Mithridate
Mémoire : Mithridate. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresments. Au contraire, on a parfois l’impression d’avancer de proposition en proposition.
* Dans une brève introduction des vers 1379 à 1383 Mithridate nous révèle un état de sidération et d’éparpillement provoqué par les propos de Monime.
* Ensuite du vers 1384 à 1392, Mithridate se ressaisit. Il donne l’impression de convoquer sa fureur pour châtier les coupables.
* Dès le vers 1393 jusqu’au vers 1400, se fait sentir un vif mouvement de recul de Mithridate qui développe des arguments permettant d’épargner Monime et son fils.
* A l’intérieur du vers 1402, on voit s’opérer un nouveau revirement : la passion ressurgit et la soif de vengeance aussi et ce jusqu’au vers 1408
* Finalement des vers 1409 à 1420, Mithridate revient à sa désolation initiale, incapable de trancher dans un sens ou dans l’autre. Il s’éloigne ainsi de toute prise de décision possible. De plus, il convoque les Romains pour développer le paradoxe qui le fait se prémunir contre tous les poisons sauf le poison amoureux. Le dernier vers se retrouve donc isolé et fait figure de conclusion avec une ultime question qui semble dénoncer la stérilité apparente de tout ce questionnement.
Etude
Mithridate est encore tout imprégné de la présence de Monime malgré le changement de scène. On perçoit la force de cette présence à travers la sidération de Mithridate qui s’exprime de manière très simple grâce à la phrase « elle me quitte ».
Loin de l’image habituelle d’un Mithridate calculateur qui cherche à cacher sa colère pour confondre ses ennemis, on a au contraire, une phrase très simple qui présente comme un accent d’effroi de la part d’un être qui se sent abandonné : le Roi est donc éperdu.
Le rythme s’en ressent puisque ces mots se poursuivent avec une exclamative qui coupe le premier hémistiche en deux dans les 2 premiers vers. On constate que dans le second vers, l’ordre des mots est bouleversé. Cet ordre syntaxique rend compte de façon mimétique du trouble intérieur de Mithridate. Au premier vers, le point d’exclamation se lit comme s’il s’agissait d’une virgule : cela permet un rapprochement de « quitte » et « moi ». On voit donc nettement apparaître le contraste avec le caractère de Mithridate, ce qui souligne l’effet de choc.
De plus, malgré le fait qu’une place importante soit accordée à la parole de Mithridate, les dignes paroles de Monime, bien que peu nombreuses, l’ont laissé sans voix comme le prouve l’expression « lâche silence ». Le terme silence est à la rime avec « insolence », chacun de ces termes correspond à l’attitude d’un des personnages. On est donc loin de l’attitude majestueuse d’un Mithridate maître de la parole.
En utilisant le verbe « sembler », Mithridate en donne l’apparence mais, en réalité, il n’approuve pas sa fuite mais n’a pas su la contredire. Il n’est d’ailleurs pas loin de se faire des reproches comme le montre « peu s’en faut » ce qui est étonnant puisqu’il est réputé inflexible.
Le sujet est le cœur de Mithridate, c'est-à-dire que son cœur pourrait pencher en faveur de la jeune femme. Cette synecdoque (=association de termes pour parler d’un tout) souligne combien il est désespéré de cette fuite dont il n’est pas maître. Cela confirme l’emploi de « pencher » qui va introduire l’idée d’hésitation, de balancement.
Sous l’accent fixe se trouve l’adverbe « encore » ce qui montre qu’il ne s’agit pas du premier balancement. De plus, il y a un respect des césures des alexandrins ce qui les coupe de manière symétrique avec des hémistiches connotés comme « mon cœur » « son côté ».
Ensuite, les questions s’enchaînent. Le vers suivant est en effet constitué de 3 interrogations et a pour seul verbe, le verbe existentiel « être ». Il s’agit donc d’un questionnement existentiel qui fait écho à l’affirmation de Monime au vers précédent : « Je vous connais » il peut ainsi se demander lui-même s’il se connaît.
Il ne peut répondre à cela que par des questions. On voit que la perplexité de Mithridate n’est pas feinte puisqu’il s’interroge sur la nature de ce « je ». Cela entraîne un questionnement profond engendré par la stupéfaction. Celle-ci est peut s’expliquer par le changement soudain de Monime qui s’est emportée au-delà de la modestie à laquelle elle l’avait habitué. Sa première réaction face à ce comportement inhabituel est donc la surprise qui fait qu’il ne se reconnaît plus lui-même dans un premier temps. Il se trouve emporté par le changement de Monime.
D’abord, Mithridate va préciser qui il est. Il se questionne donc à propos de sa propre identité. Il va commencer par prendre de la distance par rapport à lui-même en évitant tout verbe. Ainsi le vers 1384 est un vers nominal comme s’il fallait gommer les protagonistes. L’absence de sujet et d’objet illustre bien le besoin de Mithridate de se retrouver en prenant de la distance.
De plus, il y a un va et vient entre lui et elle de manière implicite comme à travers le « pardon » où il y a d’un côté celui qui pardonne et de l’autre celui qui est pardonné. Cependant il n’y a ni noms, ni raison, ni temps. Le « plus » n’est donc pas fixé dans le temps ce qui souligne l’indécision de Mithridate. De nombreux moyens sont donc utilisés pour encourager Mithridate à un type d’attitude auquel il n’est pas encore résolu.
La répétition du « non » peut symboliser le rejet, l’encouragement ou le dépit selon la lecture. Il s’agit d’un questionnement ontologique (=sur la nature profonde de Mithridate) qui annonce progressivement la conversion qui de fera à la fin de la pièce. Il y a donc là un véritable questionnement qui prépare la fin de la pièce.
Comme dans tout monologue, il y a selon la terminologie de Benvenisce, un « moi locuteur » et un « moi écouteur ». Or ici, le moi locuteur n’a pas laissé la parole au moi écouteur. A peine l’interrogation énoncé, bien que cela supposerait un temps de réflexion, le moi locuteur reprend immédiatement la parole comme s’il avait peur d’être à l’écoute de ce qu’on pourrait dire être son cœur.
Ce vers est riche d’enseignements puisque le « non » peut aussi être la manifestation du fait qu’il ne veut pas aborder ces questions et regarder au fond de lui-même ce qui correspond à un refus du questionnement ontologique. Dès lors, il reprend un questionnement temporel avec « plus de pardon plus d’amour ».
La métrique apporte des éléments d’information : le rythme du vers est véritablement dissymétrique. Ainsi on a une accentuation sur le « non » et le refus par la répétition de l’adverbe négatif « plus ». Il cherche donc à reprendre sa maîtrise sur lui et sur les autres.
On constate en effet une régularité 6/6 au vers suivant. Ce vers est en effet régulier et symétrique. Il manifeste qu’il s’agit là de la vraie nature de Mithridate comme s’il parvenait à se ressaisir.
La rime avec « reconnais » qui était à l’origine « reconnois » montre une discordance avec la graphie puisqu’à l’époque le « oi » se prononçait « ouai » : ainsi les termes ne rimait plus à l’oreille.
La seconde partie du vers est en quelque sorte une réponse à « qui suis-je ». Il est libre au niveau de la rime et courroucé par l’allitération en « r » : on retrouve donc un état de division, reconnu comme état normal du héros racinien. D’après R. Barthes : « Le héros racinien ne retrouve son unité que dans des moments extatiques, précisément et paradoxalement quand il est hors de lui. La colère solidifie délicieusement ce moi déchiré. » La colère est en effet un état de division donc il va retrouver son unité, qui correspond à cet état de division et qui est son état naturel, par la colère.
Mithridate se définit donc par sa colère qui est un élément constitutif lui permettant de passer sous silence son déchirement intérieur. On voit combien il est alors éclaté au point qu’il ne se reconnaît plus. C’est d’ailleurs le sens qu’il faut accorder à l’impératif « immolons » et aux 2 impératifs suivants.
L’utilisation
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