Le Mariage de Figaro - scène d'exposition
Commentaire de texte : Le Mariage de Figaro - scène d'exposition. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Nicolas Guilbert • 24 Mars 2020 • Commentaire de texte • 1 731 Mots (7 Pages) • 561 Vues
Beaumarchais, Le Mariage de Figaro (1784), acte I, scène 1 |
Introduction
- Beaumarchais : Dramaturge et essayiste, Beaumarchais était avant tout un homme des Lumières, désireux de remettre en cause les traditions de l’Ancien régime.
- Le Mariage de Figaro : Créée en 1784 et faisant suite au Barbier de Séville (1775), cette pièce met essentiellement en scène les mêmes personnages. Leur tempérament et leurs relations, cependant, ont bien changé.
- Acte I, scène 1 : Discussion entre Figaro et Suzanne, au matin de leurs noces.
- Problématique : Cette scène joue-t-elle pleinement son rôle de scène d'exposition ?
- Plan : I. Un badinage amoureux (l. 1-28)
II. L'entrée dans la pièce (l. 29-62)
I. Un badinage amoureux (l. 1-28)
1. Une discussion légère (l. 1-8)
- Début in medias res : Figaro est en pleine action (il mesure une surface).
- Double énonciation : Beaumarchais veut transmettre un maximum d'informations au public en un minimum de temps.
- Cadre spatio-temporel : « le matin des noces » (l. 4-5), « château » (l. 21)
- Nom des personnages : apostrophe « Figaro » (l. 2), « Suzanne » (l. 7)
- Statut de Figaro à travers la mention du comte (« monseigneur » l. 7, 24…) et de Suzanne à travers celle de la comtesse (« madame » l. 23)
- Thème de la pièce évoqué à travers le champ lexical du mariage, déjà annoncé par le titre : « noces » (l. 5), « amoureux » (l. 5), « époux » (l. 5)
- Proximité des deux personnages :
- Suzanne tutoie Figaro (« tu » l. 2)
- Geste affectueux : « lui prend les mains » (l. 3)
- Termes affectueux + déterminants possessifs : « ma charmante » (l. 3), « mon fils » (l. 6), « ma petite Suzanne » (l. 7)
- Registre lyrique de Figaro marqué par l'interjection « Oh » (l. 3) et la ponctuation expressive (points d'exclamation l. 3 et 5)
- Champ lexical de la beauté : « charmante » (l. 3), « joli » (l. 4), « belle » (l. 4), « doux » (l. 4)
- Champ lexical de la sexualité : « virginal » (l. 4), « noces » (l. 5), « lit » (l. 7)
- Ambiguïté puisque le lit nuptial est offert par le comte, qui s’introduit dans l’intimité du couple.
2. Un refus immotivé (l. 9-20)
- Dynamisme du dialogue assuré par…
- les stichomythies l. 9-18
- la ponctuation expressive avec de multiples modalités interrogatives (l. 9, 12, 14, 17) et exclamatives (l. 18)
- l’interjection « Oh ! » (l. 18)
- Absence d’argumentation de Suzanne :
- Répétition de « je n’en veux point » (l. 11 et 13)
- Doublement de la 1ère personne dans « moi je » (l. 11) = idée de caprice
- Tournures négatives dans toutes ses répliques aux l. 11-17 :
- Négations syntaxiques totales « ne point » (l. 11 et 13) et « ne pas » (l. 17
- Négation lexicale à travers le préfixe dé- dans « déplaît » (l. 15)
- Antithèse « dit une raison » ≠ « n’en veux pas dire » (l. 16-17)
- Paradoxe « Prouver que j’ai raison [...] tort » (l. 19) = aspect comique
- « Es-tu mon serviteur ou non ? » (l. 19-20) : référence au code de l’amour courtois. Au Moyen âge, le chevalier servant devait obéir aveuglément aux ordres de la Dame de ses pensées et ne jamais la contredire : si Figaro contredit Suzanne, il n’est pas véritablement amoureux d’elle.
- Suzanne s’adresse toujours à Figaro en le tutoyant (« tu » l . 19), ce dernier la désigne...
- en employant le pronom personnel indéfini : « On dit une raison » (l. 18)
- en l’englobant dans l’ensemble de la gent féminine : « quand elles sont sûres de nous » (l. 16)
= topos du caractère capricieux des femmes
= Comique de mœurs jouant sur des traits communément associés aux femmes : le caractère capricieux et le manque de rationalité (cf. terme « humeur » l . 21).
3. Vers une explication (l. 21-28)
- Face à ce qu’il prend pour un caprice, Figaro va argumenter :
- Terme mélioratif au superlatif relatif « la plus commode » (l. 21-22)
- Parallélismes montrant qu’ils bénéficieraient tous deux de cet arrangement :
- « elle sonnera de son côté » (l. 23) / « il n’a qu’à tinter du sien » (l. 24-25)
- « zeste, en deux pas tu es chez elle » (l. 23-24) / « crac, en trois sauts me voilà rendu » (l. 25)
- « sonnera » (l. 23) : usage du futur, et non du conditionnel présent.
- Comique de mots :
- Interjections « zeste » (l. 23) et « crac » (l. 25)
- Double sens grivois des expressions « crac » et « en trois sauts », utilisées par Figaro l. 25 et reprises par Suzanne l. 28.
- Aposiopèse l. 28 : laisse deviner la suite.
II. L'entrée dans la pièce (l. 29-62)
1. L’évocation des manigances du comte (l. 29-46)
- Choc de Figaro manifesté par…
- le passage du tutoiement (« tu es chez elle » l. 24) au vouvoiement (« Qu’entendez-vous » l. 25) = effet comique
- les interjections « Eh ! » (l. 31) et « bon Dieu » (l. 31, qui appartient au registre familier
- « Il y a […] donnant leçon » (l. 32-37)
- Suite de l'exposition : « monseigneur » (l. 7 et 24) est « le comte Almaviva » (l. 33), déjà connu des spectateurs du Barbier de Séville, tout comme « Basile » (l. 35).
- Révélation des manigances du comte appuyées par des procédés d’insistance :
- Apostrophe « mon ami » (l. 32)
- Tournures emphatiques « Il y a […] que » (l. 32) et « c’est sur […] que » (l. 34)
- Proposition incise « entends-tu ? » (l. 34)
- Litote « auxquelles il espère que ce logement ne nuira point » (l. 34-35)
- Basile est évoqué péjorativement :
- Antiphrases « le loyal Bazile » (l. 35) et « mon noble maître à chanter » (l. 36)
- Oxymore « honnête agent de ses plaisirs » (l. 36) [on ne peut pas être « honnête », c’est-à-dire, dans le contexte, partisan de la morale, et aider le comte dans ses desseins immoraux].
- « Basile ! [ …] quelqu'un... » (l. 38-39)
- Antiphrase employée en apostrophe « Ô mon mignon » (l. 38)
- Périphrases :
- « volée de bois vert, appliquée sur une échine » (l. 38-39) pour désigner des coups de bâton
- « redressé la moelle épinière à quelqu'un » (l. 39) pour dire « frappé le dos »
= comique de mots
- Échange de courtes répliques l. 40-46)
- Suzanne se moque de la naïveté de Figaro :
- Terme condescendant en apostrophe « bon garçon » (l. 40)
- Question rhétorique « Tu croyais […] ton mérite ? » (l. 40-41)
- Personnification du mérite de Figaro : « les beaux yeux de ton mérite » (l. 41)
- Antithèse « les gens d'esprit sont bêtes » (l. 43)
- Figaro pour sa part...
- évoque implicitement Le Barbier de Séville : « J’avais assez fait pour l’espérer » (l. 42)
- se moque de lui-même à travers le parallélisme « On le dit » (l. 44) / « On a tort » (l. 46)
2. L’annonce de l’intrigue (l. 47-62)
- Suzanne exprime de manière plus claire ce qu'elle a juste laissé entendre jusque là mais, par pudeur et par souci pour Beaumarchais de respecter la règle de bienséance, elle utilise…
- des périphrases à valeur d'euphémisme :
- « obtenir de moi […] certain quart d’heure, seul à seule » (l. 47-48)pour « coucher avec moi »
- « ancien droit du seigneur » (l. 48) pour « droit de cuissage »
- une aposiopèse (l. 48)
- Suzanne martèle désormais son message :
- Antithèse « s’il l’a détruit, il s’en repent » (l. 53)
- Tournure emphatique « et c’est de ta fiancée qu’il » (l. 53)
- Implication personnelle de Figaro : « ta fiancée » (l. 53)
- Badinage sur le thème des cornes du cocu (l. 55-59) :
- Comique de gestes : « se frottant la tête » (l. 55)
- Métaphore « front fertilisé » (l. 55-56)
- Nouvelle aposiopèse, avec sous-entendu comique (l. 59)
- Paradoxe comique du « trompeur trompé » (l. 60-61), déjà rendu célèbre par la morale de la fable de La Fontaine « Le Coq et le Renard » : « Car c’est double plaisir de tromper le trompeur ».
Conclusion
Le caractère dynamique de la pièce transparaît donc déjà dans cette scène de badinage amoureux, qui propose un dialogue vif et amusant. Les grandes lignes de l’intrigue transparaissent déjà, à mesure que Suzanne évoque les personnages et les manigances du comte tandis que Figaro élabore un plan.
Cette scène joue donc parfaitement son rôle de scène d’exposition, présentant à la fois le cadre de la pièce, ses personnages principaux et les grandes lignes de l’intrigue.
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