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Comment savoir si c’est de l’Art ou pas ?

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ire le tri pour y voir plus clair, en étudiant la situation actuelle, pour ensuite tenter de chercher – s’ils existent – une éventuelle définition de l’Art et des critères d’appréciation artistique. Vaste programme donc, résumé dans le plan ci-dessous.

Penseur de Rodin

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Plan Général

I - La dissolution du sens artistique dans la prolifération des œuvres dites culturelles de l'ère post-moderne

A) La prolifération des œuvres revendiquées comme culturelles B) Le paradoxe de la Postmodernité : la masse culturelle post-moderne C) Culture et culture de l'âme

II – Enjeux philosophiques condensés de la réflexion sur l’Art

A) Définir l'Art ? L’apport décisif de Nietzsche B) La perception du beau dans l'appréciation artistique : l’esthétique kantienne C) Le parallèle avec la vie et le temps : la philosophie de Bergson

III – Perspectives de réflexion dans le cadre de problématiques contemporaines

A) La beauté du Laid B) La beauté de la mort C) Art contemporain et Art Figuratif D) Le théâtre de l'absurde

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I - La dissolution du sens artistique dans la prolifération des œuvres dites culturelles de l'ère post-moderne

A) La prolifération des œuvres revendiquées comme culturelles La Révolution Industrielle a ouvert la voie à un changement de civilisation : elle voit s’effectuer le passage d’une civilisation agro-rurale à une société urbano-industrielle sur laquelle s’est construite la société de consommation voire d’hyperconsommation que nous connaissons. Cette forme de société a amené à une ère de consommation de masse, dans laquelle l’accent est mis sur la dernière phase de la production économique : la distribution et surtout l’abondance de biens. Il semblerait que cette évolution ait trouvé son écho dans le domaine artistique. Le début des années 1990 et toute la décennie qui a suivi a été marqué par l’hyperpuissance géopolitique des Etats-Unis, qui a eu des répercussions décisives dans le domaine culturel, notamment celui du cinéma, nouvel art emblématique de la société de consommation. Le monde a été submergé de produits culturels américains. On a alors atteint un paroxysme en matière de production et de distribution de produits culturels. Ce mouvement de production et de distribution d’œuvres a dès lors été continu dans nos sociétés. Le constat de notre époque est donc le suivant : on produit à la chaine des œuvres revendiquées comme culturelles et artistiques mais dont la seule finalité est d’être consommée. C’est cette « consommation artistique » qui nous caractérise. Cette évolution semble ainsi s’opposer frontalement à la conception traditionnelle de l’objet artistique, qui est pensé pour être à l’origine d’une contemplation active : celle-là même devant mener à la réflexion. Cette évolution est en fait surtout à mettre en lien avec la caractéristique première de la société de consommation : le fait que cette dernière est une société d’images. Le changement de civilisation évoqué plus haut s’est accompagné d’un changement du médium dominant. L’heure de la « graphosphère » a pris fin pour être remplacée par l’époque de la « vidéosphère ». L’image est devenue le medium dominant et non plus l’écrit. L’image est partout, et à travers elle, nous sommes transportés sans aucune considération spatiale ni temporelle aux lieux qu’elle nous montre. L’image, c’est la vue or la vue est considérée comme étant l’évidence -ou bien les fausses évidences- elle est ce dont l’esprit a l’intuition immédiate. Or précisément, la caractéristique première de l’image est d’être « consommée », en ce sens qu’aucune réflexion sur elle n’est possible au moment même où nous la voyons, contrairement à l’écrit, qui nécessite une réflexion en amont, et donc une prise de recul, avant d’être intelligible. Notre rapport à l’art est aujourd’hui assez similaire à notre rapport à l’image : nous le consommons sans prendre de recul dessus, d’où une dissolution de la réflexion artistique. Et cette consommation sans cesse plus avide implique en amont une production toujours plus grande. Aussi assistons-nous à une prolifération des productions dites culturelles et artistiques.

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Cette production à la chaine des produits artistiques prend sans doute également ses racines dans le mouvement du Pop Art. Les artistes emblématiques de ce mouvement artistique, avec à sa tête la branche américaine représentée par Andy Warhol, Roy Lichtenstein, Robert Rauschenberg ou encore Jasper Johns, ont cherché à être en rupture avec l’art institutionnalisé par les traditions antiques et modernes qu’ils considèrent comme un obstacle à leur liberté créative. Le Pop Art est en fait surtout une réaction contre l’art abstrait. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, c’est en effet l’abstraction qui domine dans la sphère artistique, en évacuant des œuvres la représentation de l’objet. Certains y voient alors une menace de dessèchement de l’art et veulent réhabiliter l’objet dans ce qu’il a de plus banal. Voulant rapprocher l’art de la vie et soucieux de rétablir un contact entre l’art et la culture de masse populaire, les artistes du Pop Art s’emparent d’objets courants, notamment sous la forme d’images, celles que diffusent publicité et médias. Ces artistes choisissent de représenter l’art à l’instar d’un produit à consommer ordinaire: éphémère et jetable, brisant ainsi les codes de la représentation artistique. Le Pop Art a fondé son succès sur l’utilisation de symboles populaires dans un but précis : désacraliser l’œuvre d’art, auparavant considérée comme réservée à une élite car nécessitant des clés de compréhension qui n’étaient pas accessibles au plus grand nombre, et devant absolument couvrir des sujets considérés comme importants. La culture publicitaire ou l’exaltation des idoles sont des sources d’inspiration. On peut citer l’exemple d’Erwin Würm qui souligne l’absurdité du quotidien dans ses œuvres, pour interroger et interpeller le public sur des questions de société. Il s’appuie sur plusieurs formes artistiques : des sculptures, des photographies, des mises en scènes surprenantes.

Fat Car 2001 © Osterreichischer Skulpturenpark

House Attack, 2006, Museum Moderner Kunst

Par son radicalisme et sa démarche provocatrice, le Pop Art a provoqué un choc en soulignant le fossé qui s’est creusé entre les artistes et le public, symbole du divorce entre la

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culture des élites et une culture de masse modelée par les médias. Le Pop Art a ainsi souligné l’urgence de réconcilier les deux univers. En posant une vraie question de fond grâce à cette démarche, le Pop Art a contribué à l’avènement de la Postmodernité et pu ouvrir la voie à une prolifération de productions artistiques se fondant sur le quotidien. Cette prolifération peut s’entendre de manière neutre comme l’accroissement du nombre d’œuvres artistiques, mais elle peut aussi revêtir un sens médical, et s’entendre comme la multiplication incontrôlée de particules pouvant nuire. Cette opposition de sens a le mérite de poser les jalons d’un débat qui atteint aujourd’hui son paroxysme et qui est le cœur de notre sujet. Si la multiplication artistique montre qu’il n’y a plus aucune censure et que les artistes ne sont pas uniquement reconnus par les académies, mais qu’ils peuvent l’être par tous, on peut cependant reprocher à cette prolifération d’être à l’origine d’une dissolution du sens artistique, qui se noie dans la masse : la tendance est en effet à tout reconnaître comme artistique au risque précisément de disperser et d’éparpiller le sens artistique.

B) Le paradoxe de la postmodernité : la masse culturelle post-moderne

C’est effectivement le constat qu’on est amené à faire : l’avènement du « toutculturel » et du « tout-artistique ». Certains sociologues parlent aujourd’hui d’une « culture du culturel et de l’artistique ». En effet, il semble que tout puisse être reconnu comme symbole d’une culture ou d’un courant artistique. Cependant, l’emploi actuel des notions de culture et d’art et de leurs nombreux dérivés relève d’un certain vide sémantique. Dans le « tout-culturel et le tout-artistique », les facteurs de culture et d’art en viendraient presque à engendrer un certain communautarisme : on parle de la culture techno, de la culture cuisine, de la culture surf, et on associe à ces univers qui secrètent leurs valeurs propres des codes artistiques particuliers. Conséquence en est qu’on assiste de plus en plus à une fragmentation de l’art et de la culture en « communautés culturelles » à l’origine de leurs propres codes et valeurs. Ce constat s’oppose à la conception plus traditionnelle d’une culture et d’un sens artistique universels et unifiés, qui rassemblent au lieu de diviser. La valorisation des différences est ainsi de plus en plus forte. La question est cependant de savoir si l’on peut dissoudre ainsi art et culture.

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