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La descente d’Orphée

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née, moi, quand je suis allée là-haut.

Jenny : Tu es allée là-haut ?

Dolly : Oui. Et toi aussi Jenny.

Jenny : Je n’ai jamais dit que je n’y étais pas allée. La curiosité, c’est humain.

Dolly : Tu sais l’impression que ça m’a fait ? Une prison ! Je te jure, ça n’a pas du tout l’air d’un endroit où vivent des blancs.

Jenny : Eh bien moi, ça ne m’étonne pas. Job a acheté cette femme.

Dolly : Acheté ?

Jenny : Ouais. Il l’a achetée, et pour pas cher, parce qu’elle avait été plaquée par David... Tu sais le frère de Carol Cutrere. Oh comme il était… Mm !... ce qu’il était beau ! Eh bien, il l’a quittée l’été où la « Brigade mystique » a mis le feu à la guinguette du père de Lady parce qu’il avait servi de l’alcool à des nègres. Et le père de Lady a été brûlé vif pendant l’incendie.

Dolly : Seigneur, ayez pitié de nous !

Carol Cutrere entre en riant.

Dolly : Quand on parle du loup…

Jenny : Il y a des gens qui semblent ignorer que le magasin est fermé…

Dolly : Tu comprends, toi, qu’on veuille se donner un air aussi grotesque ?

Jenny : Il y a des gens qui feraient n’importe quoi pour qu’on les remarque.

Carol va au téléphone.

Carol : « Donnez-moi le 0370, à la Nouvelle-Orléans… » à Constance qui arrive. Bonjour, Bébé.

Constance : Je m’appelle Constance.

Carol : Bonjour, Constance.

Constance : Bonjour… Aux autres. Pourquoi est-ce qu’elle est pieds nus ?

Jenny : La dernière fois qu’on l’a arrêtée sur la route, il paraît qu’elle était toute nue sous son manteau.

Carol : Au téléphone. « Bon j’attends ! » Aux femmes. J’ai pris mon talon dans ce trottoir de bois pourri, et ça l’a cassé net. Il paraît que si on perd son talon le matin, ça veut dire qu’on trouvera le grand amour avant la tombée de la nuit. Peut-être que je trouverai le grand amour avant l’aube, n’est-ce pas trésor ? Au téléphone. « Continuez à sonner s’il vous plaît. A cette heure-ci il est saoul. Ca prend beaucoup de temps de traverser le salon à quatre pattes… »

Constance : Quelle déchéance ! Ca vaut la peine d’être vu !

Carol : Bertie ? Salut chéri !... Tu as buté sur quelque chose hein ?... Voilà je suis sur la route et tout est arrangé… Oui, on me rend ma pension à condition que je ne remette plus les pieds ici …Oui, je suis arrivé au dîner avec les yeux peints en vert, l’air complètement folle… Il a fallu que je fasse un peu de chantage… Je te retrouverai au Star avant la fermeture des boîtes de nuit… Bye bye !...Elle raccroche et va fouiller derrière le comptoir.

Constance : Qu’est-ce que vous cherchez, Carol ?

Carol : Des balles pour mon revolver.

Dolly : Elle n’a pas de permis de port d’armes.

Jenny : Elle n’a pas non plus de permis de conduire.

Constance : Il faudra parler de ça au shériff quand il reviendra de la gare.

Carol : Dites-le lui mesdames. Je lui ai déjà fait savoir que s’il essaie encore de m’arrêter sur la route, je réglerai l’affaire avec lui à coups de revolver.

Cri de panique de Constance, un sorcier entre.

Dolly : Faites-le sortir ! Il va jeter un sort sur mon enfant !

Jenny : Oh, ta gueule, Dolly. C’est le sorcier fou de Montagne bleue. Il ne ferait pas de mal à une mouche.

Carol : Viens ici grand-père, montre-moi ce que tu as là. Oh ! C’est un os. Non je ne veux pas le toucher, il n’est pas nettoyé, il y a encore de la chair collée dessus. Il faut le laisser longtemps au soleil et sous la pluie, alors ce sera un bon talisman, n’est-ce pas ? Oncle Cornu, fais-nous entendre le cri Choctaw.

Constance : Pas ici ! Ne le faites pas hurler ici !

Carol : Vas-y, grand-père, tu connais le cri !

Carol commence à crier puis le sorcier. Val apparaît comme si le cri l’avait évoqué.

Carol : Merci, grand-père. Carol lui donne un dollar.

Jenny : Fous le camp sorcier ! Sors d’ici sale bête !

Eve Talbott entre dans la boutique. Elle porte une de ses toiles.

Eve : Est-ce qu’il fait vraiment très sombre ici, ou est-ce que je deviens aveugle ? Oh… J’ai peint toute la journée ; je me suis arrêtée juste une minute pour prendre un café. Il fallait profiter de ma vision tant qu’elle était nette et claire. Mais il n’y a rien de plus épuisant. Ca vous vide de l’intérieur. Comment allez-vous, Dolly ?

Dolly : Bien, Mme Talbott.

Eve : Tant mieux. Et vous, Jenny ?

Jenny : Ca va…

Eve : Job et Lady sont arrivés ?

Constance : Le train de Memphis a du retard.

Eve : Bon. J’arrive juste à temps. Heureusement que j’ai apporté mon tableau. Ceux qui ont frôlé la mort aiment ce qui leur rappelle le souffle de l’invisible. Hein ? C’est l’ascension du Saint Esprit !...

Dolly : Vous ne lui avez pas fait de tête.

Eve : La tête était une flamme resplendissante… c’est comme ça que je l’ai vue… dans ma vision.

Dolly : Qui est ce jeune homme ?

Eve : Oh pardon ! Je suis si fatiguée… M. Valentin Xavier, Mme Hamma et Mme… Pardonnez-moi, Jenny…

Jenny : Je vous pardonne. Je m’appelle Binnings.

Eve : Et Mme Temple. M. Xavier n’est pas d’ici. Son auto est tombée en panne cette nuit pendant la tempête et je l’ai fait coucher dans la prison. Il cherche du travail et je vais le présenter à Lady, parce que si Job ne peut plus travailler, ils vont avoir besoin de quelqu’un pour le magasin.

Jenny : Très bonne idée…

Dolly : Très…

Jenny : Viens. Ils ont dû s’arrêter en revenant de la gare. Elles sortent

Eve : Je vais accrocher le tableau dans la chambre de Job…

Constance : Ca lui fera une surprise. Elle sortent

Carol : Qu’est-ce que vous faites ?

Val : J’arrange la boucle de ma ceinture, mademoiselle.

Carol : Les garçons dans votre genre sont toujours en train d’arranger quelque chose. Vous pourriez arranger ma chaussure ?

Val : Qu’est-ce qu’elle a votre chaussure ?

Carol : Pourquoi faites-vous semblant de ne pas me reconnaître ?

Val : Il est difficile de reconnaître quelqu’un qu’on voit pour la première fois.

Carol : Alors pourquoi aviez-vous l’air si effrayé quand vous m’avez vue tout à l’heure ?

Val : Vous me bouchez la lumière mademoiselle.

Carol : Oh ! Pardon… Je peux voir votre bracelet montre ?

Val : Hein ? Il le cache.

Carol : Ca ne fait rien. Je l’ai vu. C’est le chronomètre Rolex de mon cousin Bertie. Je ne dirai rien, mais s’il le faut un jour, je peux prouver que je vous connais… C’était le réveillon à la Nouvelle-Orléans…

Val : Il me faudrait une paire de petites pinces…

Carol : Vous portiez cette veste. C’est moi qui vous ai parlé la première. Je l’ai touchée et j’ai dit « En quoi est-ce ? » et quand vous avez dit que c’était de la peau de serpent, j’ai dit « Vous auriez dû me prévenir avant que je la touche ». Et vous avez répondu que ça m’apprendrait à ne pas fourrer mes mains partout. J’étais saoule et il était trois heures du matin… Vous avez pris votre guitare et vous avez commencé à chanter, puis vous avez fait la quête. Pas de rectification jusqu’à maintenant ?

Val : Pourquoi est-ce que vous voulez tellement prouver que je vous connais

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