Analyse d'une situation socio-éducative

La gestion de l'agressivité et de la violence dans les établissements sociaux et médico-sociaux s'inscrit dans le cadre de la bientraitance des usagers et en lien avec les recommandations de bonnes pratiques de l'ANESM / HAS . Ces situations de violence et d'agressivité nécessitent pour les professionnels de réfléchir à leurs origines, aux facteurs déclencheurs, à leurs mécanismes, pour mieux les prévenir et adapter leur positionnement professionnel et leur capacité à faire face à ces comportements. Pour gérer ces situations, ils doivent adapter leur communication et mettre en place des outils qui doivent être au cœur des réflexions en équipe pour faire évoluer les pratiques professionnelles.

I. Description d’une situation socio-éducative

A. Contexte

1. La structure d’accueil

L’Association « le chardon Bleu » a été créée en 1985. C’est une association à but non lucratif régie par la loi 1901. Ses statuts ont été déposés en mai 1985 et une Convention d’Aide Sociale a été passée avec le département précisant que « L’Association s’engage à recevoir en internat des bénéficiaires de l’Aide Sociale aux Personnes Handicapées adultes des deux sexes, présentant une maladie mentale avec ou sans troubles associés et relevant de placement en foyer du type occupationnel. »

Elle s’est rapprochée de l’association Perce Neige en 2010 pour la rejoindre définitivement en 2014. Perce Neige a été créée en 1966, par l’acteur Lino Ventura et son épouse Odette, parents d’une enfant en situation de handicap.

Le Comité Perce Neige est porteur de valeurs fortes centrées sur la rigueur et la générosité ainsi que le respect de la différence et de l’épanouissement de la personne en situation de handicap. « Leur bonheur est notre récompense. » Cette pensée de Lino Ventura résume l’esprit qui fonde les valeurs associatives.

L’institution a pour mission d’accueillir et de prendre soin de personnes adultes handicapées déficientes intellectuelles avec ou sans troubles associés. C’est aussi un public qui peut présenter des pathologies sévères telles que l'autisme, le polyhandicap, les psychoses ou les maladies dégénératives et orienté par la MDPH en foyer occupationnel ou en Foyer d’Accueil Médicalisé.

Le centre Perce Neige de la Chapelle-sur-Erdre héberge 57 personnes sur deux unités :

- Le foyer « Le Chardon Bleu », qui accueille des résidents entre 20 et 60 ans. Il est composé d’un internat avec orientation foyer d’accueil médicalisé, d’un internat avec orientation foyer de vie, d’un accueil de jour avec orientation foyer de vie et d’une place d’accueil temporaire.

- Le foyer « Le Chardon Blanc », qui accueille des résidents de plus de 45 ans. Il est composé d’un internat avec orientation foyer d’accueil médicalisé et d’un internat avec orientation foyer de vie.

2. L’unité Etincelle

Lors de ce premier stage, je suis rattachée au service Etincelle du Foyer d’Accueil Médicalisé le Chardon Blanc. Cette unité reçoit en priorité les personnes de moindre mobilité, inaptes à toute activité professionnelle et qui nécessitent l’assistance d’une tierce personne pour effectuer la plupart des actes essentiels de la vie courante ainsi qu’une surveillance médicale et des soins quotidiens. Elle accueille huit résidents accompagnés par une équipe de huit professionnels : une monitrice éducatrice, et 7 personnes divisées entre AES (Accompagnant Educatif et Social), AMP (Aide Médico-Psychologique) et AS (Aide-soignant). Durant cette période, je bénéficie de l’accompagnement de la monitrice éducatrice du service.

Les professionnels ont pour mission, d’accompagner les résidents, les aider à gérer leurs dépendances selon leurs capacités et tendre vers un maximum de bien-être et d’autonomie. Les services du Chardon Blanc sont des lieux de vie collectifs où l’identité et l’intimité du résident sont respectées.

Le service Etincelle se présente sous forme d’un grand couloir où les résidents possèdent chacun leur chambre et leur salle de bain. Dans les pièces communes, il y a un salon avec une télévision, une chaine Hi-Fi, des canapés pour se détendre et une salle à manger où tous prennent leurs repas ensemble. Au centre du service, se trouve aussi « l’office », qui est le bureau réservé au personnel de l’équipe et où les résidents n’ont pas le droit d’entrer.

La journée type des résidents du service Etincelle se présente de la sorte : le lever se fait entre 7h et 8h30. Avant le petit déjeuner, 4 résidents sont accompagnés à la douche ou à la toilette au lavabo. Vers 8h30 le petit déjeuner est servi en salle à manger jusqu’à 10h. Ensuite, les 4 autres sont accompagnés à la douche. Pendant ce temps, il y a un temps de détente de 10h à 12h, certains peuvent écrire, d’autres écoutent de la musique… A 12h, le repas est servi en salle à manger puis vient l’heure de la sieste jusqu’à 14h. A 15h30, l’activité du jour peut commencer, tous les résidents peuvent participer selon leurs envies. A 16h30 les activités prennent fin et le goûter est servi. En attendant 19h pour le repas, les résidents peuvent regarder la télévision, nous les accompagnons à mettre leur pyjama, ils peuvent aussi rester au calme dans leur chambre. Après le diner, nous allons coucher les personnes qui le souhaitent mais certains peuvent regarder la télévision ou écouter de la musique jusqu’à l’arrivée de la veilleuse.

B. Exposé de la situation

Nous sommes le mardi 12 janvier, il est 13h et nous sortons du repas du midi. C’est le début de ma deuxième semaine de stage. J’étais avec ma maître de stage pour ramasser la table, aider les résidents à nettoyer leurs mains et leur bouche. Philippe, un résident de l’unité, m’a interpelé en me tenant la main pour me demander quelque chose. J’avais déjà rencontré cette situation au cours de ma première semaine de stage, et suite aux conseils des professionnels de l’équipe, je réponds que je ne suis pas disponible pour lui pour le moment. Je continue ensuite ce que j’étais en train de faire. Environ 5 minutes après, Philippe revient nous voir en demandant d’abord à ma maître de stage de s’occuper de lui mais comme elle n’est pas disponible, il vient vers moi, me reprend par la main et m’emmène vers sa demande. J’essaye de lui redire que je ne suis toujours pas disponible. Philippe, frustré, m’attrape alors par le poignet et me serre très fort pour montrer son mécontentement. Ma maître de stage intervient alors en disant à Philippe qu’il est interdit de faire du mal aux autres et qu’elle va être obligée de mettre en place le protocole prévue dans ce cas-là. Suite à ça, ma maitre de stage a appelé le chef de service pour le prévenir qu’elle fermait la chambre à clé de Philippe pendant 5 minutes. Celui-ci s’est calmé, s’est posé dans le salon et a regardé la télé sans nous solliciter.

II. Compréhension et analyse de la situation

Dans cette partie, je vais présenter mes ressentis face à cette situation, mes questionnements, les éléments relatifs à la personne concernée et pourquoi un protocole de fermeture à clé de sa chambre a été mis en place dans ce genre de situation.

A. Mes ressentis face à la situation

Lors de la situation vécue avec Philippe, je suis passée par différents stades et différents sentiments. En effet, sur le moment je n’ai pas su comment réagir et je me suis sentie démunie devant l’insistance dont a fait preuve Philippe. Je me sentais impuissante. Je n’arrivais pas à l’apaiser et à entrer en communication avec lui.

Ma place été compliquée car je venais d’arriver depuis peu dans le service, les résidents me connaissaient peu et moi j’apprenais aussi à les connaître.

Après lui avoir répété plusieurs fois que j’étais occupée et qu’il me faisait mal, j’ai eu la sensation d’échouer dans mon action, de ne pas être assez autoritaire et de ne pas me faire comprendre.

Heureusement, je n’étais pas seule à ce moment-là. Ma maître de stage était présente, a pu réagir auprès du résident et me soulager. Je me suis alors dit que cela venait peut-être de moi, de ma posture professionnelle.

B. Mes questionnements

Cette situation a suscité en moi quelques interrogations. Sur l’instant je me suis demandée : Comment arrêter ce comportement ? Comment j’aurais dû réagir ? Qu’attend-t-il de nous dans cette situation ? Ai-je été assez à son écoute ? Ensuite, pourquoi Philippe en est-il venu aux mains et comment aurai-je pu éviter ça ? Pourquoi a-t-il un protocole de fermeture à clé de sa chambre ? Pourquoi dans ce cas, faut-il prévenir le chef de service ?

Mon questionnement principal s’est surtout porté sur comment réagir à cette situation : Quel vocabulaire et quel ton faut-il adapter ? Ai-je fait les choses comme il fallait ? Est-ce que j’avais assez lu le dossier de Philippe, ce qui m’aurait permis de savoir qu’il avait un protocole de fermeture à clé de sa chambre dans ce genre de situation ?

C. Eléments relatifs à la personne concernée

Pour mieux comprendre cette situation et pour