Syntèse Dissertation

où la littérature est vue comme une source de réflexion et non comme une source de plaisir. La distinction entre ces deux aspects de la littérature est-elle cohérente? Non, nous dit U.Eco : « L’analyse des textes diminue-t-elle le plaisir et la liberté de mes lectures ultérieures? Pas du tout. Au contraire, après la réflexion, j’ai toujours éprouvé de nouveaux plaisirs. Comprendre comment fonctionne le langage ne diminue pas le plaisir de parler, ni d’écouter. Pour expliquer ce sentiment, j’ai coutume de dire que même les gynécologues tombent amoureux ». En plus de démontrer un lien entre plaisir et réflexion, il les affirme complémentaires. Chacun engendre l’autre. Pour illustrer ses propos, Eco nous donne deux exemples dont un assez comique au sujet de la vie sentimentale des gynécologues.

Tout d’abord, remarquons qu’il existe deux type de plaisirs littéraires. Le plaisir d’analyser une œuvre qui exige une certaine distance avec le texte. On recherche dans ce cas-là, la compréhension de l’œuvre. Le second plaisir est le plaisir de réaliser une lecture participative où le lecteur est en immersion dans l’histoire. C’est l’imagination du lecteur qui est recherchée ici. La Doxa des années 70 voudrait que la jouissance d’un de ces plaisirs annule l’autre. Or la compréhension d’un texte augmente la capacité du lecteur à s’immerger dans ce même texte. À l’inverse, une lecture participative rend l’analyse plus intéressante. La jouissance d’un de ces plaisirs n’annule donc pas l’autre mais le rend plus intense.

À ce sujet, M.Picard avance une thèse intéressante dans son livre Lecture comme jeu. Il distingue trois notions dans la lecture: le lu, le liseur et le lectant. Le lu désigne les émotions et la sensibilité personnelle du lecteur. Le liseur évoque le lien que le lecteur peut faire entre l’univers du livre qu’il imagine et son propre univers. Alors que le lectant représente la partie analytique du texte. Le lectant est majoritairement favorisé dans les études littéraires de notre système scolaire, pourtant Picard affirme qu’aucun des trois éléments de la lecture n’est dissociable des autres. Les trois éléments sont indispensables et bénéficient de la même importance. C’est le lecteur qui doit faire le choix de se focaliser sur un ou deux de ces éléments. Le livre peut également s’orienter vers l’un ou l’autre de ces concepts.

Les mentalités changent et tendent à se rapprocher de l’idéale grecque qui consiste à combiner divertissement et apprentissage (otium). Deux concepts émergent de cette évolution dans l’apprentissage: le playing, exprimant le jeu de rôle que le lecteur vit lors de sa lecture, et le game, représentant le jeu de règles qu’il subit. On retrouve ici, au-delà de l’immersion du lecteur lors du playing, les instructions de l’auteur sur la marche à suivre lors de la lecture. Le lecteur n’est donc plus libre, il est guidé par l’auteur vers le véritable message de l’œuvre.

Le plaisir et la réflexion sont donc bel et bien liés et devraient être également représentés dans le système scolaire, comme dans la société. Malheureusement,