Le roman et la fiction
Dissertation : Le roman et la fiction. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar marlle400ans • 4 Février 2022 • Dissertation • 2 896 Mots (12 Pages) • 3 917 Vues
Français
Correction du concours blanc
06 janvier 2021
Sujet : « Entre les mains du romancier, la fiction romanesque est l’arme qui permet de réduire la distance qui sépare la réalité de l’exigence, l’homme de son destin. La fiction nous découvre une vie plus intense et plus significative que la véritable : celle, précisément, que nous souhaitons. Cette transfiguration de la réalité, qui la fait paraître plus urgente et plus profonde, plus vraie que la vie, n’est-ce pas cela que nous appelons le romanesque ? » - Gaëtan Picon, L’impatiente joie, 1948
Remarques générales
Distinguer le titre de la partie du début de du premier paragraphe, qui commence par l’énoncé de l’argument (jamais par un exemple). Il faut au moins deux exemples par paragraphe.
Introduction
Analyse du sujet
Il y aurait un privilège de la fiction romanesque sur la simple réalité. Grâce à la fiction, cette réalité serait sublimée, dépassée de façon à satisfaire un désir fondamental humain, une « exigence », de sens sur l’existence humaine, sur la condition humaine. Un roman est quelque chose qui permet de satisfaire un désir de sens sur la condition humaine, que la réalité ne nous permettrait pas d’exaucer. Il est question d’un écart, un conflit, une tension, entre réalité et exigence : le romanesque serait la réduction de cet écart. Qu’est-ce que cet écart ? A quoi est-il lié ? Qu’entend-t-il par exigence ? On peut considérer que la suite du sujet permet de mieux comprendre cette affirmation du début du sujet. Il y aurait une exigence de ne pas être séparé de son destin. Quel est le sens du mot destin ? Cela voudrait dire d’avoir connaissance et d’avoir accès à l’image de sa vie transformée en destin. Le roman donnerait une forme d’unité, de vue d’ensemble à une vie humaine qui satisferait ce désir de ne pas être séparé de son destin.
Différence superlatif (le plus, la plus) et comparatif (plus…que + complément de comparatif)
Les cinq comparatifs de supériorité nous permettent de comprendre que le roman offre ce que la réalité ne peut pas offrir d’elle-même, ce qui offre un surcroît d’intensité (plus intense, plus urgente) et un surcroît de signification (plus vrai). L’exigence est une exigence de sens aussi bien au niveau de l’intensité, de l’affect que du significatif, du cognitif. Il y a la dramatisation d’un côté et l’élucidation de l’autre.
La dernière phrase est une question rhétorique, oratoire. Il propose une définition du romanesque qui ne va pas de soi qui justifie l’utilisation d’une question rhétorique, qui assimile ce déplacement sur 5 caractéristiques, à la transfiguration. Mot d’origine latine qui traduit le grec metarmorphosis, ce mot est à l’origine religieux, chrétien puisque la Transfiguration est un épisode raconté par les Evangiles dans lequel Jésus apparaît sous une autre apparence. Il s’agit de Jésus sous une apparence encore plus éclatante qu’en temps ordinaire. Il y a une idée de surmanifestation dans ce terme : on le reconnaît avec des traits intensifiés, comme si l’apparaître nous montrait l’essence véritable.
Le verbe « paraître » La réalité apparaît avec une urgence, une profondeur, une intensité
L’apparition n’est nullement contradictoire avec la réalité intelligible : au contraire, la véritable réalité est manifestée par ce moment de la transfiguration. La conception du romanesque qui nous est proposée est exigeante qui s’oppose à la conception facile du romanesque, celle du moyen d’évasion, de divertissement. De plus, il y a une conception sublime voire héroïque du pouvoir du romancier. Il a entre ces mains une « arme ». Il y a une espèce de pouvoir créateur du romancier, comme s’il tenait entre ses mains le destin humain.
Problématisation
Première piste : Cette conception ordinaire du romanesque est quelque chose qui nous éloigne de la réalité. D’ordinaire le romanesque est censé insister sur la distance avec la réalité, au nom d’une exigence qui pourrait être celle de l’évasion. On ne recherche nullement à réduire cet écart. Tout se passe comme si Picon distinguait l’idéalisation ordinaire et la transfiguration. On prend de la hauteur, on s’élève pour embellir les choses : cela satisfait un désir mais c’est une illusion. Ce que propose Picon est que la transfiguration est une élévation mais qui permet de mieux connaître encore le réel, révèle le réel humain, la vie humaine à elle-même. Elle ne la masque pas mais elle la révèle. La transfiguration est un antidote à l’illusion.
Deuxième piste : il est certain qu’il existe des romans qui néanmoins sont des romans de l’idéalisation et ces romans ne se confondent pas avec ceux de Bernanos. Le romanesque passe par une idéalisation évidente dans certains romans, il y a qqch qui ne permet pas de satisfaire l’ambition réaliste. L’Astrée d’Honoré d’Urfé est un roman traditionnel de l’idéalisation. La lecture de Thomas Pavel de l’histoire du roman consiste à opposer deux pôles, le pôle de l’idéal et le pôle du trivial. La définition de Picon prétend dépasser cette opposition. La notion de romanesque s’est-elle métamorphosée ? Qu’elle a plusieurs sens, plusieurs orientations, qui ne peuvent pas toutes être illustrées par Picon ? Le genre romanesque offre davantage de possibilités que ce que propose Picon.
Troisième piste : il faut contester le singulier utilisé par Picon quand il dit « l’exigence ». Le désir de donner un sens à l’existence n’est pas vraiment pareil au désir de connaître le réel, alors qu’ils vont ensemble pour Picon. Est-ce que l’intensité et la vérité progressent ensemble ? Non, une vie plus intense n’est pas forcément une vie plus vraie.
Problématique
Il s’agira de se demander dans quelle mesure la fiction romanesque, en sublimant le réel, offre à l’homme une expérience plus authentique de lui-même.
Amarante : Nous nous demanderons donc dans quelle mesure le romancier parvient à unir monde réel et monde fictif dans la création d’une vie singulière et profonde.
Suzie : Nous étudierons la capacité du romanesque à sublimer la vie réelle tout en évitant l’idéalisme.
Amorce
« La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue, c’est la littérature. » Proust
« L’art recompose exactement la vie. » Proust, A la Recherche du temps perdu
Il ne s’agit surtout pas de faire comme les réalistes avec une copie conforme. Pour recomposer
exactement la vie, il faut en passer par la transfiguration de Picon.
« Qu'est-ce que le roman, en effet, sinon cet univers où l'action trouve sa forme, où les mots de la fin sont prononcés, les êtres livrés aux êtres, où toute vie prend le visage du destin. Le monde romanesque n'est que la correction de ce monde-ci, suivant le désir profond de l'homme. »
Camus, L’homme révolté, 1941 inspiré d’André Malraux
Idée très proche de celle de Picon
« Produit de l’imagination qui n’a pas de modèle complet dans la réalité. »
Définition de la fiction du TLF
Picon renverse les termes de cette définition. Précisément, la complétude est apportée par la fiction.
Plan
- En proposant une image sublimée de la condition humaine, la fiction romanesque exauce un désir de sens que la réalité immédiate ne permettrait pas de satisfaire.
- La question de l’accomplissement du destin et d’un héros : le héros romanesque nous montre une vie transformée en destin
Mensonges romantiques et vérité romanesque, René Girard (théorisation de la mort du héros). L’accomplissement ne signifie pas forcément une vie plus heureuse (contre-sens).
Exemple : le héros stendhalien et sa transformation décisive, personnages de l’intensification (happy few qui perçoivent les choses de façon plus intense), l’expérience du sublime
Exemple : le drame du héros balzacien c’est qu’il y a une opposition entre sa vie et ses espérances, ses illusions. Lucien est celui qui ne renonce jamais et refuse de perdre la moindre illusion (grandeur paradoxale de l’obstination)
- Comment la fiction romanesque permet cette transfiguration ? Au niveau du traitement du temps, de l’espace, de la réalité (phénomène de sélection, d’intensification qui peut être l’objet d’un grand II).
Le romancier fait une sélection d’un certain nombre de traits par le romancier en vue d’une intensification, par la suppression des temps morts où il ne se passe rien de significatif par rapport au récit que le romancier veut mettre en évidence. Cette sélection de moments particuliers va donner une impression d’intensité particulière que l’on n’observerait pas dans la réalité.
Exemple : aventures de Fabrice d’épisodes romanesques en épisodes romanesques
Exemple : Flaubert, spécialiste des temps morts, qui y consacre toute son attention : cela relève encore d’un tri, d’une sélection
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