Critique d'une toile de Hedwin Holgate

d orangé. Le peintre cherche à présenter son sujet de manière moderne, moins purement figurative, pour mieux donner un effet de chaleur et de lumière lui rajoutant de la vie. Le style se montre bien adéquat, restant réaliste et gardant le sujet comme thème central, tout en lui donnant une image chaude et lumineuse. Cette toile ressort donc des autres portraits de l'artiste où il identifiait plus clairement ses sujets et les peignait dans un cadre plus réaliste. Il s'agit peut-être d'un exercice de style pour le peintre qui peindra de nombreuses scènes de nu féminin en extérieur. Scènes le plus souvent très lumineuses et joyeuses et ne définissant pas leur modèle ou le lieu. Pourtant là encore la toile ne peut se montrer bien relier avec ces peintures, puisque le sujet reste très différent et que le choix de sa présentation semble particulier à cette toile. Elle reste une inconnue, un portrait chaleureux et lumineux, sans qu'on puisse dire si le peintre l'a inventée, lui qui était connu pour tout autant aimer faire des portraits que d'imaginer des scènes de nu tiré de son imagination.

La lumière fragmentée semble surgir du tableau, concentré sur la naissance de la poitrine à la base du cou et sur le visage, tombant sur celui-ci de face et plongeant le cou et la chevelure dans l'ombre. Le bas de l'oeuvre est donc moins lumineux ainsi bien sûr que le côté gauche de la toile, s'assombrissant progressivement. Les ombres ne sont pas nettement découpées, il s'agit de taches progressivement plus sombres ne servant qu'à mettre un peu de relief dans la toile. La lumière est douce, pas véritablement jaillissante si on la compare à d'autres toiles de Holgate (telles les baigneuses). Elle permet une atmosphère tendre (presque de couleur pastel), lumineuse, chaleureuse, équilibrée, le sujet étant baigné et donc mis en valeur par cette lumière. La couleur valorise les teintes chaudes, fraiches et brillantes, soutenues plutôt que saturées. Celle-ci reste donc agréable sans devenir agressante, attirant l'oeil sans le fatiguer. Le peintre fait des effets de dégradé, avec son fond par exemple qui s'assombrit, créant une impression de profondeur faisant se détacher le sujet de celui-ci. La texture de la toile est encore sensible, presque visible, on peut aussi voir les petits coups courts de pinceau du peintre sur les grandes surfaces, tandis qu'avec les détails du visage ceux-ci disparaissent presque. La texture du fond en devient plus complexe, morcelée. La ligne est noire et mince, permettant de séparer le sujet du fond et de le faire encore un peu plus ressortir. Elle est moins marquée que dans des toiles plus vieilles telles son Professeur de mathématique (datant de 1924), mais moins que ses toiles ultérieures ou elle disparaîtra peut à peu, telles les baigneuses (datant de 1937).

Les lèvres d'un rouge vif, sont un bon exemple de cette vitalité intrinsèque à la toile, elles ont la forme d'un coeur vermeil renversé et se démarquent sur une peau plus pâle, leur rouge sombre criant la vigueur. La lèvre supérieure s'avance au-dessus de l'autre, piquée d'un point plus clair, plus mince que la lèvre inférieure. Celle-ci est rebondie, ronde, rehaussée d'une touche de rose tirant au blanc. Elles sont entrouvertes, donnant l'impression d'être relaxé, relâché, contribuant ainsi à l'ensemble de l'expression du visage et de l’impression donnée par la toile. Elles sont magnifiquement rendues, assez réalistes, et ressortent de l'ensemble du visage pour s'avancer un peu avec le menton. Le trait y est plus discret et la couleur s'y oppose avec le fond. Justement, le fond présente aussi un certain intérêt à être regardé de plus proche. Le fond de la toile du bord droit, s'éclaircit pour montrer que c'est bien de là que provient la lumière, d'un orange jaune, il devient plus lumineux. Les contours de cette tache de lumière sont irréguliers et indéfinis, délimité seulement par le coup de pinceau, ici plus visible, que le peintre a donné sur la toile, formant de petites vagues lumineuses, des traits courts montrant sa technique alors qu'il colorait la toile, rajoutant sa couleur par-dessus une autre plus sombre et d'autres couleurs sombres chevauchant encore celle-ci.