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LIEN PRECOCE MERE-ENFANT ET CONSTRUCTION DE LA VIE PSYCHIQUE

TD : LIEN PRECOCE MERE-ENFANT ET CONSTRUCTION DE LA VIE PSYCHIQUE. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  16 Novembre 2015  •  TD  •  3 793 Mots (16 Pages)  •  1 435 Vues

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Université Lumière Lyon 2

Contrat de Formation Personnalisé (CFP)

Deuxième année de licence s3 2013-2014

Travaux Dirigés de Psychologie Clinique

Enseignante : Mme Myriam LAYES

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LIEN PRECOCE MERE-ENFANT

ET

CONSTRUCTION DE LA VIE PSYCHIQUE

Présenté par Catherine MAZET (n°2133392)


SOMMAIRE

1.        Introduction        

2.        Autoérotisme et relation à l’objet primaire        

3.        Position schizoparanoïde et ambivalence        

4.        Miroir primaire et enveloppe psychique        

5.        Conclusion        

6.        Bibliographie        


  1. Introduction

En étudiant les mécanismes et enjeux du déni de grossesse, la défaillance du lien primaire entre la femme enceinte et sa propre mère, absente sinon physiquement du moins dans sa relation avec son bébé, apparaît souvent essentielle dans la genèse de nombreux cas cliniques. Ces femmes n’ont pas pu intérioriser, durant leur vie précoce, la « mère suffisamment bonne » au sens de Winnicott (1996), qui leur permette de se construire. Leur croissance n'a pas été accompagnée d'une présence maternante, contenante, apaisante. Ce vide insupportable pour le bébé, lui fait vivre des angoisses mortifères, d’annihilation et le conduit à anesthésier ses ressentis. « Quand un bébé est dans le déni des sensations de son propre corps, il empêche la formation de toute image sur ce qu'il ressent et il se produit un blanc là où il devrait y avoir une représentation » (S. Marinopoulos et I. Nisand, 2011). Lorsque l’enfant grandit, cette « part estropiée du moi enfantin » demeure, cachée par une part plus adaptée à la vie réelle. L’enfant, puis l’adulte sont souvent décrits comme effacés, gentils, peu expressifs, alors qu’ils fonctionnent de manière clivée, avec une personnalité qui évoque le « faux-self » décrit par Winnicott (1996).

Désireuse de percer ce mystère des origines, j’ai choisi d’approfondir dans ce dossier la question du lien précoce et de la construction de la vie psychique, en m’efforçant de confronter et d’articuler les principales théories, de Freud à Racamier, qui ont successivement éclairé les processus afférents.

  1. Autoérotisme et relation à l’objet primaire

Le premier pas de la théorie pulsionnelle de Freud décrit la mise en place de deux types de pulsions : la pulsion d’autoconservation et la pulsion sexuelle.

Quand le bébé tète, il va satisfaire ses pulsions d’auto-conservation. Il a besoin de se nourrir pour rester en vie, mais en même tant qu’il satisfait sa faim, il éprouve une excitation au niveau de la zone orale. Quand il est rassasié, il va continuer de téter le sein, reproduisant l’activité de succion mû par une pulsion sexuelle dont l’origine demeure l’excitation de la zone orale, mais dont l’objet varie : une tétine, ses doigts,… Il se procure ainsi un plaisir dégagé de la nécessité de se sustenter. Freud en déduit que les pulsions sexuelles s’étayent sur les pulsions d’auto-conservation, car elles naissent avec elles, s’appuient sur elles, mais vont devenir progressivement indépendantes dans un deuxième temps, prenant leur source dans l’érogénéité du corps. Il parle de pulsion autoérotique naissant tout d’abord lors de la phase orale dans la sexualité infantile, et s’enracinant dans les zones érogènes, car il postule que le bébé est capable de se satisfaire, de se donner du plaisir seul, en dehors de l’objet primaire, du lien à sa mère.

Freud évoque cependant de manière paradoxale, tantôt le plaisir auto-érotique dans lequel « l’objet s’efface au profit de l’organe » (A. Brun et B. Chouvier, 2013), tantôt le plaisir lié à l’objet primaire. Ce paradoxe a fait naître différents courants en psychanalyse, même si la théorie du lien à l’objet primordial l’emporte à l’époque contemporaine. Ce sont surtout les successeurs de Freud qui ont développé cette dernière : L’étayage ne serait pas seulement un étayage sur les zones érogènes mais aussi sur l’objet primaire et le plaisir ne serait pas seulement auto-érotique.

Les théories de J. Bowlby (cité par A. Brun et B. Chouvier, 2013) marquent ainsi un tournant important dans l’étude de la psychologie de l’enfant. Elles sont inspirées de recherches en éthologie en plein essor dans les années 60, démontrant par exemple que les jeunes oiseaux créent dès leur naissance un lien très fort avec leur mère. Les travaux de Harlow (cité par A. Brun et B. Chouvier, 2013)  ont joué un rôle important dans l’élaboration de la théorie de l’attachement ; En particulier ceux menés sur les petits singes rhésus qui ne sont pas seulement mus par le besoin de nourriture mais recherchent le contact de la fourrure, même s’il ne s’agit que d’un substitut de mère, et qui développent un sentiment de sécurité, sont plus actifs et autonomes quand ils sont élevés par leur vraie mère. S’appuyant sur ces expériences, la théorie de l’attachement de Bowlby, postule que le développement émotionnel et affectif de l’enfant serait déterminé par la qualité des interactions premières avec l’objet primaire, qui marqueront les types d’attachement futurs de l’enfant avec les objets (Stern, Ainsworth, cités par A. Brun et B. Chouvier, 2013).

La théorie de l’attachement peut paraître incompatible avec la théorie pulsionnelle Freudienne. D. Anzieu (cité par A. Brun et B. Chouvier, 2013)  les articule cependant en proposant le concept de « pulsion d’attachement » en tant que pulsion d’autoconservation sur laquelle s’étaieraient les pulsions sexuelles et le plaisir de la rencontre avec l’objet primaire.

Les psychanalystes partagent actuellement de plus en plus cette idée que le sexuel est très lié à la manière dont la mère, au sens d’environnement primaire, donne les soins au bébé. Pour être capable de se donner des satisfactions auto-érotiques, il semble donc qu’il faille, pour le nourrisson, avoir un lien à l’objet primordial suffisamment satisfaisant. Le nourrisson va devenir autonome au niveau du plaisir, sans avoir besoin de la proximité de son objet primaire, lorsqu’il est capable en quelque sorte de l’« halluciner » en son absence, de l’intérioriser en tant que mère soignante, apaisante. Dans le cas inverse interviennent des défaillances de l’auto-érotisme : l’enfant va avoir besoin de la présence physique de sa mère car il n’en a pas une représentation sécurisante.

Les soins au bébé, le portage, sont de fait très importants car ils sont à l’origine de la mise en place ou pas de ce sentiment de sécurité. Il apparaît primordial que le plaisir soit partagé. Une mère qui va s’occuper mécaniquement, froidement de son enfant, lui renvoie une image de lui sale, déplaisante. Alors qu’un bébé caressé, aimé, investi, érotisé par une mère qui lui renvoie le plaisir qu’elle a de s’en occuper, est valorisé, se sent important. Freud a évoqué la première séduction de l’enfant pas la mère.

Une mère suffisamment bonne, au sens de Winnicott (1996) apportant un maternage de qualité sans excès et dont les carences partielles, si il peut les contenir, deviennent vecteur d’autonomisation, aide ainsi l’enfant à grandir, offre un espace transitionnel où il peut exploiter sa créativité avec de bonnes bases narcissiques. La satisfaction des besoins fondamentaux, la confiance en l’environnement, sont les bases du narcissisme primaire. Si l’enfant n’intériorise pas de bons objets, il ne pourra pas les réutiliser en leur absence. Seul, il doit être étayé par la présente inconsciente de sa mère cachée à ses yeux, pour résister aux angoisses primitives disséquantes, aux menaces d’annihilation (Winncott, 1996).  « Cette expérience permet au bébé d’être, ce qui lui donnera par la suite la possibilité d’agir, de faire et de subir » (Winnicott, 1996). Si les carences de la mère sont prépondérantes à ce stade là, les pulsions de mort, la colère, la frustration, vont l’emporter sur les pulsions de vie. L’enfant abandonné à des « agonies primitives », sera poussé à cliver son soi en vrai et faux self (Winnicott, 1996).

En écho à la célèbre affirmation de Winnicott (1996) : « un bébé seul ça n’existe pas », René Roussillon (cité par A. Brun et B. Chouvier), souligne également le rôle essentiel de l’objet, de l’environnement soutenant, et du partage de plaisir nécessaire à la pulsion pour se composer. « C’est en effet parce que la mère a plaisir à s’occuper du bébé que le sexuel infantile se développe » (A. Brun et B. Chouvier, 2013). Quand la pulsion ne rencontre pas l’objet, elle se désorganise. René Roussilon (cité par A. Brun et B. Chouvier, 2013) situe ainsi la pulsion dans le registre de l’intersubjectivité, et lui confère « une valeur messagère », au-delà de la seule décharge pulsionnelle. La mère serait donc involontairement séductrice par tous les soins corporels qu’elle dispense autour des zones érogènes qui seront  plus tard impliquées dans la sexualité adulte, et le plaisir qu’elle va ainsi donner à son bébé aurait également une composante sexuelle. Cette composante érotique, étrangère au sexuel infantile, est porteuse d’un « message énigmatique » pour l’enfant (Laplanche, cité par A. Brun et B. Chouvier, 2013). Un excès d’excitations énigmatiques peut dépasser les capacités de liaison de l’enfant, ce qui serait anxiogène. A l’inverse, trop de distance, de froideur, serait au moins aussi anxiogène car dénué de plaisir, risquant d’entraîner l’enfant dans un processus de désexualisation.

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