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Lorenzo de Médicis est-il un héros ?

Cours : Lorenzo de Médicis est-il un héros ?. Rechercher de 54 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  26 Février 2025  •  Cours  •  2 339 Mots (10 Pages)  •  15 Vues

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COMPTE RENDU DE DEVOIR                 LORENZACCIO, UN HEROS?                                        TL

Eléments d'introduction : Selon vous, Lorenzo de Médicis est-il un héros?

Sujet qui laisse une large ouverture de compas : il ne s'agit pas de traiter uniquement le héros romantique, mais bel et bien d'envisager diverses perspectives : le caractère héroïque du personnage, son appartenance à la catégorie plus moderne des "anti-héros", sa qualité de héros romantique (ou la distance avec cette appellation), sa modernité (pourquoi est-il si souvent repris par les metteurs en scène, notamment depuis les années 50?)

Amorce : considéré souvent comme le personnage théâtral le plus représentatif du drame romantique ; personnage fascinant et trouble, difficile à définir, ne serait-ce que par les premières interprétations du rôle par une femme (Sarah Bernhardt)

Problématique : le personnage de Musset peut-il être considéré comme un héros, au sens traditionnel du terme?

Annonce du plan : Si Lorenzo de Médicis conserve certaines caractéristiques du héros traditionnel, il peut également être assimilé par certains aspects au anti-héros ; en fait, ne préfigure-t-il pas une vision plus moderne du héros dramatique?

I - Certes, Lorenzo de Médicis est pourvu de certains aspects du héros littéraire traditionnel

A - le personnage principal éponyme

- au centre de la pièce : nom donné, sous sa forme péjorative cependant (Lorenz-accio) ; personnage qui apparaît le plus souvent (18 scène sur 39, par rapport au Duc qui n'apparaît que dans 8 scènes, ou Philippe Strozzi dans 7) ; hormis la dernière scène (avènement de Côme, un cousin de Lorenzo), il ouvre et clôture l'œuvre (carnaval et enlèvement de Gabrielle ; mort peu glorieuse puisqu'il est tué et jeté dans la lagune sans autre forme de procès) ; apparition dans de nombreux lieux, intra muros et extra muros (à Venise à l'acte V, ce qui rappelle le bannissement de Roméo loin de Vérone ; évocation de son séjour romain à l'acte III), extérieurs et intérieurs (un jardin, le palais, une rue, sur les bords de l'Arno, etc., publics et privés : impression qu'il est en tous lieux, omniprésent, comme doté d'un don d'ubiquité, ce qui rehausse son importance

- au centre de l'intrigue principale : sur lui repose l'enjeu primordial de la pièce : tuer Alexandre et laisser le champ libre aux Républicains pour refonder la République florentine ; lié aux divers personnages présents de la pièce, aux émissaires du pape, aux Seigneurs républicains, aux Strozzi, au peintre Tebaldeo, de manière plus symbolique à la marquise (double inversé)

- au centre de la ville : les nombreuses appellations dont il est affublé (surnoms, manières de le définir : "diable", "libertin")  montrent qu'il est connu (et diversement apprécié) de tous ; de même, il est l'objet de nombreuses conversations : critique du Pape qui le condamne et appelle à la méfiance, nostalgie et incompréhension de Marie Soderini, sa mère et de sa tante Catherine, etc.

B - un aristocrate de haute lignée

- un personnage qui a une authenticité historique, ce qui lui donne une valeur supplémentaire ; origine nobiliaire incontestable, issu de la lignée légitime des Médicis ; de même, meurtre du Duc attesté par Varchi

- héritier légitime du "trône" (attention, le gouverneur de Florence n'est pas un roi, mais celui qui dirige la République florentine), qu'il refuse car il ne souhaite pas exercer le pouvoir ;  contrairement au "bâtard" usurpateur

- éducation qui fait de lui un fin lettré,  doté des qualités habituelles des nobles : même s'il cache ses talents, il sait manier les armes, comme le prouve l'entraînement avec Scoronconcolo ; il monte à cheval (pour se réfugier à Venise) ; il a étudié dans sa jeunesse, fervent admirateur de Plutarque (histoire) et sait manier avec habilité les mots et l'ironie (cf. la passe d'arme verbale avec Sire Maurice I, 4, mais aussi la duplicité de sa première tirade sur l'innocence avilie de Gabrielle) ; ses nombreux monologues, sa réflexion sur lui-même ou la cité montrent une intelligence et une acuité lucides sur le monde

C - Un personnage dans l'action

- dans la tradition héroïque, le personnage-clé poursuit un quête, un but que l'intrigue (ou l'action) met en place et réussit : d'un point de vue strictement dramatique, toute la pièce montre comment Lorenzo ourdit son plan, installe non sans machiavélisme les divers stratagèmes  pour parvenir à ses fins : devenir un intime du duc , en "bais[ant] sur ses lèvres épaisses  tous les reste de ses orgies", endormir le duc en écartant le moindre soupçon, quitte à se déshonorer en s'évanouissant devant une épée, jouer un double jeu (espion, "taupe" chez les Strozzi ; pourvoyeur de belles filles, etc.), dérober la cotte de mailles, organiser le faux rendez-vous galant ; de fait, tout lui réussit, et l'action entreprise est couronnée de succès, puisque l'acte IV se clôt par l'assassinat d'Alexandre.

- sans les adjuvants habituels, Lorenzo agit seul, allant même jusqu'à dissuader un Philippe Strozzi de faire quoi que ce soit (une des raisons de l'acte III, scène 3 : "Tout ce que je te demande, c'est  de ne pas t'en mêler") ; à la différence de G. Sand, il conclut seul le tyrannicide (Scoronconcolo ne doit pas intervenir : " Si je l'abats du premier coup, ne t'avise pas de le toucher.", III,1)

- un des seuls personnages dotés de l'impetus, de l'élan vital pour agir ; Stendhal parle de la "virtu" (force de caractère, tempérament ardent, énergie), du courage qui entraîne les grandes actions ; le double négatif, Pierre Strozzi, a également des qualités viriles, mais son emportement, sa colère, son désir de pouvoir l'entravent au final plus qu'ils ne le portent, d'autant qu'il reste trop subordonné au nom et à la renommée de son père ; les autres vivent et parlent sans véritablement agir ( Philippe Strozzi, la marquise, etc.)

II - Toutefois, ces qualités ne peuvent effacer les autres aspects du personnage, bien moins reluisants

A - une kyrielle de défauts relevés

- un portrait haut en couleur du Duc, qui met en avant tout ce que le personnage compte de vices ou de faiblesses, loin du héros d'antan : goût pour la boisson (ivrognerie) et les excès en tous genres :  "lendemain d'orgie ambulant", un voyou ("ruffian"), une constitution débile "mains fluettes et maladives", un manque de virilité évident "femmelette", un écrivaillon, "méchant poète", un peureux "poltron", un lâche qui va lui donner raison en s'évanouissant  la vue d'une épée ; de même, la beauté physique qu'il a pu avoir n'existe plus, et le vice, sa laideur morale se sont désormais imprimés sur son visage ; selon la tradition antique du kalos kagathos (beau et bon), la bonté s'accompagne de la beauté, indissociable : or, sa propre mère dit de lui qu' " il n'est même plus beau"  

B - un être méprisé (et méprisable?)

- "modèle titré de la débauche florentine" (I,4) : un libertin qui se complaît dans la débauche ;  comme la robe de Déjanire,  le vice est devenu partie intégrante de sa personne, un "vêtement qui lui colle à la peau" ; les multiples actions immorales, si elles servent son projet, l'ont entraîné bien loin de la vertu : déshonneur des jeunes filles dont il souille la pureté et la famille, un être qui ne respecte plus rien (mépris du pouvoir spirituel et désir premier de tuer le Pape), ni personne (il se sert de sa tante comme appât), une apparence de froideur et  d'insensibilité (peu de réactions face à la mort de sa mère, dont il est pourtant en grande partie responsable) ; Lorenzaccio est devenu un personnage vil, abject, que tous déconsidèrent ou rejettent, excepté le sage Philippe Srozzi ; on est loin des valeurs morales qu'incarne traditionnellement le héros, garant et modèle d'une vision plus élevée de l'humain ; un tel style de vie ou de pensée le placent davantage dans la catégorie des anti-héros

C - un être caméléon, difficile à saisir

- Lorenzo est un personnage qui n'est guère fixé, tant il renvoie de facettes multiples de son être : loin d'être un type ou un stéréotype, on ne peut clairement le définir : la diffraction du moi, si sensible à travers ses monologues, ses doutes et contradictions, empêchent de pouvoir lui coller une étiquette, une définition nette ou cadrée : son double jeu, le thème du masque et du déguisement dont il est si familier, les différents états de lui-même qu'il expose, sont un jeu de miroirs dans lequel le lecteur (et lui-même) se perd : qui est-il en définitive? Le jeune étudiant exalté et idéaliste? Le nihiliste réaliste? L'orgueilleux qui veut laisser son nom, comme Erostrate? Ou le héros antique qui débarrasse sa patrie d'un tyran, tel Brutus?

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