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Lettres De Charles Vii Établissant Un Parlement à Toulouse (1443)

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ffaires politiques, la Chambre des comptes pour les questions financières, et le Parlement pour la justice. C'est l'origine du Parlement de Paris au XIIIe siècle. Le Parlement a compétence sur tout le royaume jusqu'au début du XVe siècle et la règle d’un Parlement unique siégeant à Paris est toujours observée.

Le Parlement de Toulouse est le premier Parlement créé en province. A la mort d’Alphonse de Poitiers et de Jeanne de Toulouse, en 1271, le comté de Toulouse entre dans le domaine royal. De là naît le Languedoc royal, qui va persister jusqu'à la Révolution française, conservant ses coutumes, sa langue et une administration spécifique. La province restera toujours garante de la cohésion du territoire royal, dans les périodes les plus troubles comme la guerre de Cent Ans au cours de laquelle elle repousse la domination anglaise en Guyenne. Toulouse est, par sa superficie, au XVe siècle, une des plus grandes villes du royaume. Exploitant en surtout les ressources agricoles languedociennes (céréales ou pastel), les Toulousains font de leur ville un important marché régional en relation avec Bayonne, Barcelone, Montpellier, Lyon, Paris…

Un Parlement à Toulouse n’était pas une chose tout à fait nouvelle. Après la mainmise temporaire du parti bourguignon sur le Languedoc, le dauphin Charles, qui avait pris le titre de régent du royaume dès la fin du mois de décembre 1418, décide d’entreprendre à la fin de 1419 un grand voyage en Languedoc pour rallier définitivement à sa cause les provinces méridionales du royaume. Le ralliement du Languedoc assure au futur Charles VII une base solide. En mars 1420, le dauphin entre à Toulouse et institue un Parlement pour le Languedoc et le Duché de Guyenne deçà la Dordogne. Dès 1425, il est transféré à Béziers. Cette expérience est interrompue en 1428 lorsque le Parlement est réuni au Parlement de Poitiers où les membres du Parlement de Paris restés fidèles à Charles VII avaient été transférés. Lorsque le Roi reconquiert sa capitale, le parlement de Poitiers revient à Paris.

En 1442, Charles VII fait une expédition dans la Gascogne et le Languedoc. Il y prend quelques places, et, en se retirant, s’engage formellement à rétablir le Parlement. Il manque cependant l’acte officiel d’institution de la nouvelle Cour. Le roi se décide à établir définitivement à Toulouse un Parlement sédentaire par l’édit donné à Saumur le 11 octobre 1443, document que nous allons étudier. Cet édit de rétablissement expose et reprend les arguments invoqués par les États, fixe le siège de la Cour à Toulouse et précise sa composition.

La province a réclamé un Parlement et le Roi a effectivement créé un Parlements provincial. Mais dans quel état d’esprit le Roi et son Conseil ont-il admis la nouvelle Cour ? Fut-elle un succès ou un échec politique ? On a longtemps cru que les vues du Roi devaient nécessairement épouser celles de ses officiers parisiens, que le Roi ne pouvait que lier la grandeur de la monarchie et la prospérité du royaume au succès de la centralisation géographique, et qu’il créa donc les Parlements provinciaux par faiblesse.

Nous pouvons donc nous poser la question suivante : dans quelle mesure l’établissement d’un Parlement à Toulouse par Charles VII représente-t-il au contraire un renforcement du pouvoir monarchique et non un affaiblissement ?

Nous verrons tout d’abord les motifs qui président à l’établissement du Parlement puis, l’organisation du Parlement. Enfin, au terme de notre étude, nous démontrerons que la nouvelle Cour est un instrument dans l’entreprise de consolidation du royaume.

I – Les motifs qui président à l’établissement du Parlement

Depuis longtemps, les États du Languedoc réclamaient un parlement. Les spécificités du droit méridional, l’éloignement du parlement de Paris, la longueur des procès et leur coût apparaissent comme autant d’arguments justifiant l’installation d’une telle cour.

A) les longues suppliques des Languedociens

L’histoire de la création du parlement de Toulouse est une très longue histoire. Les États du Languedoc ont œuvré activement pour l’ouverture d’une cour de justice (« sur la demande instante et l’humble supplication des trois ordres du Pays d’Oc susdit » lignes 18-19).

Après la réunion des parlements de Poitiers et de Languedoc en 1428, les États réunis à Béziers en juillet 1430 demandent que le Parlement retourne au pays de Languedoc, au moins jusqu’à ce que le Parlement royal rentre à Paris et pour éviter « les grands périls qui sont d’ici à Poitiers ». Prudents, les commissaires du roi se bornent à répondre qu’ils en écriront au souverain.

Lorsque Charles VII reconquiert sa capitale et que le Parlement de Poitiers revient à Paris, les réclamations se font plus incisives. Les États de Languedoc, réunis à Montpellier, au mois de mars 1437, en présence du Roi, le supplièrent de prendre en considération la situation du Languedoc. Le Roi ne fit aucune difficulté d’accéder à cette requête : par lettres du 18 avril 1437, il décida qu’il y serait établi un Parlement, lequel commencerait à siéger à partir de la Saint-Martin. Le Parlement de Paris s’émut de la mesure prise à Montpellier : le premier président fut chargé d’écrire au Roi, et de le supplier de n’instituer, en aucun lieu que ce fût, d’autre Parlement que son Parlement siégeant à Paris. Devant cette opposition, le Roi suspendit l’exécution de ses lettres.

Quelques années plus tard, les États de Languedoc reviennent à la charge. Dans le cahier de doléances rédigé à Béziers en novembre 1442, ils sollicitent la réformation de la justice et l’installation d’un Parlement en Languedoc, conformément aux traditions de la royauté. Le Roi répondit qu’il devait prochainement se transporter à Paris, et qu’après avoir pris l’avis des princes du sang, de son grand conseil et du Parlement, il aviserait. Finalement, le 11 octobre 1443, ils obtiennent satisfaction lorsque Charles VII restitue au Languedoc sa Cour.

TRANSITION Les raisons de la création du parlement à Toulouse

B) Rapprocher la justice des justiciables

Les États du Languedoc invoquaient constamment l'éloignement de la capitale parisienne et du Parlement (« tenant compte du long intervalle territorial qui […] sépare le susdit Pays d’Oc […] de notre ville de Paris » lignes 9 à 11 ou encore « faisant état des étendues de routes » ligne 12) mais aussi la longueur des procès et leur coût. Le privilège d’être jugé au plus près de chez soi a toujours été une revendication des populations, comme le montrent maintes chartes de franchises médiévales. La Cour de Paris, à laquelle le roi délègue le pouvoir de trancher en son nom, se trouve bien souvent appelée à statuer en un lieu situé fort loin du domicile de ses sujets.

Trop éloignés de Bourges ou de Paris, les Méridionaux veulent éviter les inconvénients que présentent pour eux l’obligation d’aller dans la capitale. Le voyage des plaideurs jusqu’à Paris, la nécessité de compléter les enquêtes sur place, tout cela occasionnait, en un temps où le déplacement de Toulouse à la capitale représentait une quinzaine de jours, des frais et des pertes de temps considérables.

D’où le désir de ces derniers de voir la justice se rapprocher d’eux, ce qui aurait l’avantage d’abréger la durée des procès, de gagner du temps aussi bien pour les justiciables que pour les juges du royaume, de diminuer les frais de justice et d’éviter des dépenses lourdes et inutiles aux sujets de la couronne. Par cette ordonnance, les justiciables du midi y gagnent de n’avoir pas à aller chercher la justice si loin.

La « distance du lieu » est l’argument le plus fréquent mais il n’est peut-être pas le plus profond. En effet, tous les Méridionaux sont d’abord gênés, dans leurs rapports avec Paris, par la langue. Les Languedociens insistaient également sur les dangers qu'il y avait à se rendre à Paris (« faisant état […] des périls des personnes, des troubles des guerres, des pestes et autres calamités qui […] frappent en ces temps notre royaume » lignes 12 à 14).

La décade 1430-1440 est l’une des plus sombres de l’histoire toulousaine. De 1430 à 1434, une série de mauvaises récoltes provoque une grave disette. Le Languedoc est désolé par les compagnies de routiers ; leurs brigandages et leurs cruautés répandent la terreur dans tout le pays. Deux de leurs chefs se distinguent : le bâtard de Bourbon et Rodrigue de Villandrando. Ils faisaient des prisonniers dans les campagnes, les mettaient à rançon, et tuaient impitoyablement ceux qui n’avaient pas de quoi se racheter. Couronnant le tout, l’épidémie de peste se déclare en janvier 1440 ; elle tient Toulouse dans la terreur pendant tout l’été, s’apaise à l’automne, mais pour reparaître en un nouvel et plus bref accès au printemps 1441.

TRANSITION

C) la spécificité du droit romain

Les Languedociens mettent en avant un deuxième argument : le particularisme du droit écrit. Les provinciaux tiennent à leurs lois et à leurs usages, ils estiment que leurs franchises et leurs libertés valent bien celles de Paris, et qu’ils « sont sujets du Roy, comme sont ceux de la ville de Paris ».

L’ordonnance soumise à notre étude tient compte des

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