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Le tunnel, Sabato

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a) Juan Pablo :

Juan Pablo est un personnage pessimiste qui ne croit pas en la nature humaine. Pour lui, les hommes ne sont que vanité et orgueil. D'ailleurs, Maria soulignera son côté négatif au chapitre 18

p.75,76, en parlant de Richard « il avait une intelligence marquée par la mort, c'était un nihiliste. Quelque chose comme ton côté négatif. ». Juan Pablo se sent incompris et seul jusqu'au jour où il rencontre Maria : elle représente pour lui l'espoir de sortir du tunnel dans lequel il s'enferme depuis toujours. Lorsqu'il la voit regarder le détail du tableau, il se sent enfin compris. Il idéalise Maria, la met sur un piédestal avant même de la connaître. Cette idéalisation est renforcée par le fait que Maria soit uniquement vue à travers le regard de Juan Pablo. Ce point de vue subjectif met en avant le désir possessif de Juan Pablo sur Maria, en effet on a l'impression qu'elle n'existe que par lui.

Cet extrait est révélateur de la vision de l'amour de Juan Pablo, il veut un amour total où chacun se donne entièrement à l'autre, où il peut posséder entièrement l'autre. Il s'attarde sur le moindre détail, il veut que tout soit dit. Sa vision de l'amour est manichéenne : si l'autre ne voit pas l'amour comme lui, c'est qu'il ne l'aime pas réellement. Son jugement est donc dépourvu de toutes nuance.

Dans le chapitre 17, il mentionne à deux reprises « l'amour véritable » qu'il considère comme la seule forme possible d'amour. Mais il se rend compte lui-même qu'il est incapable de définir ce qu'il entend par « véritable amour »

p.69 « je dois avouer que, moi-même, je ne sais pas trop ce que je veux dire par « véritable amour » et, curieusement, bien que j'ai souvent employé cette expression lors de l'instruction, jamais jusqu'à présent je ne me suis décidé à sonder sa signification. Qu'est- ce qu'elle signifie ? Un amour qui inclurait la passion physique ? »

Néanmoins, suite à ses première discussions avec Maria, il se rend compte que l'image qu'il avait d'elle ne correspond pas à sa véritable personnalité.

b) Maria

En effet Maria apparaît d'emblée comme un personnage mystérieux et évasif. Elle ne répond jamais précisément aux questions de Juan Pablo et laisse planer le doute. On peut penser que pour elle, l'amour peut se passer de mots et qu'il n'y a pas besoin de tout dire : deux personnes qui s'aiment sont capables de se comprendre par un simple regard.

Contrairement à Juan Pablo, elle refuse de s'attarder sur des détails

(p.73 « tout cela n'a absolument aucune importance ») ou sur le passé. On peut aussi se demander si ce n'est pas un jeu de sa part de le laisser dans le doute.

En effet, elle n'est pas présentée comme une femme totalement innocente et angélique, elle semble cacher certains vices puisqu'elle lui avait déjà dit (aux chapitres 9 et 16) qu'elle risquait de lui faire du mal, sans lui dire pourquoi.

La preuve la plus flagrante que Maria cache de nombreuses choses est le fait qu'elle n'ai pas dit à Juan Pablo qu'elle était mariée.

c)

Bien qu'ils aient tous les deux des visions contradictoires de l'amour, Juan Pablo s'accroche à Maria car il a « besoin d'elle ». Malgré leurs différends, ils sont parfois capables de se comprendre

p.69 « Je sais que, tout à coup, nous arrivions à connaître quelques instants de communion. »

De plus, Juan Pablo représente ces instants de communion à travers l'image du pont-levis qui relie leurs âmes.

Mais Juan Pablo ne se contente pas de ces quelques moments de bonheur avec Maria : l'attitude et l'imprécision de celle-ci l'énervent et le déçoivent de plus en plus. Il se sent de nouveau incompris et à l'impression que Maria se moque de lui. Il se met à douter de l'amour de Maria.

Une relation basée sur le doute

a)

Les doutes de Juan Pablo émergent dès le début du chapitre 17: lui-même le dit clairement

p.68-69 « Par moments, elle avait l'air d'une adolescente pudique et tout à coup j'avais l'impression d'avoir affaire à une femme facile, et alors défilait dans mon esprit un long cortège de doutes : ou ? Comment ? Qui ? Quand ? ».

Ses doutes reflètent son manque de confiance en lui. En effet, comme il ne croit pas en la nature humaine, il ne peut pas croire en lui. Ainsi, il projette son manque de confiance sur Maria: il considère tous les autres hommes présents dans l'entourage de Maria comme de potentiels rivaux. Par conséquent, il doute de son amour et de sa fidélité. Si Maria trompe son mari, pourquoi ne le tromperait-elle pas aussi?

Ses doutes le poussent à raisonner pour trouver les réponses aux questions qu'il se pose. Mais influencé par sa jalousie, il raisonne à l'envers. Juan Pablo pense que Maria le trompe, il essaie de justifier ses soupçons dans les faits et les événements passés. A force de vouloir raisonner à l'extrême pour trouver une explication logique à tout, il en devient contradictoire et illogique. D'ailleurs, le fait que Juan Pablo utilise l'exemple d'Othello dans le chapitre 19 afin de justifier ses doutes auprès de Maria, illustre cela.

p.81 « Tu es capable de tromper ton mari durant des années, non seulement sur tes sentiments mais même sur tes sensations. La conclusion, un débutant pourrait la tirer: pourquoi ne me tromperait-tu pas, moi aussi? Tu comprendras maintenant pourquoi j'ai si souvent chercher à éprouver la véracité de tes sensations. Je me rappelle toujours comment le père de Desdémone avait averti Othello qu'une femme qui avait trompé son père pouvait tromper un autre homme. Et, pour moi, rien ne peut me sortir ce fait de la tête: c'est que tu as constamment trompé Allende, durant des années.

Othello soupçonnait Desdémone de le tromper à cause de quelques détails. Sans vérifier la véracité de ses doutes, il tue sa femme malgré son innocence. Cet exemple est donc mal choisi de la part de Juan Pablo. Cela montre que Juan Pablo a fait totalement abstraction de la leçon que l'on peut tirer de cette oeuvre de Shakespeare: c'est-à-dire qu'il ne faut pas laisser ronger le « monstre aux yeux verts ». Le fait qu'il ne retienne que cet extrait montre que pour lui, les doutes sont au même niveau que les preuves.

Chapitre 17: « Si un jour je te soupçonne de m'avoir trompé, lui disais-je avec rage, je te tuerai comme un chien ».

Juan Pablo ne compte même pas attendre d'avoir la preuve des infidélités de Maria. Juan Pablo se vante pourtant de raisonner logiquement.

b)

Afin de dissiper ses doutes, Juan Pablo questionne constamment Maria, notamment dans les chapitres 18 et 19. A chaque fois fois qu'il adresse la parole à Maria, c'est pour lui poser des questions. On peut noter les nombreuses occurrences du mot « pourquoi », qui reflètent son désir de tout savoir. On remarque que ce sont des discussions à sens unique: c'est toujours lui qui prend la parole, alors que Maria ne fait que répondre brièvement à ses questions. Les rôles ne s'inversent jamais. Ayant l'impression qu'elle mène une double-vie, Juan Pablo l'interroge successivement sur la manière dont elle se fait appeler « mademoiselle » au lieu de « madame », puis sur ses fréquentations (son mari Allende et le cousin de celui-ci Hunter), même s'ils font partis de son passé (Richard, un homme qui s'est suicidé pour elle).

Il exige des réponses précises, mais elle reste toujours évasive.

Par exemple, dans le chapitre 19:

« Mais revenons à Allende […]. Maintenant, j'ai besoin à cette seule question: tu couches avec lui?[...]. Il est nécessaire que je réponde à cela? […]. C'est très simple: tu n'as qu'à dire oui ou non. -La réponse n'est pas si simple: on peut le faire sans le faire. »

De plus, elle n'a de cesse de le rabaisser en lui disant qu'il est puéril et que toutes ses questions sont inutiles et sans intérêt. A cause de cela, Juan Pablo pense que Maria se moque de lui et ne le prend pas au sérieux. Maria semble le traiter comme un enfant, ce qu'il lui fait d'autant plus douter de la nature de son amour.

Citation au début du chapitre 17:

« Je vivais obsédé par l'idée que son amour était, dans le meilleur des cas, un amour de mère ou de soeur. »

Face à l'attitude de Maria, Juan Pablo réagit instinctivement en essayant de la piéger: il prêche le faux pour savoir le vrai. C'est-à-dire qu'il se met à réinterpréter tout ce que dit Maria, n'hésitant pas à aller trop loin, pour la faire réagir. Il espère ainsi lui faire avouer des informations malgré elle. Au lieu d 'apaiser ses doutes, les quelques informations que Juan Pablo ait réussi

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