La pédagogie

La pédagogie

Force est de reconnaître que lorsqu’on questionne la formation d’adulte à partir des publications actuelles, la pédagogie, si elle n’est pas absente est pour le moins « contenue » dans son utilisation. D'ailleurs, D. HAMELINE ne disait-il pas : « il n'y a pas de pédagogie des adultes » ? Et l’on parle le plus souvent d’éducation des adultes ou de encore de formation des adultes

C'est à partir de ce constat trivial que nous allons mettre le concept de « pédagogie » en discussion pour en montrer sa validité pour l’adulte.

L'étymologie

Naturellement, si l'on se réfère à la racine grecque du mot, l'adulte en est bien loin.

En effet, il est composé de païdos, enfant et de agogeïn, conduire.

Dans l'Antiquité, de pédagogue était ordinairement un esclave qui conduisait l'enfant à l'école, le « temple du savoir » où le didactikos, l’enseignant exercait. Tout en soulageant l’enfant de l'effort du port de ses affaires, le pédagogue lui faisait répéter ses leçons et faire ses devoirs à l’aller comme au retour.

Ce repérage étymologique permet de reconnaître le mouvement d'un enfant qui va à l'école pour apprendre conduit, accompagné, guidé par quelqu'un d'autre. L'enfant ne s'y rend pas seul.

Le pédagogue et la pédagogie sont donc impliqués dans l’apprentissage et la formation.

Avec le temps, la pédagogie est devenue l’ensemble des principes et des méthodes qui permet d’apprendre. La didactique se concentrant sur les spécificités scientifiques relatives aux contenus à faire apprendre.

Par ailleurs, si longtemps, on a pu croire que la finalité de la pédagogie était la formation des jeunes générations, P. BOURDIEU nous rassure quand il répond à A.-M. METAILLE que dans le cours d’une vie « on est toujours le vieux ou le jeune de quelqu'un » (1), si bien que l’on peut comprendre que « la jeunesse n’est qu’un mot ». À 41 ans, nous le comprenons bien.

(1) Pierre BOURDIEU, La jeunesse n’est qu’un mot, Entretien avec A.-M. METAILLE: les jeunes et le premier emploi, Paris, Association des âges.

Dès lors, peut-on étendre, sans difficulté, l’usage de la pédagogie  au champ de la formation des adultes ?

Regardons de loin

Nous évoquions plus haut la situation ordinaire, dans l’antiquité grecque, d'un enfant qui va à l'école, temple du savoir conduit, accompagné, guidé par quelqu'un d'autre, le pédagogue.

Si nous prenons une distance avec cette situation pour n’en retenir qu’une image, nous distinguons deux personnes marchant ensemble dans un environnement fréquenté en vue de réaliser un ou des apprentissages.  Et cette image, nous rapproche des symboles…

Osons, pour cela, une incursion maladroite dans le champ de la sémiologie qui nous conduira à préciser à travers trois de ses notions clés la force de la pédagogie au sein des âges de la vie. Les notions auxquelles nous pensons sont celles de référent, de signifiant et de signifié.

D’abord, le référent permet de dégager la situation réelle, la réalité physique observable. Dans le cas présent, deux personnes marchant ensemble, cartable à la main pour l’un à destination d’une école.

Puis, le signifiant constitue la représentation schématique de la situation observée. Deux personnes différentes et ensemble près d’une école.

Enfin, le signifié correspond au concept représenté.  En l’occurrence : un accompagnement vers le savoir.

Les éléments saillants, déterminants, essentiels de la pédagogie n’émergent-il pas ainsi ? À savoir, deux personnes différentes et ensemble près d’un but ?

Cette prise de distance avec le terme et surtout le retour que nous faisons vers lui, montre que la pédagogie est, avant tout, une relation interpersonnelle, un temps partagé dans un environnement en vue d’apprendre.

Aussi, la pédagogie ne semble-t-elle pas « indépendante » de toutes considérations de sexe, d’âge, d’endroit précis, de niveau de départ…? La pédagogie est ce qu’elle est, sans ces caractéristiques ; somme toute, elle s’inscrit dans une nécessité (la formation) qui consiste à prendre en compte, à comprendre les spécificités de la personne qui vient avec le projet d'apprendre, dans le respect d'un programme, d'objectifs, d'un séquençage, de moyen et d'une durée.

Ordinairement, une intervention pédagogique favorisera la rencontre de plusieurs individus dans un groupe. Cette organisation nécessitera de la part du pédagogue qu’il s'assure d'un certain nombre de critères apte à satisfaire le projet d'apprentissage de chacun.

Alors, la pédagogie pour adultes aura de sensiblement différent avec la pédagogie pour enfants, ce que la pédagogie pour enfants « dys.» à de sensiblement différent avec la pédagogie pour enfants précoces, ce que la pédagogie pour enfants hospitalisés à de sensiblement différent avec la pédagogie pour enfants en sport-études, ce que la pédagogie pour sourds-muets a de sensiblement différent avec la pédagogie pour malvoyants, ce que…, etc.

À savoir, la mesure du pédagogue à tenir compte des capacités des apprenants « identifiés ». Concernant des adultes en situation d’apprentissage ou de perfectionnement, les capacités en question mobiliseront davantage leurs expériences.

L’intention motrice de l’action du pédagogue sera de conduire ou plutôt de « guider », les apprenants, à partir de ce qu’ils sont en vue de leur(s) propre(s) réalisation(s) future(s) en tant qu'être désireux de connaître plus que ce qu'ils savent déjà. Les apprentissages ainsi réalisés, nourrissent-ils un sentiment d’efficacité personnel, non pas, pour faire face mais plutôt pour tenter de faire autrement avec la constellation des problèmes rencontrés ou susceptibles d'être rencontré dans le cours de la progression sur le chemin de l’apprentissage en vue d’une amélioration visée ?

La pédagogie est une ouverture à l'autre, une disposition inventive à créer une approche formative utile à l'autre en vue de l’atteinte des objectifs qu’il s’est lui-même fixé. Par là, nous rejoignons l’accompagnement qui se présente tel un facteur d’émancipation et de responsabilisation.

Vers l’adulte

Pour autant, les adultes peuvent être effectivement gênés par cette image que nous venons de rappeler, puisque le bénéficiaire de cet « ensemble de principes et de méthodes », fortement marqué par son étymologie est, a priori, un enfant.