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La céremonie de Chabrol

Commentaire de texte : La céremonie de Chabrol. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  4 Décembre 2021  •  Commentaire de texte  •  1 439 Mots (6 Pages)  •  350 Vues

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Intro :

Au cinéma il est récurent de voir des adaptations d’œuvres littéraires remodelées selon la vision du réalisateur et nous avons donc l’habitude d’étudier la dualité de l’œuvre cinématographique en lien avec l’œuvre littéraire. Toutefois nous allons ici traiter la notion de littéraire au sein du film et non autour de sa conception. La Cérémonie de Claude Chabrol est un film adapté de L’Analphabète de Ruth Rendell, lui-même inspiré du fait divers des sœurs Papin. Quant à Short Cuts de Robert Altman, c’est un film adapté des écrits de Raymond Carver. Nous nous demanderons donc quelle est la place réservée à la littérature dans les films de Robert Altman et de Claude Chabrol. Dans La Cérémonie comme dans Short Cuts, la structure du film est comparable à des genres littéraires. Nous analyserons ensuite les références littéraires directes qui ponctuent La Cérémonie. Pour finir nous étudierons dans quelle mesure les deux films mettent en opposition la littérature et les autres médias et plus spécifiquement la télévision.

De nombreuses références intertextuelles font leur apparition au court du film La Cérémonie.
Dès le départ, à l’annonce de l’embauche de la « bonne » appelée Sophie, le père répond « Malheur ! » en entendant son nom, c’est évidemment une référence aux
Malheurs de Sophie. Ce roman pour enfants écrit par la comtesse de Ségur évoque les aventures de Sophie une petite fille aventureuse qui enchaine les bêtises avec la complicité de son cousin Paul. L’enfant est également amie avec Camille et Madeleine de Fleurville, de vraies petites filles modèles, Sophie tente de les suivre et de les imiter mais en vain, elle n’arrivera jamais à être une fille modèle à son tour. Tout comme nous le verrons au fil du film, Sophie Bonhomme se lie d’amitié avec la jeune postière Jeanne, ensemble elles badinent, d’abord Sophie s’enfuie de chez les Lelièvre sans les prévenir pour rejoindre Jeanne, puis toutes deux se comportent mal lors de leur collecte pour le secours catholique. Comme l’héroïne de ce roman pour enfants cherche à être une petite fille modèle, Sophie Bonhomme souhaite cacher de tous son analphabétisme, elle use de stratagèmes et de mimétismes afin de cacher son secret, elle fait semblant d’avoir besoin de lunettes pour qu’on ne la démasque pas. Cependant dans La Cérémonie comme dans Les Malheurs de Sophie, l’héroïne ne parviendra pas à se faire passer pour une autre bien longtemps, en effet dans La Cérémonie, Mélinda, la grande fille de la famille, ne tarde pas à démasquer puis dévoiler le secret de Sophie.

Plus tard dans le film, Sophie s’installe dans sa chambre et allume la télévision en attendant de rejoindre madame Lelièvre. Elle tombe alors sur ce qui semble être une série télévisée judiciaire, laquelle s’ouvre sur une citation de Vauvenargues « On ne peut être juste si l’on n’est humain ». Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues était un écrivain, moraliste et aphoriste français du 18ème siècle, ce philosophe se faisait une haute idée de l’homme. Outre l’allusion comique faite entre le nom de l’auteur (Luc de Clapiers) et celui de la famille (Lelièvre) cette citation a une haute portée symbolique dans le film. Comme beaucoup d’autres personnes éclairées de son siècle, Vauvenargues s’est battu pour l’égalité et la justice, pour que les nobles n’aient plus autant de privilèges qu’auparavant, au détriment du reste de la population. Cette citation présente dans La Cérémonie marque l’idée que la justice elle-même existe uniquement parce que l’on est humain. En effet si l’on souhaite être juste nous devons avoir conscience avoir conscience de ce qu’est un humain et du fait que des éléments extérieurs à sa nature peuvent diriger ses actes. Le spectateur va nécessairement devenir juge des personnages de Sophie et Jeanne et prendre en compte le mépris des Lelièvre à leur égard, toutefois il lui faut également noter le passé criminel des deux femmes. L’analphabétisme de Sophie explique-t-il son crime ? Afin d’être droit dans son jugement le spectateur doit se mettre à la place de la personne jugée. C’est certainement le souhait du réalisateur lorsqu’il nomme son personnage « Sophie Bonhomme » un nom commun pour une femme d’apparence commune, il est au premier abord très aisé de s’identifier à elle, son analphabétisme est la seule chose qui la distingue. Cette incapacité à lire et à écrire la rend donc attendrissante, c’est précisément cela qui trouble le jugement du spectateur quant à ses crimes.  Toutefois nous pouvons voir à plusieurs reprises les deux femmes plaisanter au sujet du décès de la fille de l’une et du père de l’autre. Ces scènes sont perturbantes car elles poussent le spectateur à réviser son jugement, « on ne peut être juste si l’on n’est humain » dans ce cas la violence du crime déshumanise-t-elle Jeanne et Sophie ? A ceci elles répondent « on a bien fait » comme si cet acte était justifié par toute la brutalité avec laquelle elles ont été traitées tout au long du film. En somme cette citation de Vauvenargues apparaissant au moment de l’installation de Sophie dans la demeure des Lelièvre semble annoncer ce qui va suivre et toute la dualité de ce récit.

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