La Manche
Mémoire : La Manche. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Makila • 30 Septembre 2020 • Mémoire • 1 032 Mots (5 Pages) • 401 Vues
La Manche.
Le Gulf Stream qui sépare ses eaux des eaux océaniques.
La Manche. C’est un couloir entre la mer froide du Nord et le vaste Atlantique. Toutes les trois minutes, les paquebots traversent, transportant containers, camions, voitures, motos, vélos, humains, etc. Il y a les pêcheurs, la police des mers, les douaniers, les marins, quelques perdus, peu ou pas d’aventuriers, comme ces nageurs accompagnés de tout une équipe de secours sur leurs bateaux moteurs. À la saison, il y a les vacanciers.
Il y a Pierre. À chacune de ses traversées, il regarde depuis le large l’agitation de la côte qui se fond dans le tapis brasillant. La lumière se disperse sur la surface brisée des eaux et efface les contours. Elle s’habille de couleurs dans les voiles fugaces et les cerfs-volants qui gravitent loin au-dessus des flots. Une multitude de silhouettes tremblent dans l’éclat du jour qui révèle ainsi l’évanescence des êtres qui disparaissent et réapparaissent dans les contre-jours, tels des fantômes. Pierre pense à chaque fois : Magnifique ! Il examine le jeu des couleurs, de la lumière puis cherche quel artiste a su reproduire cette majesté-là. Un jour, un pointilliste, d’autres, un romantique. L’hiver, les pinceaux de l’école hollandaise s’imposent, parfois, peut-être, un minimaliste qui aurait su réduire toute la palette et aller à l’essentiel. Mais où se trouve cette essence qu’il faut montrer ? C’est là le grand mystère et le génie de tout art, se satisfait Pierre, admirant la côte.
Pierre guette : viendra-t-elle ? Les matins ensoleillés, il sait qu’elle et sa monture quittent les chasses, les pâtures et les petits bois pour se lancer au galop dans le sable vers la mer.
***
Londres, dans l’appartement de Primrose Hill.
Il s’allonge sur le lit recouvert d’un drap blanc, blanc comme le plafond ou les murs. Il ferme un instant les yeux. Louise. Il tente de se remémorer sa présence, mais ne vient que l’image d’une femme qui tourne légèrement la tête vers lui et sourit. Un regard d’eau clair et une chevelure rousse. L’image lui échappe, viennent d’autres visages. Ceux de clients qu’il est venu rencontrer. Acheteurs et vendeurs. Il se lève. Il laisse derrière lui, sur la table de nuit, la photo d’une femme qui sourit.
Dans le salon, il s’assoit sur un petit divan en cuir brun capitonné mis en valeur par un mur bleu pâle, le seul pan coloré de l’appartement. Il attrape la serviette qu’il a posée sur le tapis de laine crème et la pose sur la petite table, une Pierre Lota, pour l’ouvrir. L’ordinateur sorti, il se lève à nouveau et se dirige vers le bar de la petite cuisine américaine. Il prend un verre dans le placard haut et le remplit d’eau. Il va s’asseoir en face du sofa, dans le fauteuil en forme d’œuf, et pose son verre sur la table. Il pivote vers la fenêtre : les rideaux occultants sont fermés. Il se lève pour les tirer, grands ouverts. Une lumière poudreuse pénètre et se dépose sur tout, comme pour révéler le vrai contour des choses. Pierre regarde dehors le parc de Primrose Hill. L’herbe est verte, les arbres jaunes, le ciel est fermé. Il s’étire, sourit et se retourne pour prendre l’ordinateur qu’il dépose sur la petite table et allume. Il tire une des deux chaises au bois clair. Deux heures passent. Des rendez-vous sont confirmés, d’autres sont pris, des notes importantes sont enregistrées, le calendrier mis à jour. Il ferme l’ordinateur, se lève à nouveau, passe son caban noir et sort.
Tout est maintenant mouillé. L’air même qu’on respire. Il a plu.
***
Pierre transite. Il est là, selon son habitude, à la poupe du navire. Ballotté. L’eau est sombre. Sous un ciel d’automne bas. Louise n’est pas venue. Le ciel roule des nuages noirs.
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