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Travail Et Lousir

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dégradée, celle de la « race de fer ». Ayant reçu de Prométhée, contrairement à la volonté de Zeus, le mystère du feu, les hommes sont punis en étant soumis à la nécessité du travail mais ils restent tourmentés par la nostalgie de la vie de loisir que connaissaient leurs lointains ancêtres, les hommes de la race d’or. La tradition grecque présente donc, elle aussi, le travail comme effet d’une malédiction entrainant une déchéance de l’humanité. Mais comme l’a très bien remarqué Paul Lafargue « les hommes [sont] aveugles et bornés, ils ont toujours voulu être plus sages que leur Dieu..ils ont voulu réhabiliter ce que leur Dieu avait maudit. »

Dés le XIXème siècle le travail sera réhabilité et revalorisé par Marx. Il sera présenté comme moyen d’accéder a une vie meilleure, le travail « forme » le travailleur lui-même, qui peut se perfectionner par son activité. Mais le travail sera aussi perçu comme moyen pour avoir de l’argent, pour pouvoir acheter le loisir, le divertissement. Travailler pour vivre, et plus vivre pour travailler. Dans ce contexte là le travailleur est poussé a travailler toujours plus pour amasser plus de biens, ou comme dans l’idéologie marxiste-léniniste, pour une plus grande reconnaissance (stakhanovisme). Mais il ne lui reste plus de temps pour le prétendu loisir. Cette conception de la relation travail/loisir repose sur une illusion : l’homme investit tout son temps dans le travail, et il ne lui reste plus de temps libre pour le loisir.

Dans le cas du travail à la chaine c’est un travail sans but qui provoque l’ennuie. C’est un travail non productif qui désinvestit le travailleur de son travail mais aussi de sa vie, et l’emmène à un loisir oisif, vide de sens. Mais dans ces conditions le simple loisir ne peut pas compenser le travail stupide et impersonnel. La personne est poussée a consommer toujours plus, ce qui crée un industrie de la compensation : l’industrie du loisir, c’est vendre l’illusion d’une satisfaction qui n’existe pas dans le monde du travail. On la retrouve sous diverses formes comme les séries télé, la publicité, les romans a l’eau de rose. On crée une vie par procuration. Le travail n’a plus de but, l’homme ne se réjouit plus du résultat, il ne voit pas le résultat contrairement à un jardinier ou un cuisiner qui sera heureux de voir l’œuvre qu’il a produit. Le travailleur devient aliéné, étranger a son travail, il s’ennuie. C’est un phénomène qui envahit l’existence entière de l’homme. Le loisir devient pour lui aliéné et ne consiste qu’a se préparer à une nouvelle journée de travail. Il n’y a plus la dimension travail/récompense qu’il y avait chez les paysans qui dansaient après la moisson. Ils fêtaient le résultat du travail grâce a l’effort fourni, c’était une récompense méritée. Comme dirait Goethe, « semaines amères, fêtes joyeuses ». Mais pour le travailleur aliéné cet distinction n’existe plus, le loisir devient une annexe au temps de travail, un temps qui reste solidaire de ses objectifs professionnels.

Mais alors le loisir est-il l’absence totale de travail ?

​De nos jours on fait face à la situation inverse ;l’utopie du loisir. La société d’aujourd’hui investit dans les valeurs du loisir et du bien être de chacun, poussée par une société de consommation, en dévalorisant le travail. Si avant sur les pierres tombales on pouvait voir « Le travail fut sa vie », aujourd’hui on adopte plus souvent la devise « La vie commence après le travail ». C’est alors que la boutade de Tristan Bernard prend tout son sens « l’homme n’est pas fait pour travailler, la preuve, c’est que ça le fatigue ». La mentalité commune a changé et aujourd’hui la jeunesse ne se pose pas la question de « Comment trouver une profession qui soit utile et qui m’apporte satisfaction ? » mais plutôt « Comment gagner le plus possible et mener une vie confortable ? ». On ne cherche plus a être heureux dans son métier de tous les jours car l’idée d’un travail heureux n’est plus concevable, on cherche à éviter le travail au profit du loisir, ou alors on se résigne a faire un travail quelconque en attendant que ça soit fini.

Donc dans l’utopie du loisir il faut dépasser le stade du travail. Pour Ernst Bloch il faut a cela que l’homme ne se sente plus comme une simple marchandise, dessaisi de soi, aliéné. Il faut se débarrasser de tous les rouages d’une société de travail. On vivrait alors dans une société sans dimanches et jours fériés, le travail serait un loisir, pour vivre dans un quotidien de fête. Pour réussir a cela Ernst Bloch parie sur la mécanisation qui permettra a l’homme de ne plus exercer de travail physique, il supervisera le travail des machines et pendant ce temps pourra se livrer a des activités plus nobles. Mais voila, l’homme est un ensemble âme-esprit-corps, il ne peut pratiquer une activité avec son esprit uniquement, tout son corps doit être impliqué. Des lors l’homme, au lieu de se trouver enrichi par une pratique du loisir, est au contraire appauvri par une absence complète de travail. En effet laquelle de ces deux activités est plus bénéfique a l’homme : surveiller l’assemblage mécanique d’un jouet ou procéder à la fabrication artisanale de celui-ci, pièce par pièce ?

Dans une civilisation dominée par la technique le loisir doit compenser les facultés frustrées par le travail, qui ne les utilise pas. Alors l’homme s’adonne a toute une série de loisirs qui ne sont justifiés que par le plaisir qu’ils procurent. A cause du coté technique du travail on se donne la liberté du loisir. Mais alors si le contraste entre ces deux activités n’existait pas, le plaisir éprouvé par le biais du loisir serait-il le même ? Le loisir deviendrait lui-même une obligation, et sa spontanéité disparaitrait. En effet si c’est l’état qui doit financer le système des loisirs, alors ça lui donne une part de contrôle sur ceux-ci. Et puis si l’oisiveté n’est plus assurée par le loisir, d’autres formes comme la drogue ou la criminalité peuvent apparaitre pour l’assurer.

Alors si l’on ne fait rien de sa journée, peut-on avoir du plaisir à prendre du loisir ?

​Selon Jonas le vice de la construction utopique repose sur le fait que « la liberté commence là où cesse la nécessité » . Mais en rompant le royaume de la nécessité, on enlève à la liberté tout son sens. Des lors l’homme n’apporte plus aucun intérêt a l’action entreprise. C’est une situation très périlleuse car l’homme doit sans cesse être appliqué a quelque chose pour ne pas tourner en rond. Dans le cas contraire il peut sombrer dans l’autodestruction

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