., 1996). Les paysages ainsi créés présentent une plus grande variété de formations végétales et abritent progressivement un nombre plus important de types de peuplements végétaux. Cette diversité d’habitats est synonyme d’une plus grande capacité d’accueil d’espèces végétales et animales, à condition que la répartition et la taille des mailles créées soit suffisante pour englober l’aire vitale de ces nouvelles espèces (Étienne et al., 1998). D’autres voient aussi dans la géométrie des tracés et la linéarité des zones de contact entre coupure et peuplement un aspect négatif des aménagements DFCI. Ils revendiquent alors, si ces impacts paysagers et écologiques négatifs sont supérieurs aux bénéfices qu’on peut raisonnablement attendre, le droit de ne pas réaliser ces aménagements, ce qui pose clairement la question de leur évaluation environnementale globale (Hétier, 1993).

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Diversité alfa (α) : intra-habitats par station ; diversité gamma (γ) : intra-habitats par groupes de stations.

Dossier de l’environnement de l’INRA, n°21

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Pire ou meilleur ? Si l’on se réfère aux fondements de la biologie de la conservation, on doit tout faire pour éviter que des espèces, des écosystèmes, voire des types de paysage, disparaissent (Lamotte, 1995). Mais dans le contexte de la forêt méditerranéenne, cette stratégie oblige à bien mesurer l’origine de la présence de telle ou telle espèce et à bien peser le rôle de 10 000 ans d’activités agricoles, pastorales et forestières dans la diversité actuelle de la flore et des paysages du Bassin méditerranéen. Comme le suggérait P.-H. Gouyon dans la conclusion de son exposé sur l’histoire de la biodiversité, en région méditerranéenne, on est souvent obligé de ne pas faire confiance à la nature et de gérer la biodiversité (Gouyon, 1994). En effet, la « vision environnementale » de la forêt méditerranéenne est extrêmement variée et soulève de nombreuses polémiques et controverses. Quand on en fait le sanctuaire de la tortue d’Hermann, l’incendie y est vu comme une catastrophe. Quand on la considère comme l’aire limite septentrionale de Cistus ladaniferus, l’incendie y est une nécessité car il est indispensable à la reproduction de cette espèce. Ce dilemme sur la « naturalité » du feu en région méditerranéenne est lourd de conséquences sur la façon de raisonner et de réfléchir à un aménagement durable de ces forêts. De même l’opposition milieu ouvert / milieu fermé est récurrente dans les discussions autour des aménagements forestiers en région méditerranéenne. Ici l’on voudra préserver les espaces de clairières qui abritent une population rare d’Isoetes, là on favorisera une mosaïque de pelouses et de landes pour permettre le maintien de l’aigle de Bonelli alors qu’ailleurs on défendra mordicus la régénération du pin d’Alep ou du pin sylvestre comme un premier pas nécessaire vers le rétablissement d’une forêt proche du climax. Les aménagements sylvopastoraux à vocation DFCI n’échappent pas à cette règle. Ils vont favoriser certaines communautés végétales, certaines associations d’espèces. Ils vont dévier des successions naturelles connues vers des successions naturelles originales dans lesquelles de nouvelles dynamiques de population pourront se mettre en place et génèreront de nouveaux équilibres. Aux chercheurs d’imaginer, de simuler ce que risquent d’être ces nouvelles dynamiques et ces nouveaux équilibres. À la société civile, aux politiques et aux gestionnaires de décider si cette autre diversité leur convient et leur semble plus souhaitable pour l’avenir de leur environnement.

En conclusion

L’histoire récente de la forêt méditerranéenne peut se résumer en trois actes (Étienne, 1996) : - une réduction drastique des activités sylvicoles sur les peuplements spontanés, que ce soient des coupes pour le bois de chauffe dans les taillis de chêne, la récolte du liège dans les suberaies ou l’exploitation du pin maritime pour le sciage ; - des efforts énormes de reboisement et de restauration de terrains de montagne plus ou moins dégradés auxquels ont succédé, sur des terres agricoles marginales abandonnées, des accrus spontanés de résineux créant de vastes espaces forestiers non gérés ; - le renforcement de la chasse et de la cueillette

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