Conquistador

Comblement d’une ellipse narrative : Civilization de Laurent BINET (2019)

Ajout détails concernant la traversée transatlantique (~p.84)

17. Lisbonne

[…] Les savants d’Atahualpa avaient compris comment utiliser un instrument qui permettait de se repérer grâce aux étoiles, si bien que les navires purent tenir leur cap sans dévier de leur trajectoire.

Il arrivait de temps en temps que ses troupes perdent espoir, Atahualpa leur rappelait alors qu’ils se dirigeaient vers un monde nouveau. Et que, comme son ancêtre Pachacútec, le grand récepteur, ils allaient conquérir de nouveaux territoires et ainsi implanter le culte du soleil sur les terres de l’Est.

Contrairement à ses loyaux généraux, l’empereur n’avait pas d’appréhension parce qu’il ne craignait rien, pas même la mort. Sachant qu’il n’avait rien à perdre car s’il était resté sur ses terres ancestrales, son frère, Huascar, l’aurait fait assassiner depuis longtemps.

Quant à sa protégée, Higuénamota, elle ne se lassait pas de lui raconter des histoires à propos du nouveau monde.  

Cela faisait plusieurs semaines qu’ils naviguaient lorsqu’un matin, Atahualpa fut réveillé par le bruit incessant de la pluie. Le ciel couleur d’encre lançait des éclairs et le vent ne cessait de frapper les voiles. Quant aux vagues, elles étaient monstrueuses, elles se brisaient l’une contre l’autre, déferlaient sur le pont, heurtaient la coque des embarcations, les faisant ainsi osciller. L’équipage tout entier était entassé dans les cales. Et accompagnait le chaos par un vacarme infernal. Femmes, hommes, enfants et animaux n’arrêtaient pas de manifester leur affolement. Parmi eux, les femmes choisies, sortes de prêtresses, multipliaient offrandes et prières dédiées à Viracocha, dieu de la foudre et des tempêtes. Afin qu’ils les épargnent.

Le général Chalco Chimac avait fait affaler la grande voile du mât et hisser la petite afin que le navire ne dérive pas et respecte ainsi le tracé initial, permettant de ne pas perdre de vue le reste de la flotte.

Le soleil caché par cet amas de nuage ne leur était d’aucun secours. L’obscurité leur avait fait perdre la notion du temps et, exténué par cette journée terrible en émotion, l’équipage tout entier se laissa tomber dans les bras de morphée. A leur réveil, la mer était calme, le gouvernail arraché était la seule trace qui témoignait que les faits de la veille n’étaient pas le fruit de leur imagination. Une fois remplacé, le jeune empereur inca et son armada purent repartir.