Le roi ancré dans la féodalité : un exemple d’hommage lige au roi. Hommage lige d’Arthur, duc de Bretagne, à Philippe Auguste (juillet 1202). Layettes du Trésor des chartes, Seigneurie et féodalité

À travers l'hommage lige d'Arthur, duc de Bretagne, au roi Philippe Auguste en 1202, se révèle la complexité des relations féodales et les enjeux de pouvoir qui ont marqué l'histoire médiévale de France

Le texte étudié est un extrait d’un acte d’hommage lige rendu par Arthur, duc de Bretagne et d’Aquitaine, comte d’Anjou et du Maine, à Philippe Auguste, roi de France. Ce document historique date de juillet 1202 et a été publié dans les Layettes du Trésor des Chartes. Le Trésor des Chartes est le fonds le plus ancien conservé par les Archives nationales françaises. Le texte est écrit en français médiéval et est présenté sous la forme d'une lettre. L'hommage lige, également appelé hommage féodal, était un rituel de la féodalité médiévale dans lequel un vassal prêtait serment de fidélité et de service à son seigneur en échange d'un fief. L'hommage lige était considéré comme le serment le plus solennel que pouvait prêter un vassal à son seigneur.

L’auteur de la lettre, Arthur duc de Bretagne, était un noble breton qui a vécu au XIIe siècle. Après la mort de son père en 1186, Arthur devint duc de Bretagne à l'âge de 12 ans. Son oncle Richard Cœur de Lion, qui était alors roi d'Angleterre, devint son tuteur et assura la régence de la Bretagne en son nom. Cependant, leur relation se détériora rapidement, car Richard souhaitait contrôler la Bretagne de manière plus directe et n'était pas satisfait de la fidélité d'Arthur envers lui. En 1199, Richard Cœur de Lion mourut et fut remplacé par son frère, Jean sans Terre, qui devint roi d'Angleterre. La relation entre Arthur et Jean se dégrada rapidement, et en 1202, Arthur se révolta contre son oncle, allié à des barons normands mécontents. La révolte d'Arthur fut soutenue par le roi de France Philippe II, qui voyait une occasion de renforcer son influence en Bretagne. C’est pourquoi il lui rend hommage. Philippe Auguste est considéré comme l'un des plus grands rois de France médiévale, ayant étendu les frontières de son royaume, consolidé le pouvoir royal et contribué à jeter les bases de l'État moderne français.

En effet, au début du XVIIe siècle, il y a une rupture dans l’histoire de l’Europe Occidentale. On observe une renaissance et une revitalisation sur le plan démographique, social, politique et juridique (apparition d’une culture profane). En France, c’est la restauration de l’État, il y a un essor de la souveraineté du roi et l’apparition de normes de natures constitutionnelles soit les lois fondamentales du royaume. À compter des règnes de Louis VI (1108-1137) et Louis VII (1137-1180), la royauté entame sa renaissance en s’affranchissant de la tutelle féodale. Et avec le règne de Philippe II Auguste (1180-1223), ce mouvement d’émancipation s’accélère et prend de l’ampleur, on assiste à la fois à un important renforcement territorial et à l’affirmation définitive de la prééminence du roi au détriment des puissances féodales.

En quoi cet hommage lige est-il le reflet de l’affirmation du pouvoir royal ?

I- L’affirmation de la souveraineté dans le royaume

A) L’hommage lige et l’instauration d’une hiérarchie

Arthur, duc de Bretagne, écrit dans sa lettre : « Sachez que j’ai prêté hommage lige contre tous ceux qui peuvent vivre ou mourir, à mon très cher seigneur Philippe, illustre roi de France ». Il s’agit là d’un hommage lige, un serment très solennel dans lequel le vassal prête serment de fidélité à un seigneur, ici, Philippe Auguste. C’est un moyen efficace pour les seigneurs d'établir des relations de loyauté et de protection avec leurs vassaux, en échange de l'octroi de fiefs et de la promesse de service militaire. Les vassaux étaient tenus de fournir des services tels que la construction de routes et de ponts, l'entretien de bâtiments et l'administration de la justice locale. De cette manière, les seigneurs pouvaient maintenir l'ordre et la stabilité dans leur territoire, tout en consolidant leur pouvoir. En effet, les premiers roi capétiens n'exerçant pas une autorité effective sur l’ensemble du royaume mais seulement possédaient un pouvoir sur le domaine royal, les fiefs étaient dirigés par les vassaux de manières très indépendante. Le système féodo-vassalique selon la conception de Suger, conseiller de Louis VI et Louis VII, permet alors au roi de réaffirmer son pouvoir. Il repose justement sur l’hommage et le serment de fidélité : si le roi est le seigneur des seigneurs, il ne doit l’hommage à personne, ce qui signifie que la fidélité tourne alors à son profit. Donc les grands féodaux doivent au roi l’hommage et les services nobles qui en découlent.

Lorsque le duc de Bretagne écrit « quand je recevrai les hommages de l’Anjou, du Maine et de la Touraine », cela laisse entendre qu’il existe déjà un système de pyramide féodale dont le roi est au sommet. Les petits seigneurs prêtent serment aux grands seigneurs qui prêtent serment au roi. La suzeraineté se transforme en souveraineté et une hiérarchie se met en place au profit du roi. La seigneurie du vassal est dans la mouvance de la seigneurie de celui à qui il doit l’hommage. Il y a une subordination personnelle du seigneur vassal à son propre seigneur. Arthur tient un duché, il fait partie des grands seigneurs titrés.

Quel que soit le type de lien existant avec le roi, personne dans le royaume ne peut s’associer à une action susceptible de menacer le roi dans sa personne ou dans sa dignité.

Ainsi, deux moyens peuvent être utilisés par les rois capétiens pour faire reconnaître leur souveraineté : l’affirmation directe de leur pouvoir grâce à l’hommage lige et à l’instauration d’une hiérarchie féodale, et l’extension de leur domaine

B) L'acquisition de nouveaux territoires

Pendant son règne, Philippe Auguste mena également plusieurs guerres contre les rois d'Angleterre, notamment Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre.

Arthur 1er évoque justement la volonté de conquérir des terres, et les guerres passées : « lorsque Dieu le voulant, le roi ou moi même auront acquis ces biens », « pendant la toute dernière guerre ».

En 1199 Richard cœur de Lion décède lors d’une guerre contre Philippe Auguste et Jean devient roi d’Angleterre et hérite de l’empire Plantagenêt. Mais il va pâtir de sa détestable réputation et les nobles d’Anjou, du Poitou, de Touraine, du Maine et de Bretagne refusent de se trouver sous son joug. Ils désignent alors Arthur, héritier du duché de Bretagne, comme suzerain. C’est comme cela que le royaume capétien s’agrandit et prend de l’influence.

Le cas de Poitou est justement évoqué dans l’hommage lige, les barons de Poitou sont hiérarchiquement inférieur au duché de Bretagne, semblent se ranger du côté, du seigneur roi. Ils feront également hommage lige à Auguste Philippe une fois que les territoires feront partie intégrante du royaume.

Afin d’étendre les frontières de la France et intégrer des territoires qui étaient auparavant sous la domination de souverains étrangers, il mena une longue campagne militaire contre le roi d'Angleterre Jean sans Terre afin de consolider l'autorité de Philippe Auguste sur une grande partie du nord de la France. C’est cette rivalité se traduit dans les écrits du duc de Bretagne lorsqu’il écrit : « à l’exception de tous ces tènements qui étaient entre les mains du seigneur roi et de ses hommes le jour où il a défié Jean, roi d’Angleterre ».

Les guerres menées ont renforcé le pouvoir