Jean Mechel
Rapports de Stage : Jean Mechel. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresn soulignera les allitérations de consonnes liquides (r, l, m, n) et de dentales (désaltérait, onde, dans), qui rendent le passage particulièrement harmonieux, son rythme exprime l’eau qui coule; associée à l’imparfait, l’atmosphère en situation initiale apparaît paisible et stable. L’ignoble loup rompt cet équilibre avec un présent de narration (« survient ») dans un verbe de mouvement très brutal, celui mime l’irruption déstabilisante et le signale comme une menace. Dans la chute, on retrouve cette même rapidité d’exécution du loup (« Le Loup l’emporte, et puis le mange »). Le vers est scindé en deux propositions, remplissant chacune un hémistiche et créant ainsi une sorte d’accélération qui mime la prédation violente.
c) Une histoire inquiétante et cruelle
On va étudier ici le sens des allégories, autrement dit ce que représentent les personnages. Les deux s’opposent fortement. On observe une opposition quasiment graphique, ou en tout cas visuelle entre « l’onde pure » et « le fond des forêts ». Cette opposition entraine une image sous-jacente opposant la lumière cristalline aux ténèbres inquiétantes. En effet, dans l’imaginaire, les bois sont des lieux très connotés, où les forces occultes peuvent prévaloir! En tout cas, ils sont inquiétants… Dans le caractère symbolique, on observe une autre opposition entre l’Agneau et le Loup. L’Agneau apparait très raisonnable (représente-t-il la raison, il est d’emblée associé à « l’onde pure », tandis que le loup semble gouverné par ses pulsions, guidé par l’« aventure ». Il est « plein de rage », dominé par la cruauté; il représente la puissance prédatrice qui ne s’embarrasse pas de la raison. Ainsi, la morale devient d’autant plus ironique, voire possède carrément une structure inversée. Le Loup qui est le moins raisonnable, car le plus pulsionnel est celui dont « la raison est toujours la meilleure ». Il représente le machiavélisme politique, expression dérivée du conseiller du prince de Florence, Nicolas Machiavel, ayant vécu au XIVe siècle. Dans son ouvrage intitulé Le prince, il explique que tous les moyens sont bons pour diriger, notamment écrabouiller et massacrer, sans s’appuyer sur la raison, mais en gouvernant par la crainte. C’est la base de tout totalitarisme. En effet, « au fond des forêts / Le Loup l’emporte, et puis le mange », cela illustre la cruauté exercée en coulisse, qui n’est pas visible à cause de l’obscurité de la forêt.
II) UNE STRUCTURE SIGNIFIANTE OÙ LE THÈME DE L’INVERSION EST PRÉSENTÉ DE MANIÈRE SUBTILE, POUR MIEUX DÉNONCER UNE PARODIE DE PROCÈS
a) Une structure inversée
La structure de la fable, après la morale, placée en exergue, c’est-à-dire au début, fait alterner le récit (l.3 à 6 puis 27 à 29) et le dialogue (l.7 à 26). Le dialogue trouve donc une place importante et le récit ne semble que l’encadrer. Pourtant, les mobiles sont élucidés dans le récit, c’est là que la vérité éclate… Avant que le loup tente de justifier son crime, le fabuliste avait déjà donné la réponse : seule la fin guide le loup. Du coup, le dialogue apparait comme vide et vain. Cette fable est tournée `l’envers, la morale et les raisons du meurtre sont déjà données au début, avant même que le crime ait lieu. De plus, l’ironie, figure de style dont il faut comprendre le contraire de ce qui est exprimé, est d’ailleurs dominante dans le texte. D’autre part la victime devient le bourreau et vice-versa, dans le discours du loup : « vous ne m’épargnez guère ».
b) L’agressivité extrême du Loup
Le Loup se place dans une position accusatrice très polémique. Il emploie le vocabulaire de la punition « châtié » et l’actualise très fortement avec le futur, « tu seras », ce qui montre que le sort de l’agneau est déjà scellé. Déjà dans sa première phrase, le loup utilise les mots « hardi » et « témérité », il résume ainsi le crime qu’a commis l’agneau en osant s’opposer à lui. Le motif invoqué est que l’agneau souille l’eau du loup (« troubler » et « tu la troubles » = répétition) dans des phrases affirmatives très courtes. Le loup condense son discours pour en faire une arme. Il ne sent à aucun moment remis en doute par les arguments rationnels qu’apporte l’agneau. Tous les reproches du loup sont d’ailleurs abstraits, invérifiables et absurdes (« tu médis l’an passé »). Il domine la fin du discours par sa parole des lignes 23 à 28, celle-ci demeure performative, elle équivaut à des actes. L’utilisation des formes impersonnelles « on », « il faut » accentuent le caractère incontestable, péremptoire de ses propos. Il coupe pratiquement la parole à l’agneau, lorsqu’il dit « c’est donc quelqu’un des tiens », cela crée une rupture dans le vers, au départ dédié à ce dernier… Cette interruption crée encore une atmosphère de violence verbale, de pression exercée par le Loup, pression exercée aussi par le tutoiement. À l’opposé, on observe la douceur de l’agneau, qui parle de façon très respectueuse (troisième personne, « sire », « votre majesté »…). Ainsi, apparait un combat verbal, dont le loup est le vainqueur.
c) Une parodie de procès
Le dialogue entre les deux personnages est absurde. Les arguments des deux personnages s’opposent, ceux de l’agneau sont articulés (« mais, « par conséquent »…), logiques et s’appuient sur le réel (« que je ma va désaltérant / Dans le courant, / Plus de vingt pas au-dessous d’elle », « je tette encore ma mère », « je n’en ai point (de frère)»…). Sa réplique est harmonieuse, bien cadencée. Le loup aussi articule son discours (c’est donc » x2 + « il faut »= catégorique, mais n’appuie pas ses arguments sur du réel. Ils sont absurdes et ne servent
...