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Vercors animaux dénaturés

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par la défense, les jurés se déclarent incompétents sur le fond et refusent de se prononcer.

Le procès est ajourné et l'affaire est transférée au Parlement britannique qui décide finalement d'accueillir les tropis dans la famille humaine "car les tropis ont des tabous".

Lors d'un second procès, Templemore est acquitté au nom de la "non rétroactivité" de la loi (au moment où il a tué son fils, le législateur n'avait pas encore décidé si les tropis étaient des hommes ou non et on ne peut être condamné pour un délit qui n'est pas prévu par la loi)

Les tropis sont placés sous un statut spécial de protection, sous le contrôle de l'ONU.

Le livre pose, sous la forme d'un conte philosophique, à la manière de Voltaire ou de Swift, deux sortes de probèmes :

a) le problème de l'évolution : l'expédition, dirigée par Kreps a pour but de retrouver le crâne et le squelette d'un anthropoïde dont Kreps a découvert la mandibule et trois dents ; cette découverte pourrait conduire à celui du fameux "chaînon manquant" : l'homme "descend-il" directement des primates ou a-t-il un ancêtre commun avec les primates ? Cette deuxième hypothèse semble avoir les faveurs de Sybil (pour des raisons strictement scientifiques), ainsi que du Père Dillingham (pour des raisons scientifiques, mais aussi religieuses).

Le Père Dillingham est un scientifique de valeur ; parfois malmené, mais jamais caricaturé. C'est un partisan de l'orthogénèse, autrement dit du "dessein intelligent". Pour le Père Dillingham (Pop) l'évolution a un but, une direction. "Il pense (c'est Sybil qui parle) que les mutations ne se font pas au hasard, par sélection naturelle, mais qu'elles obéissent à une volonté de perfectionnement... Oh ! zut, dit-elle devant cette incompréhension persistante (de Doug). Il pense qu'il y a un plan et un architecte et que le Bon Dieu sait d'avance ce qu'il veut ! résuma-t-elle (p. 34).

Sybil estime, de son côté, que la sélection naturel a un rôle majeur, mais qu'elle n'est pas le seul facteur : "l'évolution est le produit de facteurs complexes, internes et externes, - de toutes sortes d'interactions. Je pense qu'on ne pourra jamais ramener l'évolution à un seul facteur (...) ; "les facteurs externes sont le climat, la nourriture, les autres animaux, la sélection, c'est que subsistent et prospèrent les formes les plus adaptables à ces facteurs, tandis que les moins adaptables disparaissent, les facteurs internes sont les forces de transformation, issues d'une sorte de volonté diffuse de l'espèce de se corriger peu à peu, de se rapprocher d'un prototype".

Le Père Dillingham n'est pas "créationniste, il admet l'évolution (et donc le darwinisme), il ne croit pas que "Dieu" a crée les espèces une fois pour toutes (fixisme) et que l'humanité dérive d'un couple primordial ; il n'interprète pas la Bible au pied de la lettre. Sybil ne rejette pas totalement l'hypothèse d'un "dessein", mais elle en fait le dessein de l'espèce et non d'un Dieu créateur. Vercors montre bien la différence entre une observation, une loi et une hypothèse.

b) le problème de la "nature humaine" : c'est le problème central du roman : qu'est-ce qu'un être humain ? Quelle est la limite entre l'homme et l'animal ? Les tropis fabriquent des outils, ont un langage rudimentaire, fument leur nourriture, enterrent leurs morts, mais les spécialistes qui s'affrontent devant le tribunal ne sont pas d'accord sur l'interprétation "naturelle" ou "culturelle" qu'il convient de donner à ces caractéristiques, pas plus qu'ils ne sont d'accord sur l'interprétation des caractères anatomiques, par exemple sur le rôle de la main : l'homme pense-t-il parce qu'il a une main (Aristote) ou a-t-il une main parce qu'il pense ? Ou de l'astragale (os du pied) dans la verticalisation, ou sur des caractéristiques biologiques comme l'interfécondité avec l'espèce humaine.

Vercors soulève un réel problème philosophique : les sociétés occidentales ont défini des "Droits de l'Homme", mais sans chercher à définir l'homme. A travers la fable des tropis, Vercors aborde la question du racisme (doctrine qui comporte dans le roman deux partisans déclarés : Julius Drexler et Eatons) : "Si l'on met en cause, sur des différences biologiques, l'unicité de l'espèce humaine, il n'existera plus de barrière où s'arrêter." (p. 167)

La "preuve" qui est donnée de l'humanité des tropis assez étonnante : ils fument leur nourriture (la passent au feu) avant de la consommer. Les tropis qui ont accepté de vivre dans la réserve ont renoncé à cette pratique et mangent la viande sans la fumer. Les porteurs papous les dédaignent, mais vont consommer clandestinement la chair des tropis qui continuent à fumer leur nourriture (cette pratique étant associée au culte du feu), ce qui montre qu'ils les considèrent comme des hommes.

La conclusion du roman est qu'il n'y a pas de "nature humaine", que l'homme est un être de culture, un être qui s'est "arraché à la nature", un "animal dénaturé".

c) La conciliation des droits de l'Homme et des intérêts économiques :

La solicitude des Anglais envers les tropis, n'est pas tout à fait "désintéressée". Vandercruysen voudrait implanter une filature de laine en Australie en déportant les tropis de Nouvelle Guinée en Australie. Jusqu'alors, la laine australienne était exportée à l'état brut vers la Grande-Bretagne et transformée dans les filatures anglaises et non en Australie, en raison du coût de la main-d'oeuvre australienne ; les industriels anglais réalisant une grosse plus-value (différence entre le prix d'achat de la laine brute et du prix de vente de la laine transformée).

La transformation de la laine en Australie, donc la maîtrise de la totalité du processus, entraînerait à terme la ruine de l'industrie lainière anglaise. Les industriels anglais se joignent donc aux défenseurs des droits de l'Homme pour faire pression sur le Parlement britannique afin que les députés statuent sur l'humanité des tropis.

Peut-être

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