Peut On Avoir Peur d'Écrire Son Autobiographie
Mémoires Gratuits : Peut On Avoir Peur d'Écrire Son Autobiographie. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoirests. Certains drôles, certains douloureux, certains déplaisants, c’est pour cette raison qu’il s’en rappelle sans avoir à pénétrer au plus profond de sa mémoire. L’autobiographe doit donc reconstruire à partir de bribes de souvenirs son passé ayant pour point d’encrage les moments les plus marquants. Il y a donc une reconstruction du passé ou deux choix se présentent à l’auteur : soit il doit supposer sans mentir pour parvenir à raconter son enfance, soit il doit mentir sans que le lecteur sans aperçoive. Annie Ernaux est encore un bon exemple dans ce cas de figure car elle décrit une époque où elle n’était encore qu’un nouveau-né. Cependant, elle ne ment pas, elle émet seulement des suppositions : « Chaque membre de la famille a dû en recevoir un tirage ».
D’autres auteurs vont jusqu’au mensonge, bien qu’ils s’en défendent, pour donner aux lecteurs un aperçu de leur vie. Rousseau dans la quatrième promenade de son écrit autobiographique Les rêveries du promeneur solitaire évoque la rédaction des Confessions et « avoue » : « cette mémoire me manquait souvent ou ne me fournissait que des souvenirs imparfaits et j’en remplissais les lacunes par des détails que j’imaginais en supplément de ces souvenirs, mais qui ne leur étaient jamais contraires. Je disais les choses que j’avais oubliées comme il me semblait qu’elles avaient dû être. » Même si Rousseau à maintes reprises affirme qu’il ne ment pas, il déforme la vérité ce qui constitue pour le lecteur un mensonge.
Ces auteurs vont donc jusqu’à outrepasser le pacte autobiographique pour raconter leur vie. Ils ne disent pas la vérité et ne sont donc pas dignes de confiance.
La vérité peut aussi être une des multiples peurs de l’autobiographe. En effet, on peut avoir peur de dire la vérité sur certains de ses actes, pour ne pas choquer les bonnes mœurs ou encore pour donner une bonne image de soi. Peu d’autobiographies ont été écrites par des tortionnaires, des meurtriers ou encore par des gardiens de camps de concentration. Mais aussi, on peut avoir peur de redécouvrir des souvenirs enfouis qui feraient remonter des souffrances personnelles par exemple. Primo Lévi dans Si c’est un homme raconte sa vie durant la seconde guerre mondiale et plus particulièrement sa détention dans le camp de concentration d’Auschwitz. De tels souvenirs ne sont même pas concevables et on comprend pourquoi les personnes ayant vécu des horreurs pareilles se taisent et ne veulent plus y repenser. Plus légèrement, Annie Ernaux dans La place se remémore la mort de son père, événement qu’il l’a touchée. En effet, elle écrit ce roman autobiographique pour lui. Se souvenir d’événements tristes, traumatisant est une véritable épreuve, c’est pour cela que la recherche et la confrontation à la vérité peuvent faire obstacle à l’autobiographe.
Un autre obstacle pourrait être la peur de blesser ses proches. En effet, dire la vérité sur une époque, ses impressions face à des événements marquants, ou encore sur ses parents peut faire du mal aux autres. Michel Leiris dans son autobiographie L’âge d’homme raconte l’ablation de ses végétations quand il avait cinq ou six ans et analyse l’impact de ce traumatisme sur sa vie d’adulte. Ses parents lui ayant caché où ils iraient, l’emmenèrent chez un chirurgien. Celui-ci, assisté du médecin de famille, pratiqua l’intervention. Dans son esprit d’enfant, tous les adultes étaient ligués contre lui. La lecture d’une telle anecdote par les parents de Michel Leiris, s’ils étaient encore en vie au moment de la parution, les aurait peut-être culpabilisés. De même, Patrick Modiano dans Un pedigree reproche à ses parents leurs attitudes vis-à-vis de sa personne. Le moment où son père appelle la police et le fait arrêter est le passage le plus frappant à mon sens pour décrire la dureté paternelle.
Ecrire une autobiographie implique de parler de soi et de ceux qui nous entourent. Certains pour ne pas blesser ou encore pour donner une bonne image d’eux mêmes vont être amenés à déformer la vérité ou à mentir par omission et passer des pans entiers de leur histoire sous silence. Rousseau, maître dans l’art de la mystification du lecteur et dans l’autograndissement, en est la preuve. Ainsi dans le dîner à Turin qui apparaît dans Les Confessions, il ne cesse de se grandir. François René de Chateaubriand dans Mémoires d’outre-tombe, quand il revient sur son projet affirme : « Je ne dirais de moi que ce qui est convenable à ma dignité d’homme et, j’ose le dire, à l’élévation de mon cœur. Il ne faut présenter au monde que ce qui est beau. » L’auteur cachera ses mauvaises actions contrairement à Rousseau.
Chateaubriand voulait être à la hauteur des attentes de ses lecteurs qui désiraient « triompher de la pauvre nature humaine ». Souhaiter plaire aux lecteurs est une préoccupation pour l’autobiographe. En effet, les lecteurs ont des attentes précises en ce qui concerne une autobiographie. Ils recherchent, par exemple, des témoignages sur une époque : La promesse de l’aube de Romain Gary nous offre un véritable témoignage sur la seconde guerre mondiale. Les lecteurs veulent aussi revivre des moments qu’ils ont vécus dans le passé. On est toujours heureux de retrouver des sensations, des objets ou des moments oubliés que seul l’autobiographe peut faire revivre de sa plume. Nombreux sont ceux qui ont vécu dans leur enfance des peurs nocturnes : Nathalie Sarraute dans Enfance arrive admirablement bien à raconter ces terreurs d’enfants.
Mais l’autobiographe peut subir une autre peur, celle de ne pas être à la hauteur de ses prédécesseurs. En effet, de nombreux écrivains ont rédigés des autobiographies depuis Rousseau et, pour les égaler, il faut avoir des événements poignants, marquants, exceptionnels à raconter surtout si l’auteur n’a pas la prétention d’être un héros comme Romain Gary ou Roald Dahl. Tous deux, engagés dans l’aviation durant la seconde guerre mondiale aux côtés des alliés, ont côtoyé des êtres exceptionnels. Le lecteur qui lit Escadrille 80 ou La promesse de l’aube ne peut qu’éprouver du respect envers ces hommes.
Cependant rares sont les héros et donc pour se démarquer une seule solution reste à
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