Les mutations des systèmes productifs
Fiche de lecture : Les mutations des systèmes productifs. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar tibo32 • 15 Mai 2022 • Fiche de lecture • 8 234 Mots (33 Pages) • 350 Vues
Fiche de lecture.
France : les mutations des systèmes productifs, Philippe DUGOT et Guy THUILLIER (dir.), PUM, 2014
Introduction (Philippe DUGOT) (p. 25 à 54)
- Qu'est ce qu'un « système productif » ?
C'est la création et la production de richesse à l'échelle d'un territoire. Les auteurs font le constat suivant : « l'économie française est passée d'une économie où l'industrie et l'agriculture dominaient à une économie essentiellement de services » (« 75% des emplois sont créés dans le secteur des services ») (p. 25-26).
Le terme de « système » incite à se poser la question concernant « l'organisation de cette production » c'est à dire les divers acteurs qui en ont la charge directe ou y sont impliqués à des degrés variables ». Ainsi, parler de « systèmes productifs » c'est faire le point sur les interactions qui existent entre des ensembles multiples et différenciés dans leur taille, leur influence, leurs aspirations, leurs soucis.
Pour définir ce terme, les auteurs J. Scheibling et F. Damette[1] identifient ainsi :
- « une sphère productive composée de la production matérielle industrielle et agricole. Cette production est le résultat d'une addition de fonctions concrètes (fabrication, transport, logistique) et des fonctions abstraites (gestion des entreprises, conception, recherche et développement, fonction commerciale).
- un ensemble « périproductif » qui se situe en amont (services aux entreprises dans le domaine de l'informatique, les finances, les assurances) et en aval (logistique de distribution des produits) ce qui donne une importance cruciale aux réseaux de transports et réseaux numériques pour le bon fonctionnement de l'organisation de la production.
- Le tout étant connecté à un vaste ensemble de « reproduction sociale ».
Après avoir défini le terme de « système productif », les auteurs notent leurs « mutations », une évolution entre le « fordisme » et le « post-fordisme » (depuis 1970): montée des activités abstraites et périproductives, des besoins en main d'oeuvre de plus en plus qualifiée, une codification croissante du travail par l'informatisation et l'automatisation (Joseph Schumpeter parle de « destruction créatrice »), de nouveaux modes d'organisation des flux et des systèmes de production en matière de logistique avec notamment l'interpénétration des échelles géographiques, du global vers le local et donc « un rôle de l'Etat questionné par un libéralisme dérégulateur depuis le début des années 1980 » (p. 29). En effet, la place de l'Etat a reculé depuis 1980 avec la libéralisations de nombreux services publics même si sa place reste prégnante (plus de la moitié du PIB national est consacré aux dépenses publiques).
- Les différentes logiques territoriales des systèmes productifs.
Les auteurs notent un « franco-pessimisme » (p. 32) concernant l'évolution structurelle de l'économie française (« La France est-elle finie ? » (J.P. Chevènement) ; « Réveillez-vous : » (N. Baverez). Ils font le constat suivant :
- La France se place autour de la 5e-6e puissance mondiale en terme de PIB.
- 6eme en terme de Recherche et développement.
- Une croissance économique trop faible marquée par un commerce extérieur déficitaire et une baisse du commerce intra-européen.
Concernant ce dernier point, les auteurs présentent les « différentes logiques territoriales » qui nourrissent la croissance économique rappelant ainsi l'importance de la dimension spatiale dans les systèmes productifs. Elles se composent de 4 manières :
- La France dans la mondialisation : « La France n'est pas une île » (p. 45) et les grandes entreprises françaises sont parfois plus ancrées dans le monde qu'au sein du territoire national.
- Cette relation avec la mondialisation n'est néanmoins pas uniforme. L. Davezies fait une typologie des « territoires gagnants et perdants »[2] : une France productive, marchande et dynamique (située essentiellement dan les grandes villes du pays) ; une France non productive et non marchande mais dynamique (c'est ce qu'il appelle « l'économie résidentielle et présentielle » c'est à dire une économie qui s'appuie sur la consommation locale et qui correspond à l'ensemble des activités économiques destinées à satisfaire les besoins des populations résidant sur un territoire) = cette France là est située à l'ouest d'une ligne Cherbourg-Nice ; une France productive et marchande mais en difficulté (moitié Nord du pays) ; une France non productive et non marchande et en difficulté (dans le nord-est du pays).
- L'importance du « territoire » considéré ici par les auteur comme « une ressource », un « capital territorial » (p. 49), composé des choses suivantes : conditions et ressources de l'environnement naturel ; « patrimoine » historique matériel et immatériel + des caractéristiques difficilement trouvable ailleurs : « Clusters », « pôle de compétitivité » ; le développement des « AOP » et des « IGP ». Tous ces exemples sont autant de témoignages de mise en œuvre de stratégies territoriales localisées, stratégies mises en place par des acteurs publics et privés.
- L'importance du « territoire » comme support physique de l'activité humaine en tant que pourvoyeur de ressources naturelles. Ainsi, les auteurs pointent l'importance de « la croissance verte », de « l'alterconsommation » (p. 50) c'est à dire le développement d'une « économie circulaire » où le déchet devient une ressource à recycler. Ainsi, dans cette dimension environnementale, le paysage devient le « témoin des mutations actuelles des systèmes productifs » (p. 51) : friches industrielles mises en patrimoine ou pas, émergence de CBD, requalifications urbaines, métropolisation, développement d'espaces logistiques...
CHAPITRE 1 : Une géographie productive renouvelée (Florence Laumière) (p. 57 à 80)
Dans ce chapitre, l'auteur dresse un portrait des principales évolutions économiques du territoire, et ses principales lignes de force (Paris, les grandes métropoles mais aussi certaines villes petites et moyennes qui disposent d'indéniables « avantages comparatifs »).
- Le basculement des territoires économiques
Durant les 30 Glorieuses, la croissance annuelle est forte (environ 5%/an). Plusieurs facteurs sont mis en avant par l'auteur :
- Le rôle de l'Etat avec notamment la nationalisation des grandes entreprises comme les Charbonnages de France, Renault, les compagnies de gaz et d'électricité ainsi que le redéploiement des activités industrielles et tertiaires sur le territoire (le « rééquilibrage » avec par exemple le tranfert d'unités industrielles de la région parisienne vers l'Ouest – exemple de l'installation de Citroën à Rennes -, dans le bassin parisien et vers les bassins industriels du Nord).
- La croissance régulière du secteur tertiaire : de 7,5 à 11,2 millions d'emplois entre 1950 et 1975.
- Entre 1975 et 2000 il y a eu une augmentation des emplois (5 millions d'emplois soit
25, 7 millions d'emplois, surtout des emplois qualifiés). Cependant, le quart nord-est perd des emplois, car la région est touchée par le déclin de l'industrie lourde (métallurgie, sidérurgie, extraction houillière, textile, chantiers navals). A noter également le déclin de l'agriculture dans le Massif central où celle-ci reposait sur la polyculture et l'élevage extensif.
[pic 1]
- Affirmation de nouveaux territoires productifs et des logiques nouvelles de développement : développement de nouvelles branches telles que les télécommunications, l'électronique, l'informatique, l'aéronautique, le nucléaire. L'Etat joue ici un rôle important car il investit beaucoup dans de grands projets industriels au début des années 1960 jusqu'en 1980 : plan Calcul, programme Caravelle puis programme Airbus. Enfin, se créent de nombreux emplois dans la sphère « périproductive » comme les services d'ingénierie : ainsi cela donne naissance à de nouveaux « territoires innovants » : les technopôles.
- Autre changement : les migrations « résidentielles » avec notamment la « périurbanisation » c'est à dire le desserrement de nouvelles activités sur le territoire, surtout des activités commerciales, des activités dans le secteur de la logistique et des transports, des établissements liés au traitement ou au recyclage des déchets. Se développe également une « économie résidentielle » (Laurent Davezies[3] s'interroge sur les revenus forts dans les espaces ruraux comme la Vendée et le Gers avec des revenus résidentiels provenant des retraités, des touristes et des actifs qui travaillent en ville, qui compensent les pertes liées aux destructions d'emplois industriels et agricoles. Selon le géographe Laurent Carroué[4], 3 espaces profitent de ces logiques : les campagnes périurbaines des aires métropolitaines, les communes rurales des façades maritimes et les communes de zones rurales moins intégrées des massifs montagneux.
- Avec le processus de mondialisation, on constate un creusement des disparités territoriales avec à la fois une acclération de l'adaptation de certains territoires à la mondialisation, et le décrochage de nombreux pôles. Ainsi apparaît l'importance de l'innovation pour les villes mais aussi pour l'Etat et pour les entreprises : exemple de la transition énergétique, de l'augmentation des mobilités, du vieillissement démographique (la « Silver économie »).
- Vers de nouvelles lignes de force du territoire ?
- Paris garde une position stratégique avec l'aménagement de nouvelles zones d'activités tertiaires (La Défense), de nombreuses structures de transports (plusieurs aéroports internationaux) et le projet du « Grand Paris ». Ainsi, l'économie de l'Ile de France est de plus en plus tertiaire et de plus en plus spécialisée dans les domaines des services à la production et au périproductif (près d'un tiers des emplois de cadres). Les emplois se fixent de plus en plus dans la petite couronne, même si Paris a toujnours les activités les plus rares.
- Une place grandissante pour les métropoles régionales ce qui s'explique par l'importance de la métropolisation, phénomène révélateur d'une société « hyperindustrielle » (P. Veltz). Les activités de production sont de deux sortes : les industries qui n'intègrent pas d'innovation ; celles-ci sont stabilisées car elles recherchent une main d'oeuvre à bas coût ; et les activités à forte valeur ajoutée (la Recherche et le Développement) qui, pour se développer, doivent avoir un environnement favorable (facilité d'accès aux réseaux de communication, accès facile à la formation) = phénomène très marqué à Toulouse et Grenoble ; moins marqué à Lille (car la métropolisation repose davantage sur son intégration européenne) et à Aix-Marseille (qui repose davantage sur l'économie résidentielle et l'économie productive avec la filière nucléaire -construction de l'ITER-). L'auteur note à la fois l'importance de l'histoire dans le développement des métropoles et l'importance du « marketing territorial » qui, grâce à la réforme territoriale de 2014, dite loi MAPAM donne plus de pouvoir et d'autonomie aux métropoles.
- Importance des villes moyennes, notamment à travers les systèmes productifs locaux[5] : exemple de la vallée de l'Arve (décolletage), d'Oyonnax (plasturgie), de Thiers (coutellerie). Dans ces villes moyennes, les richesses sont liées également à la mise en valeur des milieux touristiques. Il y a également une sur-repréentation des activités liées aux services à la personne. L'auteur fait aussi remarquer l'importance de la mobilisation citoyenne pour maintenir les services publics. Les travaux de P. De Roo[6] montrent d'ailleurs la capacité de ces territoires à faire preuve d'innovation pour valoriser leurs atouts (exemple d'Albi avec sa cathédrale classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, ou encore Rodez avec le musée Soulage).
Conclusion
L'auteur met en avant les changements de l'économie française c'est-à-dire les nouvelles formes de spatialisation des activités : le regroupement des entreprises qui ont été soutenies par les collectivités territoriales et par l'Etat ; le processus de périurbanisation ou l'éclatement de la ville (ZIP, technopôles, plateformes logistiques) qui sont les vitrines de la modernité. Enfin, l'auteur rappelle l'importance du « markrting urbain » en citant l'exemple des reconversions industrielles (exemple de la reconversion des « cathédrales industrielles » de Roubaix, converties en musée).
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