L’île du Dr Moreau de Herbert Georges Wells.
Commentaire de texte : L’île du Dr Moreau de Herbert Georges Wells.. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar CynthiaS • 25 Septembre 2022 • Commentaire de texte • 5 625 Mots (23 Pages) • 551 Vues
Ainsi on peut se demander dans quel mesure le raisonnement du savant fou et orgueilleux incarnée ici par le Docteur Moreau, pose la question de la porosité des limites séparant l’homme de l’animal, du naturel au monstrueux, de la morale à l’abominable, illustrant dès lors la fragilité de la condition humaine dans un siècle bouleversé par la science et des nouvelles théories en découlant.
- La figure du scientifique exalté
- Un raisonnement méthodique (description organisée, logique du discours, impression de réalisme) mais discours solitaire.
- Un scientifique exalté, un savant fou => passage de l’objectif au subjectif => Libido Sciendi = champ lexical du désir, de la passion, rythme des phrases, anaphore
- Résultat d’une science démesurée, caractère aliénant de ses recherches, cercle vicieux, boucle sans fin, idée de sacrifice, de l’isolement, « Toute une semaine, jour et nuit » « seul désir » « sans me soucier d’autre chose » caractère obnubilant et exclusif des recherches, qui aboutit à un hubris démesuré
- Du scientifique à l’artiste, de l’artiste au démiurge
- Question de l’hubris démesurée propre à tout créateur, Un hubris qui l’amène au-dessus de la morale humaine, Question de la morale et de l’éthique, la soif de connaissance aveugle Moreau au point de le rendre hermétique à la morale et aux lois humaines, s’affranchir de la morale c’est donc se retirer de la société des hommes, soit en étant au-dessus donc Dieu, soit en n’étant pas concerné donc = animal, car amoralité inerrante à la nature. Plus déresponsabilisation quand il rate « ce monstre » quand il réussit « mon premier homme »
- Qui est bestial, qui est humain : point de vus différents : celui de Moreau face à Pendrick, face au lecteur, face aux animaux, face aux Canaques, regards => lien avec la fin du livre. Tension nature culture
- Être Dieu => Dimension biblique, lois… Moreau veut être Dieu mais ne parvient pas, aspect difforme de ses créatures, pulsions réprimées qui réapparaissent forcement,
- S’affranchir de la finitude de l’homme ; bouleversement théoriques (Darwin) => qui sommes-nous ?
- Angoisse d’un siècle, tension entre l’appréhension et l’espoir d’une modernité incertaine qui peu être destructrice, Création = destruction. « j’en viendrai à bout » => Conséquence d’un hubris destructeur, conséquence de se prendre pour dieu.
- Darwinisme => relativisation de la place de l’homme dans l’univers, Moreau veut créer des humains à partir de bêtes, rétablir une limite bien distincte entre l’homme et l’animal, la supériorité de l’homme sur les autres êtres vivants, recréer une société, => aspect colonial, éducateur, missionnaire reproduire à l’infini des espèces améliorer pour que ne meurt jamais l’humanité, volonté de contrôle. « Gorille » => l’homme singe moins répugnant que les autres car plus proche de l’humain ?
- Réflexions de Wells porté par son récit (désir de supériorité, colonialisme…) + critique de la vivisection + usage de la science sans raison et sans réfléchir aux conséquences.». Qu’est-ce qu’être humain ?
Le texte que nous allons étudier est un extrait du chapitre huit du roman L’île du Dr Moreau de Herbert Georges Wells. Considéré comme un des précurseurs de la science-fiction, Wells propose à travers ses écrits prolifiques une réflexion éthique sur l’homme et la société. Parut en 1896, le roman se situe dans une période charnière, entre l’exaltation scientifique du XIXème siècle et l’appréhension grandissante de cette modernité nouvelle qui s’enracine au XXème siècle. L’électricité, la locomotive, les vaccins sont autant d’avancées scientifiques qui bouleversent une société victorienne pétrie de normes et de conventions mais aussi de doutes face à ces transformations radicales. Entre euphorie et anxiété, certains penseront que tout est désormais possible, que la nature peut être domestiquée, quand d’autres, plus pessimistes, s’attacheront à peindre les limites et les conséquences nocives qui peuvent découler de ce rayonnement scientifique. L’île du Docteur Moreau, propose ainsi une vraie réflexion sur la morale, l’humanité et les limites du progrès. La figure du docteur, devient alors le médium approprié pour tracer les contours d’une satire sociale ; son orgueil et ses objectifs refléteront en outre certaines théories scientifiques comme le darwinisme, bouleversant l’homme, et sa représentation du monde. Bien plus qu’un roman d’aventure, ou qu’une « Robinsonnade » comme il a pu être catégorisé, L’île du Docteur Moreau est un terrain fécond où nait réflexions et angoisses, une île monstrueuse qui interroge notre rapport à l’altérité et à la norme. Les montres de Wells, celui de Mary Shelley et de tant d’autres sont autant de miroirs qui dérangent et percutent, qui rendent compte d’une société tiraillée, et de notre désir constant d’être plus qu’humain, de notre volonté démesurée de s’affranchir de la finitude de notre condition. Ainsi, après l’étude du texte, on peut se demander dans quelle mesure le raisonnement du savant fou et orgueilleux incarnée ici par le Docteur Moreau, soulève la question de la porosité des limites séparant l’homme de l’animal, du naturel au monstrueux, de la morale à l’abominable, illustrant dès lors la fragilité de la condition humaine dans un siècle bouleversé par la science et des nouvelles théories en découlant. Pour répondre à cette problématique, nous nous attacherons d’une part à peindre le portrait d’un scientifique exalté, dépossédé de l’objectivité nécessaire à la pratique de la science ; nous nous concentrerons ensuite sur l’expression d’un hubris ravageur, en abordant la question de l’éthique et la morale, de la tension entre l’homme et le monstre ; enfin, nous replacerons l’extrait dans son siècle en évoquant tant les réflexions de l’auteur que les théories scientifiques qui apparaissent.
Dans un premier temps, à la lecture de cet extrait, nous pouvons noter que nous assistons, tout comme le narrateur à une scène d’explication. En effet, le docteur Moreau développe tout au long de l’extrait un raisonnement méticuleux, nourrit d’une description précise et organisée, dans laquelle on découvre les étapes et les moyens mis en place pour aboutir au but de sa démarche. La première partie du texte est en effet scandée d’un lexique scientifique : ligne 1, 2 et 13 nous pouvons lire « mes recherches », à la ligne 2 : « une question » « une méthode », ligne 3 « une réponse » « une nouvelle question », à la ligne 4 la notion « d’investigateur » apparaît, Moreau est plus que « chercheur » il scrute attentivement, pour venir à bout de ses « questions » qui semblent immerger de toute part, cette volonté de découverte se perçoit également dans les termes « trouver » ligne 9 et « résoudre » ligne 13. Une apparente objectivité qui se laisse voir tout au long de sa description, l’on retrouve en effet autant des connecteurs logiques que temporels : « jusqu’à ce jour » (ligne 11), « au début » (ligne 19), « Une fois fini » (ligne 21), « et enfin » (ligne 24), « Puis » (ligne 27) « quand j’eu » (ligne 30), « d’abord » (ligne 46), « après cela » (ligne 54). Le docteur se veut donc très méthodique, sa description est organisée. Néanmoins si nous découvrons sa réflexion, nous ne pouvons y prendre part, ce n’est pas un dialogue mais un exposé individuel. Comme le ferait un homme de science exposant son compte rendu via un dictaphone. En effet, bien qu’il ait deux personnages dans l’extrait, la parole du docteur remplit l’espace et le temps, le narrateur parvient tout juste à formuler quelques mots avant d’être coupé par Moreau et d’être réduit comme nous à l’état d’auditeur passif et invisible, simplement présent pour rendre sa parole légitime, manifeste et raisonnée. Un développement qui lui confère en somme un caractère appliqué et scientifique, mais plus encore, il brosse aussitôt les prémisses d’un personnage orgueilleux dont la méthode à priori objective bascule vers le partial et l’exclusif. Nous sentons en effet très vite que cette apparente objectivité que lui seul semble adhérer, est en vérité le déguisement fallacieux d’une subjectivité exaltée qui laisse nettement transparaître la folie d’un savant emporté par ses conquêtes et son désir.
En outre, cette subjectivité presque emphatique se laisse apercevoir à plusieurs reprises : l’anaphore hyperbolique ligne 3 et 5 « Vous ne pouvez-vous imaginer » sollicite tant le narrateur que le lecteur qui est convié à essayer de ressentir l’exaltation qui anime le scientifique. De plus, le premier paragraphe est teinté d’un vocabulaire amoureux, proche d’un désir charnel qui montre à quel point le docteur n’exprime plus un point de vu raisonnable puisqu’emporté par la « passion ». Terme fort que l’on retrouve à la ligne 4, et qui est définit selon le CNRTL comme une « Tendance d'origine affective caractérisée par son intensité et par l'intérêt exclusif et impérieux porté à un seul objet entraînant la diminution ou la perte du sens moral, de l'esprit critique et pouvant provoquer une rupture de l'équilibre psychique. » Cette acception fait clairement du scientifique un savant fou qui ne contrôle plus ses recherches puisque dominé par la « passion » au point qu’elle « s’empare de lui » (ligne 5). L’homme de science quitte le domaine de la raison, pour rejoindre une autre sphère, celle de l’émotion. Incapable de discerner le vrai du faux, le bien du mal, il quitte « la faculté qu’a l’esprit humain d’organiser ses relations avec le réel ». Vient alors la notion « d’étranges délices » ligne 5 qui couplée au « désir » ligne 5 et 9 confirme son avidité sensuelle et dominatrice que peu traduire le terme de « Lubido Sciendi » introduit par Saint Augustin, ce désir de connaissance extrême qui conduisit Adam et Eve à croquer la pomme, ce qu’à sa façon, fera finalement Moreau.
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