Riopelle

En fait, il semble vouloir mettre en relief un aspect beaucoup plus significatif du primitiviste qui est celui du conteur, du cabotin au verbe indompté, qui relate sans cesse, sous les modes du désordre conceptuel, du dérisoire ou du fantaisiste, des anecdotes qui feront peu à peu figure de mythes.

Riopelle assimile ainsi ces personnages au jeu, suivant un esprit clanique et un rite précis.

Des auteurs comme Pierre Bourdieu. Peter Donnelv et Richard Gruneau se sont penchés sur le phénomène du sport en tant que site de résistance populaire, d'action symbolique de protestation sociale, de lutte des classes ou de désaliénation coloniale. Selon eux, le sport s'avère un moyen moderne et démocratique auquel les groupes marginalisés ou minoritaires auraient recours afin d'affronter l'Autre, en dehors de l'arène sociopoli ique, ou du moins, sous une forme sociopolitique déguisée ou symbolique.

Dans le même esprit, l’intérét de Riopelle pour les héros populaires de type sportif, et sa tendance à glorifier les vainqueurs et les conquérants, deviendra un moyen de contrebalancer la mémoire des héros-martyrs et des symboles politiques vaincus qui hantent la mémoire du Canada français.

Le coureur des bois: L'affirmation d'une identité autonome et glorieuse s'effectuera, chez l'artiste, par un calque du modèle ensauvagé du Canadien français.

1960: Gérard Bouchard a souligné que, contrairement aux autres contextes coloniaux tels que le Canada anglais, les États-Unis, l'Australie et l'Amérique du Sud, où le type ensauvagé de « l'homme de la frontière » a été consi- déré comme une figure glorieuse, comme modèle hégé- monique ayant nourri l'identité nationale.

Le premier de la lignée des nomades, Étienne Brûlé, s'assimilait dès 1610 aux Algonquins, en apprenant leur langue et en adoptant leurs mœurs et coutumes. On note, par la suite, que bon nombre de Français engagés dans la traite des fourrures faisaient de même.

bon nombre des descendants d'agriculteurs du XVII° siècle abandonnaient la vie de la terre, si bien qu'en 1680, le tiers de la population adulte masculine comptait des coureurs des bois et des voyageurs. Au début du XVIIIª siècle, un témoignage anonyme racontait que 88.8% la vie des coureurs de bois est une perpétuelle oisiveté qui les conduit à toutes sortes de débauches. Certains missionnaires blâmaient les traiteurs et les coureurs des bois d'entraver la bonne tenue des compagnes de conversion.

Parmi les descendants de Brûlé étaient recensés des hommes de classes sociales aussi diverses que des habitants, des seigneurs, des engagés et des anciens militaires. Du nombre des plus connus, Jean Nicolet joua, au cours du XVIIº siècle, le rôle d'interprète auprès du Père LeJeune, tandis que le Sieur des Groseillers et Pierre Esprit Radisson eurent le mandat de percer le commerce des fourrures vers les Grands Lacs (entre 1654 et 1657), allant ainsi au-devant des Amérindiens pour recueillir les prises. Lorsque le gouverneur les condamna à une amende au lieu d'encourager leurs exploits, ils s'allièrent aux Anglais et fondèrent la Compagnie de la Baie d'Hudson, ce qui contribua à ternir la réputation du coureur des bois.