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Roméo Juliette

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décharné » qui semble se nourrir de la matière des autres pour se gonfler à nouveau. Elle est d’ailleurs dite « vorace » et trouve sa représentation dans les « vers », proches de dévorer le cadavre de Juliette : une image de mauvais goût qu’on ne pourrait certes pas retrouver dans une pièce classique française ! Roméo a par ailleurs du mal à cerner tout à fait cette mort : elle lui offre une possibilité de s’unir éternellement à Juliette, mais, dans le même temps, elle est repos infini, c’est-à-dire cessation de toute activité, vide, néant… De façon générale, les propos de Roméo sont funestes, et on peut presque penser à une danse macabre puisque les flambeaux lui rappellent une salle de bal où tous les fantômes reviendraient ici le hanter et danser autour de lui … si ce n’est qu’il n’est en fait entouré que de corps, que rien ne vient réanimer.

II- Une mort injuste

1) Cette mort est d’autant plus tragique qu’elle est cruelle. Dans le tombeau sont réunis quatre des protagonistes : Roméo, Juliette, Tybalt, Paris, tous morts ou en passe de trépasser. Rajoutons à eux Mercutio et l’on se rendra aisément compte que ce sont les jeunes générations qui se trouvent emmurés dans la tombe … là où les parents sont bel et bien vivants et prêts à tirer la morale de l’histoire. Il y a donc là une inversion de l’ordre logique qui amène à repousser cette mort qui semble d’autant plus inacceptable.

2) De fait, il semble bien, comble de l’absurdité, que les quatre personnes en présence avaient tout pour s’aimer … et ils se sont massacrés. Les voici enfin réunis sous le même toit, celui des Capulet, que Roméo rejoint en se suicidant dans le tombeau de la famille rivale. Proche de la mort, il scelle son union avec Tybalt, qu’il tutoie comme un frère, et avec Paris, qu’il dépose sans jalousie aux côtés de Juliette. La mort intervient là où l’union aurait dû être possible puisque tous sont apparemment faits pour s’aimer.

3) l’amour reste bien sûr un motif prédominant : celui qui unit Roméo à Juliette plus singulièrement. Là encore, la mort est inacceptable en ce qu’elle touche des êtres qui s’aiment follement, et les fait passer de l’excès de bonheur à l’excès de malheur (un motif tragique traditionnel : on retrouve cette formule dans Les Perses d’Eschyle). Roméo retrouve ici le lyrisme de ses premières tirades et joint le geste à la parole en embrassant Juliette, son « phare », dans une étreinte qui rappelle le premier baiser échangé lors du bal, comme si la boucle de l’amour était ici achevée. Cohen s’en souviendra d’ailleurs dans la fin poignante de Belle du seigneur, où la poudre du poison du suicide tourne dans le verre comme le couple enlacé de Solal et d’Ariane, qui s’embrase le temps d’une valse.

III- Roméo, un héros torturé … et aveuglé

1) Le malheur total qui s’empare de Roméo confine alors à la folie. Le jeune homme semble souffrir d’hallucinations, comme Oreste et les furies qui le poursuivent. Il ne parvient plus à démêler le vrai du faux, ce qui transparaît dans les interrogations du début du monologue. Il est en fait dans un espace intermédiaire : toujours vivant, il est déjà mort, puisqu’il parle à Tybalt et à Paris comme à des compagnons ; toujours dans le monde réel, il est déjà dans le cauchemar, jusqu’à ne plus savoir véritablement où il se trouve. En fait, on retrouve un Roméo fidèle à lui-même, mais, pour une fois, passablement lucide. Il s’interroge ainsi : « suis-je assez fou pour avoir imaginé cela ? ». C’est-à-dire que Roméo, ici, prend conscience de ce contre quoi Mercutio l’avait mis en garde dans la tirade de la reine Mab : sa propension à ne pas voir le monde réel et à vivre dans l’illusion, jusqu’à d’ailleurs se leurrer lui-même.

2) Et c’est bien une nouvelle fois ce qui semble se dérouler ici. Comme tout héros tragique, Roméo semble refuser de voir le réel, même s’il se rend bien compte que, sans doute, il se trompe. Ainsi de sa réaction par rapport à Juliette : il semble bien, à plusieurs reprises, qu’il se rende compte que Juliette soit vivante : il voit que le sang n’a pas encore quitté le visage de la jeune fille, qu’il s’étonne d’ailleurs de trouver paradoxalement si vivante. Rien n’arrête cependant sa résolution à se tuer, dans un suicide qu’il met d’ailleurs en scène avec une complaisance certaine, comme s’il s’ennoblissait de cette fin si belle qui consiste à se donner la mort pour son aimée, et à se mettre dans les traces d’un Paolo Malatesta, par exemple, l’amoureux de Francesca da Rimini dans La Divine Comédie de Dante. Son suicide est théâtral au possible et Roméo, même à l’article de la mort, ne cesse de ressasser ces métaphores littéraires dont il use sans doute trop : celle de la mort comme d’une barque est tissé d’un bout à l’autre de la tirade, complétée par l’image de Juliette en phare, et sent plus la récitation que le désespoir réel. Roméo se berce-t-il là

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