« Le Roi se meurt » d’Eugène Ionesco
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nous donne en spectacle, est la seule expérience existentielle que tous les spectateurs
sont sûrs de devoir vivre (dans un futur et des circonstances indéfinis) et ce partage crée
des liens intenses (peut-être pour certains « élus » même cathartiques) de solidarité, de
fraternité, et consacre une communion d’esprit, tout au long de la cérémonie.
Le Roi se meurt est une œuvre complexe, plurielle, qui « touche » individuellement et universellement. C’est une œuvre qui pose des questions et nous confronte avec l’absurdité
de la vie ; une œuvre de réflexion, de révélation aussi, certainement pas d’explication. En
classe, il convient de la traiter avec pudeur, mais aussi avec courage, afin de prémunir
les élèves, sans pour autant les immuniser mentalement et moralement, contre le Doute,
l’Angoisse et le Désespoir.
Les pages qui suivent vous proposent un assortiment d’outils didactiques répartis en
cinq entités ou unités complémentaires et par là cohérentes, mais modulables, transfé-
rables et adaptables, qui permettent de « travailler » la pièce en amont (avant le spectacle) ou en aval (après le spectacle). Pour chaque unité, je précise (par étape) les objectifs
prioritaires, je développe une procédure didactique possible et je vous offre quelques
échantillons d’exercices, ainsi que quelques conseils pour une mise en pratique rentable.
Pour d’autres modèles d’exercices et d’activités passe-partout pour l’exploitation didactique de textes de théâtre, je vous renvoie à mon article dans Romaneske n°3, 2000.
Unité 1 : Rideau rouge et tableau noir
1. Un diagnostic optimiste
L’école et le théâtre ont longtemps entretenu des rapports ambigus de complicité et/ou
de conflit. Les professeurs (de FL1, FL2 ou FLE), privilégiant, pour des raisons littéraires, les textes au détriment des autres aspects signifiants d’une pièce de théâtre, acheminaient en masse leurs pupilles aux représentations des « grands classiques », sans essayer
de les sensibiliser à la totalité du spectacle. Les compagnies, privilégiant, pour des raisons viagères, alimentaires, un public d’abonnés fidélissimes ayant quitté depuis plus ou
moins longtemps les bancs de l’école, se dévouaient à programmer des matinées scolaires, sans essayer de motiver vraiment les jeunes spectateurs.
Durant la dernière décennie du 20
e
siècle et en ce début du 3
e
millénaire, la situation a
heureusement changé : l’école et le théâtre ont engagé un dialogue accordé et loyal qui a
résulté en un partenariat constructif. Certains théâtres mettent même tout un dispositif
au service des enseignants : des équipes et des dossiers pédagogiques, des rencontres
avec les metteurs en scène et les comédiens, des représentations exemplatives pour professeurs, etc.
De là à savoir ce que les principaux intéressés, les élèves, en pensent, il y a encore un
seuil, capital et essentiel à franchir. Respecter ses élèves, c’est tenir compte de leurs
remarques.
Le petit test diagnostique suivant peut vous aider à savoir ce que pensent les élèves qui
vous sont confiés à propos du théâtre en général et des représentations en langue fran-
çaise auxquelles ils ont déjà assisté. Notez que le volet a) ne vise qu’à décapsuler des
réactions instantanées formulées en un français plus ou moins correct ou à la limite en
néerlandais. Notez aussi que le volet b) propose des paramètres pêle-mêle, en vrac,
pour ne pas influencer les élèves, aborde le sujet « positivement » (on ne demande pas
ce qu’ils n’ont pas aimé !) et ne comporte pas de possibilité d’ajouter d’autres paramè-
tres (évitant ainsi des réponses telles que « parce que la salle était bien chauffée »,
« parce que le cours de physique tombait », « parce qu’on peut dormir plus confortablement au théâtre qu’en classe » ou l’aveu de raisons
...