Le référendum sous la Vème République
Dissertation : Le référendum sous la Vème République. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Alina_mishka • 17 Février 2020 • Dissertation • 2 710 Mots (11 Pages) • 1 811 Vues
Selon l’article 3 de la Constitution de 1958, la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par la voie du référendum et par l’intermédiaire de ses représentants. A cet égard, la Ve République est une démocratie fondamentalement représentative au sein de laquelle le peuple délègue l’exercice de sa souveraineté à des représentants élus. Cela étant, les citoyens peuvent être amenés à participer directement à la prise de décision politique au moyen d’un procédé dit de démocratie semi-directe : le référendum. Le référendum est un procédé par lequel les citoyens sont appelés à répondre par « oui » ou par « non » à une question ou à un texte. Il est revêtu d’un caractère décisionnel et se distingue en cela de la consultation par laquelle les citoyens n’expriment qu’un simple avis qui ne lie pas les gouvernants.
La place accordée au référendum par les différentes constitutions françaises a beaucoup varié au cours de l’histoire. Le référendum a été introduit en France dès 1793 pour l'adoption de la Constitution, et il en sera de même pour l’adoption des textes constitutionnels de 1795 et de 1799. Le Premier Empire et le Second Empire l'ont pratiqué mais de manière dévoyée : il s'agissait alors de plébisciter l'Empereur, c’est-à-dire de lui témoigner avant tout sa confiance et de légitimer ainsi son pouvoir. De fait, l’histoire constitutionnelle a souvent associé le référendum au plébiscite, lequel apparaît comme un dévoiement du référendum. En réaction, la IIIe République l’exclura tandis que la IVe République ne le réintroduira qu’en matière constitutionnelle.
C’est par un nouveau référendum constituant, le 28 septembre 1958, que le peuple approuve le texte fondateur de la Ve République. Le référendum connaît alors un nouveau souffle avec la Constitution de 1958 qui prévoit deux procédures référendaires au plan national, auxquelles s’ajoute l’obligation de recueillir le consentement des populations intéressées en cas de cession, d’échange ou d’adjonction de territoire (art. 53 al. 3) : le référendum constitutionnel de l’article 89, par lequel le peuple peut approuver une révision de la Constitution, et le référendum législatif régi par l’article 11. Cette dernière innovation tendait notamment à rendre au peuple sa souveraineté confisquée par le Parlement, en l’associant directement à l’adoption d’un projet de loi ordinaire ou organique.
La volonté de faire une plus grande place au référendum ne s’est en apparence pas démentie sous la Ve République. Elle est à l’origine de différentes modifications du texte constitutionnel qui élargissent les possibilités d’un appel au peuple en matière législative. En effet, le champ d’application de l’article 11 a été étendu une première fois en 1995, puis plus modestement en 2008. Cette même année, une procédure nouvelle de référendum a été créée permettant une initiative combinée des parlementaires et des électeurs, tandis qu’un article 88-5 était introduit dans la Constitution en 2005 pour rendre le référendum obligatoire en cas d’adhésion d’un Etat à l’Union européenne.
Si les possibilités de référendum ont ainsi été largement développées en 1958 et par différentes révisions, reste à se demander si cela a effectivement permis de rendre la parole au peuple.A cet égard, l’évolution des procédures référendaires sous la Ve République témoigne d’un certain paradoxe résultant à la fois de la volonté de développer cet instrument de démocratie et de la méfiance qu’il suscite de la part des gouvernants. Cette dernière semble l’emporter. En effet, l’élargissement des possibilités de référendum (I) n’a pas contribué à en corriger les limites démocratiques (II).
I – L’élargissement des possibilités de référendum
Les révisions constitutionnelles renforçant les possibilités de référendum législatif ont porté sur son initiative (B) et sur son champ d’application (A).
A – L’extension du champ d’application du référendum législatif
Le référendum législatif a connu un élargissement de son champ d’application à travers deux modifications de l’article 11 et la création d’un article 88-5.
Initialement, l’article 11 ne pouvait être mis en œuvre que pour les projets de loi « portant sur l’organisation des pouvoirs publics, comprenant approbation d’un accord de Communauté (devenu obsolète et supprimé en 1995) ou tendant à autoriser la ratification d’un traité (…) qui aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions ».
Une première tentative d’extension des matières du référendum a eu lieu en 1984 à l’initiative de François Mitterrand. Il s’agissait alors d’inclure dans le périmètre de l’article 11 « les garanties fondamentales des libertés publiques », de manière à rendre possible le référendum que les sénateurs demandaient sur la liberté de l’enseignement privé. La manœuvre était éminemment politique car le chef de l’Etat savait que la Haute assemblée reculerait devant cette révision. La seconde tentative de 1993 ne rencontrera pas davantage de succès.
En revanche, le champ d’application de l’article 11 a pu être enrichi à deux reprises en 1995 et en 2008 pour permettre d’interroger les Français sur des sujets qui touchent à leur vie quotidienne et qui sont donc susceptibles de les mobiliser. L’objectif affiché était alors de contribuer à les réconcilier avec la vie politique.
C’est ainsi que la loi constitutionnelle du 4 août 1995 a élargi le référendum législatif aux « réformes relatives à la politique économique ou sociale de la Nation et aux services publics qui y concourent ». Ce nouveau champ d’application est relativement vaste, englobant des sujets aussi divers et aussi "concrets" pour les citoyens que l’éducation, les privatisations, le droit du travail, la sécurité sociale, les retraites, les services publics, etc. Demeurent néanmoins exclues les questions touchant aux libertés publiques, au droit pénal, aux lois de finances… et, en fait, aux sujets les plus sensibles.
La révision constitutionnelle de juillet 2008 a quant à elle amplifié le mouvement en ajoutant les réformes relatives à la politique environnementale de la Nation. Elle répond à l’intérêt croissant des citoyens pour ce type de questions et fait écho à la Charte de l’environnement de 2004 qui consacre le droit pour toute personne de participer à l’élaboration des décisions publiques en la matière.
Le champ d’application de l’article 11 pourrait encore connaître une extension importante si le projet de loi constitutionnelle du 28 août 2019 aboutit. Il engloberait alors les « questions de société ».
Enfin, une autre réforme a été réalisée en 2005 à travers l’insertion d’un article 88-5 dans la Constitution. Ce dernier prévoit un référendum pour le vote de la loi autorisant le Président de la République à ratifier un traité d’adhésion d’un nouvel Etat à l’Union européenne.
L’extension des possibilités d’initiative du référendum législatif est également la preuve de l’intérêt croissant porté au référendum.
B – L’extension des possibilités d’initiative du référendum législatif
En 1958, le référendum législatif est une novation qui poursuit deux finalités. Il s’agit à la fois de rendre au peuple sa souveraineté confisquée par le Parlement mais aussi de permettre au Président de la République d’en appeler à l’arbitrage populaire en cas de conflit entre le Gouvernement et le Parlement sur l’adoption d’une loi. En décidant d’organiser un référendum, il contribue ainsi à assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics, conformément à l’une des missions que lui attribue l’article 5 de la Constitution. Le chef de l’Etat n’en a pas l’initiative dans la mesure où la proposition d’organiser un référendum peut émaner du Gouvernement – pendant la durée d’une session parlementaire – ou des deux Assemblées conjointement. Cependant, c’est lui qui décide de la suite à donner à une telle proposition en choisissant de soumettre ou non à référendum le projet de loi concerné. Il s’agit d’un pouvoir propre du Président de la République dispensé du contreseing ministériel.
Par la suite, la volonté des gouvernants de rapprocher les citoyens de l’exercice du pouvoir, en réponse à la crise de la démocratie représentative, s’est traduite par la mise en place d’une nouvelle procédure d’initiative référendaire. L’idée initiale était de permettre aux citoyens d’être à l’origine de référendums. Elle prend corps en 1993 à travers un projet de loi constitutionnelle prévoyant le droit pour 1/5ème des électeurs inscrits sur les listes électorales de déclencher l’organisation d’un référendum. Le Sénat fera obstacle à cette révision constitutionnelle mais l’idée sera reprise, sous une autre forme, par le Comité Balladur en 2007, et à sa suite par le pouvoir de révision en 2008.
L’article 11 distingue en effet depuis lors les référendums portant sur un projet de loi (proposition du Gouvernement ou des Assemblées) des référendums portant sur une proposition de loi. Dans ce dernier cas, l’initiative appartient
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