Récit de la honte
Dissertation : Récit de la honte. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Anais Brune • 19 Octobre 2021 • Dissertation • 1 278 Mots (6 Pages) • 412 Vues
LSH 1
Écriture d’invention : Sujet récit de la honte
Dévisagée, déshabillée, démembrée, dépulpée, dépossédée [1] de tout honneur, ils me volent, m’arrachent à ma condition humaine, celle qui donne aux grands de ce monde panache et éclat. Je suis reléguée au rang de bête de foire. Ce vulgaire objet de curiosité risible par la bassesse de son état si pitoyable. Oh mon Dieu… ! Je suis nue. Nue, non pas par l’innocence de l’enfance, qui est bien loin déjà, car en moi sont gravées des cicatrices d’un corps qui a tant déjà vécu les choses de la vie. Ce même corps qui dut grandir trop vite. Je n’ose dire “je”, quand « je » me risque à poser un œil sur ce « moi » « je » vois “autrui”, cet autre que « moi » différent de « moi ». Qui suis- « je » ? Personne, à la 3ᵉ du singulier... La victime ? La chose ? La bizarrerie ? La folle ? Le paria ? L’exhibitionniste ? La grosse ? La vilaine ? Le singe ? La catin ? Ou rien... ? Elle s’enfonce dans le néant, ne se reconnait en aucun de ces qualificatifs qui la collent la figent, l’empoisonnent, ce venin mortel pour lequel son âme suffoque. Son seule échappatoire… revenir à l’état originel, elle se confondra bientôt à la poussière.
Vendredi 17/09, 06 h 53…
Mon meilleur rêve est devenu mon pire cauchemar, espace de mon infini liberté, où j’ai pour habitude de m’affranchir du diktat et des normes du monde. Dans mes instants de lucidité nous ne faisons qu’un, ma conscience m’exhorte d’enlever ses vêtements, qui m’étouffe, me colle à la peau, sous le déguisement de l’habit je découvre ma vraie nature, un brin de folie, de gaieté et d’épanouissement profond. Oh mon doux rêve j’ai hâte de te revoir, fidèle ami de mes longues et interminables journées de tourmente, tu es le seul qui me comprenne et m’apaise, en toi je renais, tu me fais reine. Elle s’empare d’une boîte entière de somnifères et d’antidouleurs, puissantes drogues réservées à l’usage médicale, que son père garde précieusement. Elle monte lentement les marches des escaliers qui donnent accès à sa salle de bain, épile son corps tout entier, se rase les cheveux, elle se lave de la souillure du monde. Elle prend une longue douche ne laisse aucune place à la crasse. Son corps est immaculé. Elle se dirige dès lors vers sa dernière demeure la baignoire, et se laisse progressivement entraîner dans les eaux profondes d’une renaissance à venir…
Vendredi 17/09, 19 h 05…
Thaïs ? C’était ma douce amante, ma Snoopette, ma petite femme, nous nous étions rencontrés il y a bientôt un an de cela, elle était attachante un peu étourdie, un grand cœur, paix à son âme. La veille seulement elle m’avait appelé me disant qu’elle avait besoin du réconfort de mes grands bras pour s’étendre. Elle m’a écrit un petit message d’adieu dans lequel, elle me dit en ces termes ses maux.
« Si tu lis cette lettre, c’est que mon corps n’est plus, j’ai été, et je ne serai plus jamais. Je tiens à m’excuser par avance pour l’égoïsme dont je fais preuve, mais enfin, vivre pour les autres ce n’est pas vivre. J’adresse tout particulièrement mes mille pardons au deux hommes de ma vie mon petit Papa et Oliver. Quant à vous Mère, il y a bien longtemps que vous avez fait le deuil de celle qui fut votre si petite et adorable enfant, vous pourrez donc continuer à vous lamenter sur le souvenir de cet enfant perdu.
Car enfin je dois admettre toute l’étendue de ma faiblesse, je veux crier aucun son ne sort, je veux m’insurger les jambes m’en tremblent rien que d’y penser, je veux dire « non » les mots se dérobent sous ma bouche, je veux taper mon agresseur, c’est alors que mes points ont peur de heurter sa délicate et précieuse peau.
Cependant, je n’ai aucun désir de vengeance, car je n’ai jamais tenu à me salir les mains, la vie est une peine suffisante en soi (vieillir, être témoin de la déchéance de ses proches, pour être soi-même réduit à cet état et à la solitude). Ceux-là je les laisse seuls face à leur conscience, car je dois avouer que loin d’être moi-même innocente j’ai ma part de responsabilité en toute chose.
J’aurais dû être forte, j’aurais pu crier plus fort, si seulement… J’avais quitté cette fête avant que
tout ne dégénère. La honte m’a figé et m’a rendu impuissante. Même dans mes pires cauchemars jamais je n’aurais osé penser, imaginer que le cœur des hommes pouvait se révéler si noir ».
Je crois qu’elle s’était rendue fautive, coupable du mal qu’on lui a fait, passant du statut de victime à celui d’auto-persécuteur. La vérité est que cet événement représentait pour elle une double honte, elle-même face à sa conscience mais également elle face au reste du monde. Ce n’est que tard, trop tard que le malheureux Oliver compris la gravité et l’ampleur de son acte, qui pris racine à cause du bizutage dont elle fut victime à la soirée d’intégration universitaire. Impuissant, il n’avait pas été capable discerner le moindre signe d’appel à l’aide tant la comédienne avait su cacher sa face.
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