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L'Orientalisme

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ion et à évoluer. Notre sujet est ‘l’orientalisme français et la littérature tunisienne francophone : relations et influences.’ Nous chercherons donc à montrer les rapports artistiques et littéraires de ces deux mouvances en nous appuyant, non seulement sur leurs outils d’expression, mais aussi sur les événements historiques, culturels et scientifiques qui pèsent sur la relation Orient/Occident. En effet, chaque œuvre artistique est le reflet d’une époque, d’une mentalité. Les ouvrages étudiés dans cette thèse, révèlent et mettent en relief l’évolution de la pensée orientaliste et de la culture orientale. La littérature tunisienne francophone est née à la suite du Protectorat. Au contact de cette culture française, l’élite tunisienne se met à écrire. Dès 1920, la Société des écrivains d’Afrique du Nord, fondée par Arthur Pellegrin, Albert Canal, Marius Scalesi 2

et Abderahmane Guiga, publie la revue La Kahéna autour de laquelle se rassemblent ceux qui écrivent en français. Leur première œuvre commune est La Hara conte, en 1929, recueil de nouvelles judéo-tunisiennes qui évoque les croyances, superstitions, fêtes et coutumes, histoires et légendes, sentiments et caractères de cette culture. La nouvelle est un genre prisé car il préserve la tradition orale de cette communauté. Écrivains maghrébins et juifs-maghrébins se retrouvent autour d’une même volonté : s’exprimer en français. Les deux confessions religieuses utilisent le même genre littéraire car ils ont une même culture de l’oralité. Dans les années 30, avec la naissance du Néo-Destour, les écrivains tunisiens décident d’utiliser la langue de leur colonisateur afin d’exprimer leurs souffrances, leurs revendications et leur identité, et ce en réponse à la colonisation. Les juifs tunisiens, eux, ont un double objectif : s’adresser à leur oppresseur français (même s’ils sont fascinés par leur culture) et dénoncer leur oppresseur arabe. En effet, les Juifs sont doublement minoritaires. Dans leur littérature, même s’ils évoquent de bonnes relations avec les Arabes, ils parlent aussi du mépris de ces derniers à leur égard. D’ailleurs, la Hara (quartier juif) est la manifestation de cette mise à l’écart et de cette différence instaurée au sein même de la communauté tunisienne. Néanmoins, l’essentiel des sujets de la littérature tunisienne, alors, était le lieu spolié, confisqué par l’Autre, c’est-à-dire la dénonciation de la colonisation et des conséquences négatives que celle-ci a provoquées en Tunisie entre autres. Progressivement, les thèmes des écrits de ces écrivains se sont tournés vers les dirigeants de leurs pays émancipés mais aussi vers leurs concitoyens dont les nouvelles mœurs issues de la modernisation les choquent et leur déplaisent. La littérature judéomaghrébine, aussi, aborde ce sujet d’une désillusion après l’Indépendance. Nous ne ferons donc pas de distinction entre la littérature arabo-maghrébine et judéomaghrébine. Beaucoup de similitudes sont là pour parler d’une même inspiration : la conscience collective, le style d’écriture, les thèmes (la famille, la mère, les traditions)… Du tête-à-tête face à la puissance coloniale, on passe à la dialectique du Même et de l’Autre, c’est à dire une analyse de soi par rapport à l’autre, une introspection suivant le regard d’autrui. Les écrivains s’attachent à parler, à étudier le rapport de soi à soi et de soi à l’autre. Ils observent une interaction de la culture orientale et occidentale et témoignent des conséquences de celle-ci sur les peuples du Maghreb. Les écrivains tunisiens analysent leur nouvelle société, l’évolution de leur propre culture en la comparant à leur passé mais aussi à la France ; quels changements de mœurs et d’appréhension de la vie la France a-t-elle provoquée par son influence ? 3

Aujourd’hui, la littérature francophone maghrébine revient, dans ses productions, au quotidien, à son Histoire profonde et toujours au désir de liberté, d’être soi. Ainsi, la littérature tunisienne se caractérise par la critique de la France coloniale (1ère génération) et de la Tunisie contemporaine (2e et 3e générations), par l’expression d’un tiraillement entre la tradition et la modernité, par la nostalgie (l’enfance est une période prisée) et par la revendication d’une orientalité mais aussi d’une double culture. Les destinataires de ces œuvres sont les Tunisiens mais aussi les Français. La culture arabe traditionnelle qui reposait jusque là sur un passé glorieux, s’est trouvée tout à coup démunie face à une civilisation qui la dépassait et la défiait. La culture arabe moderne est née de la rupture avec cet ancien esprit devenu insuffisant, et de la volonté de s’affirmer devant l’Occident intrus. Le processus d’acculturation réveille chez les Arabes des sentiments ambivalents enfouis jusqu’alors : une fascination pour l’Occident, sa civilisation, et une répulsion pour son rôle de dominant qui impose ses valeurs, sa culture et sa langue. La longue occupation de la Tunisie par la France et l’influence que celle-ci exerce encore aujourd’hui expliquent ce phénomène. De tout temps, les rapports Orient/Occident ont été difficiles et complexes. Encore aujourd’hui, il est délicat de définir les liens qui unissent ces deux mondes considérés comme antagonistes. Le monde occidental perçoit bien l’existence des grands courants qui traversent l’univers islamique, mais il les interprète souvent mal, par suite d’une profonde méconnaissance des traits majeurs de cette civilisation, si proche et en même temps si lointaine. Les relations entre les deux mondes sont tantôt conflictuelles, tantôt marquées par l’ignorance mutuelle. Elles sont encore, à notre époque, trop souvent passionnelles ou déformées par des préjugés et des malentendus hérités de la période coloniale. On observe, en effet, une relation de dominant à dominé entre ces deux cultures ; elles ont besoin, en réalité, l’une de l’autre pour revendiquer leur existence. Hélé Beji l’affirme lorsqu’elle écrit :

« Toujours, l’Orient et l’Occident se sont côtoyés avec des sentiments réciproques de convoitise et de jalousie, complices malgré leurs dissemblances, dans le secret vivace de se vaincre l’un l’autre. »1

C’est dans le regard de l’autre, de celui que l’on considère comme son rival, que l’on vit, que l’on se construit. C’est en cela que cette étude est intéressante, puisqu’elle met en relief cette relation entre deux cultures qui s’opposent et se fascinent à la fois.

1

Béji, Hélé : Esprit, n°1, janvier 1997, p. 108.

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L’Occident, c’est d’abord l’un des deux empires issus du démembrement de l’Empire romain, l’autre étant l’empire d’Orient. Plus tard, ce terme a désigné l’ensemble des peuples habitant l’Ouest du continent eurasiatique et ayant des valeurs religieuses communes : le Christianisme. L’Orient, quant à lui, regroupait l’ensemble des grandes civilisations de l’Antiquité entourant la Méditerranée orientale jusqu’à l’Iran inclus. De même, ces peuples avaient une religion commune différente de celle de l’Occident : l’Islam. Dès lors, la volonté de suprématie mondiale des deux cultures se fit sous couvert de guerres de religion ou croisades. Afin de toujours s’agrandir, de s’affirmer et de devenir la grande puissance, ces deux empires n’ont eu de cesse de se combattre et d’aller de victoires en défaites, de colonisations en indépendances. Aujourd’hui, le monde occidental regroupe les pays de l’Europe de l’Ouest, le Canada, les États-Unis, le monde oriental étant plus ambivalent et pouvant être réduit aux seuls pays d’Asie ou regrouper le Proche et le Moyen-Orient voire le Maghreb. Effectivement, si du point de vue géographique, la frontière des deux civilisations est aisément tracée, il n’en va pas de même du point de vue idéologique. L’opposition Orient/Occident se fonde sur une différence essentielle de religions, de cultures et de régimes politiques hérités de l’Histoire. Comme l’Orient, l’Occident est une notion assez floue qu’il est difficile de définir même si tout le monde comprend des expressions telles que ‘les Occidentaux veulent’, ‘l’Occident réagit’… Le Japon, par exemple, est-il occidental ? Du point de vue économique, politique et militaire oui, mais du point de vue de la culture il appartient à l’Asie. Le mot ‘Occident’ tend donc à désigner une sphère culturelle plutôt qu’une aire géographique. Ces valeurs sont adoptées, copiées, l’Occident répand donc un modèle de civilisation, une façon de vivre et une vision du monde supérieurs aux yeux des autres pays (Tiers monde). Une acception moderne du terme d’Occident est celle de l’ensemble des pays développés, urbanisés. Claude Bélanger donne une définition plus précise de l’Occident : pour lui, c’est un concept historique et culturel. Sont considérées comme occidentales toutes les cultures qui plongent les racines de leurs grandes caractéristiques dans l’univers judéo-chrétien et le monde gréco-romain. Ces cultures ont traversé les grandes phases qui correspondent chacune à un contexte géographique et historique spécifique. La première phase, la plus longue, celle des origines de la culture occidentale, est celle du Proche Orient qui s’échelonne de 1500 à 800 avant J.C. C’est la phase de création des premiers éléments qui formeront l’armature culturelle

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