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Ne désire-t-on vraiment que ce qui de la valeur pour les autres?

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Par   •  8 Mars 2018  •  Dissertation  •  3 383 Mots (14 Pages)  •  1 023 Vues

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Dans un monde dans lequel le paraître est roi, où la consommation est reine, où l’esprit critique n’existe pratiquement plus, le fait d’avoir une existence propre devient très difficile. Notre existence étant tributaire du regard des autres, nous nous devons de répondre à leurs attentes. De ce fait, nous ne pouvons plus avoir de désirs propres mais sommes obligés de faire nôtres ceux des autres. Par conséquent, nos envies et nos souhaits doivent avoir une valeur pour autrui. Par un effet miroir, la société nous renverra une image très positive de nous-mêmes. Aujourd’hui plus que jamais, le luxe étant signe de réussite et de richesse, il est devenu le moyen de marquer sa position dans la hiérarchie sociale. Pour cela, il suffit de jeter un œil dans les cours de lycée, pour constater l’homogénéité vestimentaire des adolescents qui exhibent de manière ostentatoire leurs marques. L’individu n’a plus d’existence propre, il vit en groupe et de ce fait il n’a pas non plus de désir propre mais uniquement des désirs dictés par son groupe d’appartenance. Le fait d’être différent et de ne pas répondre aux normes du groupe entraînerait un rejet qui conduirait à la solitude. Or, rares sont les personnes capables de supporter cette solitude et donc de s’affirmer dans leurs choix. En effet, ne pas tenir compte de la valeur des choses aux yeux d’autrui demande une grande force de caractère et l’acceptation de l’isolement.  Par contre, nous ne pouvons réduire l’individu à cette unique manière de penser. Fort heureusement, nos désirs peuvent aussi se révéler être insignifiants aux yeux des autres et faire de nous des êtres originaux, différents et uniques. En conclusion, n’y a-t-il finalement que deux alternatives possibles : vivre au travers du regard des autres, ne pas satisfaire ses propres besoins mais ne pas être seul ou assumer ses désirs propres quitte à ne pas être reconnu et à vivre seul? Autrement dit l’homme préfère-t-il ne pas être en accord avec ses désirs, être malheureux mais entouré ou préfère-t-il son bonheur même si celui-ci est solitaire et non partagé? La norme doit-elle dicter notre vie ? Est-ce elle ou nous qui devons décider de notre bonheur? Toutes ces questions sont paradoxales et nous amènent à nous demander : « Ne désire-t-on vraiment que ce qui a du prix pour les autres? »

        Depuis la nuit des temps, l’homme ne désire que ce qu’il n’a pas et ce qui a de la valeur pour autrui. Il suffit de faire référence à la religion, et de prendre pour exemple la pomme convoitée par Eve mais interdite. La convoitise a pris le dessus sur l’interdiction ; au détriment de sa présence au paradis, Eve a préféré la possession de la pomme. Dans l’Histoire, les guerres s’expliquent également par le fait de vouloir s’approprier les possessions des ennemis car elles ont de la valeur pour eux. Nous allons donc montrer que nos désirs sont dictés par le fait de vouloir être dans la norme, d’avoir soif de reconnaissance et de craindre la solitude. 

        Avant toute chose, posons-nous la question de savoir ce qu’est le désir. Le mot désir provient du latin desirare qui signifie « «regretter l’absence de quelque chose ou de quelqu’un. »

Le mot désir peut être opposé au mot besoin, qui représente une demande vitale là où le désir n’est qu’un souhait très personnel et qui n’a pas la même valeur pour tout le monde. La valeur d’un désir correspond-t-elle à sa valeur marchande ? Il s’agit là d’une question sans réponse ou aux multiples réponses car pour certaines personnes, les valeurs essentielles seront les valeurs morales alors que pour d’autres ce seront des valeurs matérielles. Néanmoins, une chose acquiert de la valeur à partir du moment où elle est également désirée par d’autres. C’est le principe même de l’offre et de la demande. Plus un objet est convoité, plus il sera cher et inversement. Le désir n’atteint jamais la satiété car dès qu’Il est assouvi, il est porté au degré supérieur et le processus recommence. Le besoin est assouvi dès que l’on a pris possession de l’objet de son besoin. L’objet de notre désir dépend de notre environnement ; il se mesure à l’aide de la comparaison à autrui. En effet, l’accroissement de la richesse n’entraine pas nécessairement celui de la satisfaction. En conclusion, comme l’a dit Nina Bouraoui, écrivaine française, « le désir n’est pas isolé. Il est multiple et secret. Il est par les autres et pour les autres ».

        La société actuelle est régie par l’opinion commune et tout un chacun aspire au conformisme. En sociologie, le conformisme correspond à un changement de pensée pour qu’elle soit en cohérence avec celle du groupe dominant. Nos désirs font partie de cette pensée commune et sont entretenus par les médias sous la forme de publicité. Ce principe a été confirmé par les expériences de Solomon Asch, sociologue, qui a démontré la faculté des gens à suivre l’idée de la majorité de la société au détriment de leur opinion. En effet, il a réalisé plusieurs expériences comme par exemple celle des segments. Cette dernière consiste à comparer un segment témoin à trois autres segments dont un seul a la même taille que le segment témoin. Cette expérience n’est pas difficile puisque lorsque l’on demande à 9 individus d’un groupe de comparer le segment témoin aux autres segments, on obtient 100% de bonnes réponses. A contrario, lorsqu’une dixième personne rejoint les personnes du groupe qui sont missionnées pour donner de fausses réponses, on obtient uniquement 63% de bonnes réponses de sa part. On peut donc dire qu’il s’est conformé à l’opinion commune. Cela montre bien que l’influence d’un groupe peut mener un individu à modifier ses croyances personnelles dans le but de s’intégrer au groupe et a fortiori d’être dans la norme. Nos désirs sont assujettis au même principe. La chirurgie esthétique est par exemple une conséquence de cette perte d’humanité. En effet, personne n’aime particulièrement souffrir et pourtant nombre d’hommes et de femmes ont recours à la chirurgie esthétique dans le but de répondre aux normes imposées par la société. Qui n’a jamais rêvé d’avoir la bouche d’Emmanuelle Béart, les seins de Beyonce, les pommettes saillantes de Megan Fox ? Nous sommes tous plus ou moins victimes de ces phénomènes dits de mode sans nous en rendre compte car nous y sommes soumis dès notre plus jeune âge. Fait très étrange mais véridique, l’être humain préfère se passer de ses attraits naturels au détriment d’attributs artificiels qui lui coûtent très cher. 

        Un être humain seul au monde pourvu d’une voix magnifique n’aura pas conscience de la qualité de son chant si personne n’admire sa prestation. Il en va de même pour tous les êtres humains et c’est comme cela que ce dernier fonctionne. Pour avoir conscience de soi, l’être humain a besoin que les autres lui renvoient une image de lui-même. C’est au travers de cela qu’il pourra se positionner dans la hiérarchie sociale. Il devra se munir de tous les artifices nécessaires à l’image qu’il veut donner de lui-même comme une marque de téléphone, de vêtement, de voiture. Dès que l’individu possède un bien quelconque il se sent obligé de l’exhiber aux yeux de tous tel un trophée qui témoignerait de sa réussite et de son ascension sociale. Ce dernier aura beau réaliser l’impossible, ses actes paraîtront banals si les autres n’éprouvent pas d’intérêt particulier à leur égard. Une fois de plus, il faut qu’ils aient une valeur intrinsèque pour les autres. Rares sont les personnes qui vont s’engager dans l’humanitaire car ils resteront dans l’anonymat tandis que nombreux sont les candidats à convoiter une carrière de footballeur. Depuis le début de ce paragraphe, nous parlons de reconnaissance sans en avoir donné la définition. Dans ce contexte, ce nom signifie que les autres vont re-connaitre ce que nous leur montrons. C’est-à-dire qu’ils arrivent à lui attribuer une définition, une valeur, un prix et nous associer à cela. C’est la raison pour laquelle nous nous devons de ne désirer que ce qui a de la valeur pour autrui. 

        L’être humain a besoin du regard des autres pour exister et avoir conscience de lui-même et c’est la raison pour laquelle il ne peut pas vivre seul. L’autre est comme un miroir dans lequel il se reflète et acquiert ainsi la conviction de son existence. Le texte de David Hume, traité de la nature humaine, en est un témoignage.  Ce dernier nous explique que le pire des châtiments est l’isolement car il nous empêche de partager nos émotions, nos joies, nos peines, notre bonheur. Le texte nous dit également qu’un homme seul ayant tous les pouvoirs sur la terre ne serait pas heureux car il ne pourrait rien partager. C’est cette peur de la solitude qui nous pousse à museler nos opinions et à nous fondre dans la masse quitte à perdre notre personnalité et notre liberté de penser. Notre désir et notre besoin d’attachement à un groupe sont plus forts que l’attachement à nos idéaux et nous préférons hurler avec les loups plutôt que de combattre pour nos idées. Le temps des leaders charismatiques est révolu, ceux pour qui l’opinion des autres ne comptait pas; seule comptait pour eux la cause pour laquelle ils luttaient. Pour appartenir à un groupe, il faut un signe de reconnaissance; encore faut-il que ce signe de reconnaissance ait une existence propre et une valeur mesurable. Il servira alors de monnaie d’échange, de code pour entrer en contact avec les gens du groupe. ll permettra la communication, les échanges, les expériences partagées et  donnera vie à l’individu. Sans ce code, l’accès au groupe est impossible, rares sont les personnes qui oseront néanmoins s’imposer car la solitude sera leur compagne de vie. C’est la raison pour laquelle, le choix le plus accessible est celui qui fait l’unanimité et qui agit comme un ciment sur le groupe. 

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