Le rire que Rabelais cherche à produire chez son lecteur, est-il un masque ou un révélateur ?
Dissertation : Le rire que Rabelais cherche à produire chez son lecteur, est-il un masque ou un révélateur ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar no2006 • 19 Décembre 2023 • Dissertation • 2 135 Mots (9 Pages) • 418 Vues
« Le rire que Rabelais cherche à produire chez son lecteur, est-il un masque ou un révélateur ? »
Souvent considéré comme une parodie du roman chevaleresque du Moyen-Age, Gargantua, célèbre roman de l'homme qu'est François Rabelais, a tenu de cette caractéristique un grand succès. Fils d'avocat, né à la fin du XVème siècle et décédé au milieu du XVIème siècle, François Rabelais, fut moine au couvent franciscain de Fontenay-le-Comte avant de rejoindre l'ordre des Bénédictins aux règles plus souples. Plus tard, il fréquente de nombreuses universités et étudie le grec et le droit, puis enseigne et pratique la médecine. Rabelais, homme érudit, écrit de nombreux livres, notamment Pantagruel en 1532 sous l'anagramme d'Alcofribas Nasier, mais le roman est condamné par la Sorbonne, puis il publie Gargantua en 1534. François Ier, prince de la Renaissance et protecteur des artistes ouvert au savoir et à la culture, permet à Rabelais de publier librement ses livres malgré la condamnation de la Sorbonne. Alors que la Renaissance constitue une rupture avec le Moyen-Âge puisque l'image de l'homme se renouvelle, un mouvement commence à s'affirmer : l'humanisme. Celui-ci place l'homme et le savoir au centre de la réflexion. Les humanistes tels qu’Érasme, Montaigne et Rabelais participent par leurs écrits à l’ascension de ce mouvement, ils ont foi en l'esprit humain et en la capacité de chacun à se remettre en question pour s'améliorer. Dans Gargantua, l’œuvre de Rabelais, qui rentre dans le parcours « Rire et savoir », nous pourrions nous demander si le rire est un masque. Cependant, ne serait-il pas plutôt un révélateur ? L'auteur écrit dans le « Aux lecteur », « Mieux vaut rire que de larmes écrire, Parce que rire est le propre de l'homme. ». Le rire serait-il alors thérapeutique ? En quoi le rire que cherche à produire Rabelais, dans son roman Gargantua, lui permet-il de nous révéler ses valeurs intellectuelles et éthiques ? Pour y répondre, nous étudierons tout d'abord en quoi consiste le comique de Rabelais, homme érudit, puis pourquoi il cherche à réformer les systèmes éducatifs de son époque en mettant en valeur le mouvement auquel il appartient, enfin nous verrons comment il promu la sagesse et remet en cause l’Église catholique.
Pour commencer, Rabelais utilise un comique bien à lui. Il utilise des mots pour nous amuser, et étant médecin, cet auteur nous fait découvrir son autre rapport au rire.
En effet, Rabelais, homme érudit, emploi des mots, pour le moins originaux, dans le but de nous faire rire.
Cet objectif est très rapidement présenté dans le Prologue de l'auteur par les termes « exciter le monde à rire ». Rabelais organise un folklore hérité des récits du moyen âge. Cela peut être par le comique de mots, Gargantua invente un « torche-cul » au chapitre 13 ; par le comique de situation, par exemple Gargantua naît par l'oreille de sa mère au chapitre 6 ; mais aussi par le comique de caractère. Également Rabelais exagère ses propos pour montrer le gigantesque, emploi le moyen du grotesque, un humour intellectualisé avec des jeux de mots étymologiques ou des calembours : par exemple, frère Jean aime le « service du vin » autant que le service divin » (chapitre 27), il emploi aussi des latinisme et mots savants en contraste avec le ton burlesque comme (« omnis clochabilis, in clocherio clochando, clochans clochativo clochare facit clochabiliter clochantes. » (chapitre 19). François Rabelais est un homme très cultivé, il use de références variées et des images, pour illustrer, celle des silènes au double visage ou celle de l'os à la « substantifique moelle » par exemple.
Dans Gargantua, Rabelais fais ressortir son côté médecin, et nous présente un autre rapport au rire.
En effet, Rabelais fut médecin au cours de sa vie : il appelle « un chat un chat » et est donc cru dans ses propos en plus d'être érudit. L'auteur nous présente un roman du corps exprimé dès le prologue « Buveurs très illustres, et vous vérolés très précieux » : il nous parle d'accouchement, de manger, du rire, de fienter, de tabasser, de sexualité, du « bas corporel »... Il emploi un comique lié à la scatologie comme lors de l'accouchement de Gargamelle (chapitre 6). Que Gargantua s'ouvre sur une citation du Banquet de Planton et se ferme sur une invitation à boire ou à manger n'est pas anodin : l'auteur défend que le rire peut détruire par la satire, mais aussi construire et tisser du lien.
Si ce roman témoigne des vastes connaissances, tant littéraires que scientifiques, de son auteur ; il exprime aussi bien la volonté de l'auteur de réformer les systèmes éducatifs de son époque.
Pour continuer, le rire permet à Rabelais de nous exposer sa volonté de réformer les méthodes d'éducation jusqu'à lors qui poussent à la régression des élèves, et souhaite mettre en avant l'éducation humaniste, qui au contraire pousse à la réflexion.
De fait, Rabelais veut dénoncer les éducations sophistes et scolastiques qui font régresser les élèves.
L'éducation occupe une place centrale dans le récit avec 11 chapitres, soit beaucoup plus que la majorité des récits de l'époque, preuve qu'elle a son importance. Rabelais organise une satire de l'esprit sérieux : Alcofribas Nasier ,sophiste, (se désignant lui même de narrateur souvent ridicule) se réfère à des œuvres écrites par d'autres (chapitre 8), aux noms plus que légers, s'appuie sur des documents à l'authenticité contestable (chapitre 2) ou s'inclut dans la narration de manière facétieuse, comme pour brouiller les pistes (chapitre 8) : mais celui qui maîtrise l'art de la rhétorique peut proférer sur un ton fort savant un tissu d'âneries. Aussi, en tension avec l'université de la Sorbonne qui censure ses écrits, Rabelais, dénonce l'éducation archaïque, lourde, lente, mécanique et fallacieuse donnée par celle-ci, tout comme la mauvaise éducation sophiste : Gargantua lit des textes écrits en lettres gothiques, a un immense écritoire, prend des années pour apprendre les bases les plus élémentaires comme l'alphabet (programme éducatif du chapitre 14), a un emploi du temps fondé sur une répétition d'actions creuses (chapitres 21-22), et les discours faux des maîtres permettent de tout justifier (comme avec des arguments d'autorités que cite Gargantua au chapitre 21). L'enseignement ne faisant pas participer l'enfant, il est rendu ennuyant, ainsi « son âme était dans la cuisine » (chapitre 21). Ce type d'éducation mène à la régression de l'enfant.
L'auteur veut aussi nous mener à nous questionner sur le meilleur moyen d'éduquer nos enfants, il nous propose l'éducation humaniste.
Celle-ci est plus proche de l'homme et plus censée : « Je voudrais que le précepteur change cela, et que dès le début, selon la capacité de l'esprit dont il a la charge, il commence à mettre celui-ci sur la piste, lui faisant apprécier, choisir et discerner les choses de lui-même. Parfois lui ouvrant le chemin, parfois le laissant ouvrir. Je ne veux pas qu'il invente et qu'il parle seul, je veux qu'il écoute son élève parler à son tour. », écrit Montaigne dans son premier essai. L'éducation humaniste rallie le corps à l'âme : « science sans conscience n'est que ruine de l'âme » (Pantagruel chapitre 8). Aussi, Gargantua est métamorphosé après être passé d'une éducation sophiste à humaniste : il est capable d'apprendre, de comprendre et de s'ouvrir au monde. Le modèle humaniste est le « sauveur » de l'enfant. C'est un modèle éducatif plus noble comme celui que propose Ponocratès. Cette éducation est fondée sur la richesse des apprentissages (emploi du temps chapitres 23-24), le plaisir, l'esprit critique, et l'écartement du formalisme religieux : la piété devient sincère et pensée. L'enseignement humaniste cultive aussi bien l'âme que le corps et fait de l'élève un être complet (« exerçant élégamment les corps comme ils avaient auparavant exercé les âmes » (chapitre 23)). Cette nouvelle éducation passe aussi par le plaisir : « Ainsi fut éduqué Gargantua, et il continuait ce système de jour en jour, profitant comme vous savez que peut le faire un jeune homme de bon sens selon son âge, dans un tel
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