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Causes et conséquences de la tertiarisation des économies avancées

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Par   •  5 Février 2019  •  Dissertation  •  1 961 Mots (8 Pages)  •  1 631 Vues

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« Pourquoi nos temps modernes sont –ils si décevants ? » C’est l’interrogation qui guidait la réflexion de Daniel Cohen – Nos temps modernes, 1999 – lorsqu’il constatait : d’une part, la condition de l’homme d’aujourd’hui, confronté au mythe de la « fin du travail » ; et d’autre part sa déception à l’égard de l’évolution de la société post industrielle. Le secteur tertiaire, qui occupe désormais trois actifs sur quatre, est par nature très hétérogène, – services aux particuliers ou aux entreprises ; marchands ou non marchands ; très qualifiés ou peu qualifiés –, il est donc compatible avec des conditions de travail tout à fait pénibles qui contrastent avec le mythe d’une société post – industrielle en tant que société de loisirs.

I la tertiairisation : une tendance lourde du capitalisme

A Une conséquence des gains de productivité

Au XIXème siècle, on assiste en France à un doublement de la part des emplois tertiaire dans la population active. Elle s’élève en effet de 14% en 1800 à 29% en 1906. Au XXème siècle, elle représente un tiers des emplois au milieu des années trente, la moitié en 1975 et près des trois quarts aujourd’hui. Alfred Sauvy – La machine et le chômage, 1980 – a expliqué que cette évolution est en réalité un processus de déversement des emplois des secteurs primaires et secondaires, déversement consécutif à la croissance à long terme de la productivité du travail. En effet, selon la relation établie par Jean Fourastié – le grand espoir du XXème siècle, 1949 –l’évolution de l’emploi dans un secteur est égale à l’évolution de la production moins l'évolution de la productivité du travail dans ce secteur. Autrement dit, la relative saturation de certains besoins entraîne une destruction d’emplois dans le secteur concerné. Par exemple, le déclin constant de l’emploi agricole est à mettre en relation avec celui des dépenses alimentaires dans le budget des ménages. En revanche, pour qu’il y ait création d’emplois dans le secteur tertiaire, les ménages doivent pouvoir réorienter une partie de leurs dépenses de consommation vers les services . Il faut donc que les prix baissent ou que les revenus augmentent.

B L’aboutissement du processus de développement

Selon l’INSEE, les ménages français consacraient en 2005, 59.3% de leurs dépenses de consommation à l’achat de services. Les changements dans la nature des besoins à satisfaire, au fur et à mesure que le revenu augmente, ont toujours confirmé les observations d’Ernst Engel en 1857, à propos du lien entre dépenses d’alimentation et niveau de vie. A l’instar des motivations humaines dans le monde du travail étudiées par Abraham Maslow – A Theory of Human Motivation, 1943 – la satisfaction des besoins physiologiques est la condition requise pour que d’autres formes de besoins se développent. Ainsi, la croissance entraîne une augmentation des dépenses de santé ou d’éducation. Elle entraîne aussi une société plus urbanisée où les besoins en services collectifs sont croissants, ce qui d’ailleurs explique le constat d’Adolphe Wagner dés 1876 : « « des comparaisons dans l’histoire et dans l’espace montrent chez les peuples civilisés en voie de progrès un développement régulier de l’activité de l’état et de l’activité publique ». Selon Daniel Cohen – Nos temps modernes, 2000 – on remarque ainsi que 60 % des emplois continuent d’être consacrés à la production d’objets et à l’intermédiation nécessaire à leur commercialisation. La tertiairisation des emplois n’est donc que la substitution entre les emplois agricoles, c'est-à-dire de « production des hommes par la terre », et les emplois tertiaire c’est à dire de « la production des hommes par l’homme ». La tertiairisation est le pendant de la marche «vers la société post industrielle» dans laquelle les éléments immatériels dominent l’organisation de la société telle que la décrivait le sociologue américain Daniel Bell dans son ouvrage éponyme en 1973. Elle est enfin la conséquence d’une illusion d’optique liée à l’externalisation des emplois pratiquée par les entreprises industrielles toujours à la recherche d’une baisse de leurs coûts de production.

II Quelles conséquences sur la croissance ?

A Le risque de sous productivité

En 1987, le prix Nobel américain Robert Solow, déclarait que : « les ordinateurs sont partout, sauf dans les statistiques de productivité ».En stigmatisant ainsi les nouvelles technologies, il réactivait en réalité une crainte très ancienne, présente dés les débuts de la science économique, en particulier chez la plupart des économistes classiques. Pour Adam Smith en effet, les services sont improductifs parce qu’ils correspondent à une dépense et non à une avance. Il écrivait par exemple : « Il y a une sorte de travail qui ajoute à la valeur de l'objet sur lequel il s'exerce ; il y en a un autre qui n'a pas le même effet. Le premier, produisant une valeur, peut être appelé travail productif ; le dernier, travail non productif », ou encore, « un particulier s’enrichit à employer une multitude d’ouvriers et s’appauvrit à employer une multitude de domestiques ». Adam Smith considère également que la richesse suppose une accumulation de biens, par nature impossible selon lui dans l’activité tertiaire. On retrouve aujourd’hui cette inquiétude quand il s’agit de créer des emplois pour lesquels la recherche de productivité n’a pas le même sens que pour les activités industrielles. Il y a par exemple contradiction entre nombre de patients et efficacité médicale, ou entre nombre d’étudiants et efficacité pédagogique. William Baumol a d’ailleurs montré – Macroeconomics of unbalanced growth, the anatomic of urban crisis, american economic review, 1967 – que ces emplois ont pour particularité de connaître une croissance des salaires supérieures à celle de leur productivité, ce qui d’ailleurs explique la croissance des dépenses publiques. Plus récemment, les auteurs de l’école de la régulation ont considéré la tertiairisation comme une limite de la croissance fordiste. Celle -ci reposait sur un partage des gains de productivité permettant l’articulation production de masse – consommation de masse que le tertiaire quant à lui ne permet pas, principalement parce que la demande croissante n’entraîne pas automatiquement un surcroît d’efficacité.

B En réalité, la tertiairisation est une nouvelle articulation entre les secteurs d’activité

En premier lieu, la sous – productivité du tertiaire est liée à des problèmes de mesure, en particulier l’évaluation du produit, telle qu’elle fût soulignée aux Etats –unis, en 1996, par le rapport Boskin. Il estimait que la croissance américaine avait été sous évaluée de 1 à 1.5% par an, en raison de la sur estimation de la hausse des prix, ou encore de la sous estimation de la qualité des produits intégrant des nouvelles technologies. On peut ajouter avec Jean Gadrey – l’économie des services, 1992 – qu’une autre particularité du secteur tient au fait que les effets sur la productivité ont lieu à long terme ( santé, éducation , recherche) rendant la mesure à court terme totalement factice. La productivité du tertiaire est donc essentiellement indirecte, ce qui signifie que les activités tertiaires valent, pour bon nombre d’entre elles, de par leurs relations avec les activités industrielles, confirmant ainsi l’intuition initiale de JK Galbraith – le nouvel état industriel, 1968 – qui insistait alors sur les exigences nouvelles de la production de biens dans la cadre de la filière inversée (conception,

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