La Musique

nition de la musique. Ainsi la première définition de la musique donnée dans le livre de Pascal Quignard est « Un de ses élèves, Côme Le Blanc le père, disait qu’il arrivait à imiter toutes les inflexions de la voix humaine : du soupir d’une jeune femme au sanglot d’un homme qui est âgé, du cri de guerre de Henri de Navarre à la douceur d’un souffle d’enfant qui s’applique et qui dessine, du râle désordonné auquel incite quelquefois le plaisir à la gravité presque muette, avec très peu d’accords, et peu fournis, d’un homme qui est concentré dans sa prière ». Cette longue définition donnée par le narrateur montre bien le talent de Monsieur de Sainte Colombe qui arrive à créer absolument tous les sons avec sa viole ainsi que son approche tout à fait particulière de la musique. Il faut savoir que la viole est l’instrument qui se rapproche le plus des sons produits par l’être humain. Dans le film, c’est Marin Marais lors de la première scène qui donne sa propre définition de la musique « Toute note doit finir en mourant ». Dans l’œuvre littéraire, on remarque que Marin Marais tout au long du livre, cherchera à trouver la véritable définition de la musique mais il se trompera souvent. Sainte Colombe lui dit d’ailleurs à un moment

« Vous faites de la musique monsieur mais vous n’êtes pas musicien » ou encore « Votre vie sera entourée de musique mais vous ne serez pas musicien ». Monsieur de Sainte Colombe donne, lors de sa dernière leçon avec Marin Marais une définition de la musique qui lui semble la plus exacte : « Cela est difficile, Monsieur. La musique est simplement là pour parler de ce dont la parole ne peut parler. En ce sens elle n’est pas tout à fait humaine ». Mais la définition la plus précise que Marin Marais fait de la musique se situe à la fin du livre lorsque Marin Marais prend sa dernière leçon avec Monsieur de Sainte Colombe. Il définit alors la musique comme « un petit abreuvoir pour ceux que le langage a désertés. Pour l’ombre des enfants. Pour les coups de marteaux des cordonniers. Pour les états qui précédent l’enfance. Quand on était sans souffle. Quand on était sans lumière ». Sainte Colombe sera convaincu par cette définition. On peut se demander ce qu’est fondamentalement la musique ? Après tout, Monsieur de Sainte Colombe ne définit la musique que de manière très imprécise. Mais peut-on définir la musique ? Les définitions de la musique données par Marin Marais et Sainte Colombe divergent car ils sont un rapport différent et personnel avec la musique. II) Une relation complexe et paradoxale à la musique

a) La musique et Sainte Colombe : Dans le livre comme dans le film Monsieur de St Colombe est montré comme très attaché à la musique, il semble quasiment vivre à travers elle. Elle est son seul moyen d’expression comme le dit Quignard PAGE 22 « « Le caractère de Monsieur de St Colombe et son peu de disposition au langage le rendaient d’une extrême pudeur et son visage demeurait inexpressif et sévère quoi qu’il en sentît. Il n’y avait que dans ses compositions qu’on découvrait la complexité et la délicatesse du monde qui était caché sous ce visage. » Cette définition du caractère de Sainte Colombe montre son incapacité à s’exprimer et à exprimer ses sentiments notamment avec ses filles. En effet il dit lui-même cette incapacité à dialoguer avec elles : PAGE 17 « il s’excusa une autre fois auprès d’elles de ce qu’il ne s’entendait guère à parler […] il n’avait guère d’attachement pour le langage ». La musique est donc la façon de libérer les paroles que St Colombe n’arrivent pas à dire et les sentiments qu’il n’arrive pas à montrer. Le seul lien réel qu’il entretient avec ses filles c’est lorsque St Colombe apprend à Madeleine la viole, mais Toinette fait des colères, elle est comme jalouse de la relation que sa sœur entretient avec son père. Pour la calmer il lui fait fabriquer une viole adaptée à sa taille. La musique occupe une place majeure dans la vie de Monsieur de Sainte Colombe comme il est dit PAGE 12 « St Colombe s’enferma chez lui et se consacra à la musique […] il s’exerça jusqu’à quinze heure par jour »

Sainte Colombe va même jusqu’à dire PAGE 74 qu’il mène une vie passionnée. On peut comprendre que c’est grâce à sa musique qu’il peut mener à bien cette vie passionnée qui s’oppose pourtant au personnage austère décrit dans le livre et montré dans le film. Il parle de sa musique PAGE 75 en disant « Ce que je fais, ce n’est que la discipline d’une vie ou aucun jour n’est férié. J’accomplis mon destin » Quignard en faisant dire ça à Monsieur de St Colombe renforce son amour pour la musique puisqu’il va même jusqu’à dire qu’elle est son destin c’est-à-dire ce pour quoi il est fait, la seule chose dont sa vie doit être faite. Mais Monsieur de Sainte Colombe a un rapport presque égoïste à la musique en refusant de publier ses œuvres et de se produire en publique. On peut penser qu’il considère la musique comme un art intime et personnel. Pourtant à la fin de l’œuvre il remet son livre rouge, où ses compositions sont écrites à Marin Marais, comme pour lui passer la relève. Cette fin est surprenante car durant toute l’œuvre Monsieur de Sainte Colombe n’a pas réellement voulu transmettre tout son savoir à Marin Marais, il lui dit même qu’il est un « petit musicien » PAGE 69. On peut se demander s’il en était jaloux. Il lui donne des leçons mais très vite il le chasse de chez lui. Et refuse même à sa fille mourante de jouer un air que Marais a composé pour elle. Lors de la scène où il lui remet le carnet rouge ; Sainte Colombe qualifie la leçon qu’il va donner à Marais de « première leçon » comme si ça allait être la première fois qu’il livrerait tout son art et son savoir faire à Marin Marais. b) La musique et Marin Marais Un autre personnage à un lien très fort avec la musique, c’est Marin Marais. En effet il vient demander des cours de viole à Sainte Colombe après avoir perdu sa voix de petit garçon. Son rapport avec la musique semble tout d’abord être tout autre que celui que Mr de Sainte Colombe. Marais semble chercher la gloire, l’argent et la reconnaissance. Il est doué pour la viole mais se fait vite chasser de chez les Sainte Colombe. Il continue à s’y rendre en cachette pour que Madeleine lui donne des cours. Marais et Madeleine semble entretenir une relation amoureuse au centre de laquelle se trouve la musique. Dans le film les scènes de leçon de musique entre Madeleine et Marais sont des scènes intimes, où ils sont seuls dans la chambre de Madeleine ou sous la cabane de Monsieur de Sainte Colombe. Marais compose même une musique pour Madeleine appelé « La rêveuse ». Marais semble progresser tout au long de l’œuvre quant à sa vision de la musique. Cette progression est symbolisée par le dialogue entre Marais et Sainte Colombe à la fin de l’œuvre PAGE 113-115. Marais énonce pour quoi il joue de la musique, il dit plusieurs choses à Sainte Colombe jusqu’à donner une définition qui soitt selon

Sainte Colombe, correcte de la musique. Dans le film cette progression est encore plus flagrante du fait que c’est Marais lui-même qui raconte son histoire et celle des Sainte Colombe, on le voit alors lorsqu’il est jeune et ne pense qu’à sa gloire auprès du roi, mais aussi lorsqu’il est âgé, peut-être même près de la mort, plein de regret en ce qui concerne la musique. A la fin du film lorsque Marais a fini de raconter l’histoire, Sainte Colombe lui apparait et lui dit qu’il a été fier de l’avoir eu pour élève, il lui demande de jouer l’œuvre qu’il avait composé pour sa fille. III) La musique et l’essence existentielle de la mort

1) Musique et agonie La musique semble des le début de l’œuvre liée à la mort car elle en accompagne l’agonie « Il était alors au chevet d’un ami de feu Monsieur Vauquelin qui avait souhaité mourir avec un peu de vin de Puisey et de