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Arret Blanco

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On a pu noter l’émergence d’une nouvelle interprétation de l’arrêt Blanco (I) qui a été affirmée vigoureusement dans le sens d’une responsabilité plus générale et absolue (II).

I- L’atténuation du sens primitif de l’arrêt Blanco

La tendance à la « socialisation » des risques, permettant une indemnisation plus facile des victimes de l’administration, a pris corps dans l’apparition de la responsabilité de l’Etat du fait de ses agents (A) et s’est développée dans le déclin d’exigences bénéficiant à l’Etat (B).

A/ La coexistence des responsabilités : du cumul des fautes au cumul des responsabilités

Selon l’arrêt Blanco, la responsabilité n’est « ni générale ni absolue » et obéit à des règles propres « selon les besoins du service ».

Donc : exigence d’une faute de l’agent administratif.

Mais si le dommage était systématiquement imputé au fonctionnaire et réparé par les tribunaux judiciaires, il y aurait empiètement d’un ordre sur l’autre.

Ainsi intervient l’arrêt Pelletier, en 1873 : distinction de la faute personnelle (détachable de la fonction de l’agent) de la faute de service, traitée devant les tribunaux administratifs et engageant la responsabilité des personnes publiques.

L’arrêt Pelletier introduit, par sa distinction des fautes, un système de non cumul des responsabilités. En effet, les deux responsabilités s’excluaient l’une l’autre, celle de l’administration ne jouant qu’en cas de faute de service.

Or les victimes de fautes personnelles ne pouvaient souvent se voir dédommager, du fait de l’insolvabilité de l’agent auteur de la faute. Se fait donc une évolution en deux temps.

Premièrement apparition du principe de cumul des fautes (arrêt Anguet, CE, 1911), selon lequel deux fautes, l’une personnelle, et l’autre de service, avaient pu concourir à la réalisation du préjudice. Dans ce cas, le juge admettait que la victime choisisse quelle responsabilité, de celle de l’Etat ou de celle de l’agent, elle voulait engager.

Deuxièmement apparition du principe de cumul des responsabilités, dans le cas duquel une seule faute intervient à l’origine du préjudice, et ce peut être une faute personnelle (arrêt Lemonnier, CE, 1918). Selon ce principe de cumul des responsabilités, la responsabilité de l’Etat pourra être admise si l’agent a commis la faute personnelle au moyen des instruments ou de la puissance donnés par le service.

Ainsi la victime pourra-t-elle obtenir réparation beaucoup plus facilement : que ce soit en cas de faute double, selon le principe de cumul des fautes, ou en cas de faute unique personnelle, selon le principe du cumul des responsabilités, ce qui la protège de l’insolvabilité de l’agent fautif.

De plus, la victime n’a maintenant plus, dans certains cas, à craindre l’exigence de faute lourde.

B/ Le déclin de l’exigence de faute lourde et le renversement de la charge de la preuve

La faute administrative, entraînant normalement la responsabilité, présente par rapport à la faute civile des caractères originaux. Contrairement aux règles de droit commun, la faute de l’administration n’entraîne pas toujours la responsabilité. Dans un certain nombre de cas, cette dernière n’est engagée qu’en cas de faute lourde, cette exigence répondant à la logique de l’arrêt Blanco selon laquelle la responsabilité administrative ne saurait être ni générale, ni absolue.

La limitation de la responsabilité à la faute lourde peut se justifier par la difficulté technique de l'activité, la nature régalienne du service et le souci moral d'effacer les effets d'un comportement scandaleux.

Mais l’une des caractéristiques les plus récentes du droit de la responsabilité administrative est le rétrécissement du champ d'application de la faute lourde. De nos jours en effet, l'exigence d'une faute lourde recule au bénéfice de la faute simple.

Si l’exigence de faute lourde subsiste notamment en matière de services de police, de services fiscaux et de services pénitentiaires, elle a été écartée en ce qui concerne la responsabilité hospitalière, le Conseil d’Etat ayant admis la responsabilité pour faute simple (arrêt M. et Mme V, CE, 1992) ; et les services de secours et de sauvetage en commençant par l’arrêt de section du Conseil d’Etat de 1997 dit arrêt Theux.

Avec le déclin de l’exigence de faute lourde, on a aussi assisté à l’assouplissement du régime de la preuve. En effet, la preuve de la faute incombe communément au demandeur, qui est la victime. Or, en matière administrative, la preuve se trouvera souvent dans les dossiers de l’administration. C’est ainsi que différentes réformes interviendront, facilitant la preuve, telles que celles obligeant l’administration à motiver ses décisions (loi du 17 juillet 1979) ou permettant l’accès aux documents administratifs (17 juillet 1978).

Plus fondamentalement, lors du procès, le juge pourra ordonner à l’administration de produire certains documents (CE, décembre 1988, PTT). Dans certains cas, la jurisprudence a même renversé la charge de la preuve en établissant une présomption de faute. Actuellement, cette dernière n’intervient qu’en cas de responsabilité de l’hôpital public (notamment CE, décembre 1988, Henri Cohen).

L’attaque du caractère ni général, ni absolu de la responsabilité administrative, a dépassé le stade de la simple interprétation large de cette expression, laquelle semble actuellement totalement obsolète.

II- La disparition des derniers vestiges du principe d’irresponsabilité

Dans la tendance à l’indemnisation facile, on a admis la responsabilité de l’administration en l’absence de faute (A’). Plus largement encore, bien que le sujet se limite à la responsabilité de l’administration tandis que l’arrêt Blanco, cité par le sujet, dispose de la responsabilité de l’Etat, on notera l’apparition de cette dernière en dehors du pouvoir exécutif (B’).

A’/ L’apparition de la responsabilité administrative sans faute

La notion de faute était exigée pour engager la responsabilité de l’administration, et ce avec certaines exigences qui, selon la « socialisation » des risques, ont connu un déclin certain.

Toujours selon ce principe, a été développée la responsabilité sans faute. Elle existait déjà en droit civil des obligations, dans l’obligation de réparation des accidents de travail établie par la loi du 5 juillet 1985 relative à l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation. On assiste là à un rapprochement majeur des régimes de responsabilités administrative et civile. En effet, la victime, pour engager la responsabilité, n’aura qu’à démontrer un préjudice et son imputabilité à l’administration, laquelle ne pourra s’exonérer que par la force majeure ou par la faute de la victime, de manière identique que dans le droit commun.

On a expliqué l’établissement de la responsabilité sans faute par deux théories. La première, la théorie du risque, que Eisenmann a appelé « la corrélation entre avantages et charges », dispose que l’administration, exerçant une activité qui va lui rapporter du profit mais qui crée en même temps un risque de dommage pour autrui, se doit d’assumer les conséquences de cette activités, bonnes ou mauvaises, récoltant ainsi le profit, mais engageant de même sa responsabilité en cas de préjudice.

La seconde, la théorie de la rupture de l’égalité devant les charges publiques, dispose que l’action administrative, bien qu’intervenant pour l’intérêt général, lèse parfois une ou plusieurs personnes, lesquelles ont droit à réparation.

Les deux théories se valent, et sont applicables sans s’exclure l’une l’autre.

La responsabilité sans faute a été établie par la jurisprudence en matière de risque professionnel (citons comme référence de la responsabilité sans faute l’arrêt Cames du Conseil d’Etat du 21 juin 1895), de responsabilité du fait de choses dangereuses et du fait d’activités dangereuses, en matière hospitalière, de refus d’exécution des décisions de justice, et en matière de responsabilité du fait de certaines mesures d’ordre économique et social.

Le législateur, quant à lui, est intervenu concernant la responsabilité sans faute en matière de risques professionnels, de dommages causés par des attroupements et rassemblements, de dommages de guerre, d’accidents de préparation militaire,

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