Voltaire, Histoire Des Voyages De Scarmentado Écrite Par Lui-Même (1756)
Note de Recherches : Voltaire, Histoire Des Voyages De Scarmentado Écrite Par Lui-Même (1756). Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresre de l’autodafé, Scarmentado en décrit les acteurs. On trouve la même précision pour décrire le cachot « meublé d’un lit de natte et d’un beau crucifix » ou pour désigner l’attitude des inquisiteurs : « Ils m’embrassèrent ». Scarmentado décrit le cortège selon son point de vue à l’époque des faits. La focalisation interne (l’étude des points de vue est essentielle) donne à voir la scène à travers son regard et nous sommes, avec lui, placés dans la foule. Le nombre des moines est à la fois traduit par « armée » mais aussi par l’énumération des différents habits hétéroclites dans une suite de juxtapositions : « blancs, noirs, gris, chaussés, déchaussés, avec barbe… »
Transition : Le conteur se sert de ces péripéties, de cette couleur locale pour nous mettre au cœur de l’action, et le philosophe pour nous donner des leçons de sagesse à travers le miroir déformant de l’ironie.
Deuxième axe : l’ironie
Parler avec légèreté de ce qui est grave, dire le contraire de ce qu’on pense pour faire comprendre son véritable point de vue, voilà la marque de l’ironie voltairienne, arme efficace qui utilise l’art du détour.
Scarmentado examine en spectateur curieux et candide la diversité des usages et des croyances des hommes. Il les enregistre ici, même les plus horribles, avec une impassibilité étonnante sans faire de réflexion sur ce qu’il voit : « je m’imaginais que nous allions voir quelque carrousel ou quelque fête de taureaux ». Au détour d’une phrase, cependant, il se laisse aller à un commentaire qui, sans en avoir l’air, fait tomber les masques. Les détails contradictoires qui décrivent les moines laissent voir un défilé de pantins mécaniques et cocasses. Avec une naïveté exemplaire, Scarmentado ne réagit pas devant l’horreur des supplices auxquels il assiste ou aux menaces qui pèsent sur lui. Avec une candeur qui témoigne de son manque d’expérience face aux travers des hommes, il exprime à contretemps des considérations positives là où elles sont déplacées : les « belles prières » et le « dévotement » ont du mal à cohabiter avec le raffinement des tortures puisque les suppliciés sont « brulés à petit feu ». De plus, il ne trouve rien à redire à son « cachot très frais » avec un « beau crucifix ». Son emprisonnement dans les geôles de l’Inquisition n’est mentionné que par une formule ironiquement laconique : « Je restai là six semaines ». On peut pourtant aisément imaginer que ses six semaines ont été terribles. Cachot et prison deviennent par antiphrase « des appartements » dans lesquels Scarmentado est simplement mal logé. Ainsi notre voyageur dans son innocence nous en donne-t-il une image caricaturale : ses représentants se comportent avec une politesse doucereuse : on l’« envoya prier », « tendrement ». Une fois encore on pourra noter le contre-emploi ironique de l’adverbe « sincèrement ». Le comble de l’ironie est atteint lorsque le père inquisiteur dit à son prisonnier : « qu’une autre fois il espérait que je serais plus à mon aise ». Cette innocence feinte ou réelle permet à Voltaire de mettre en place un décalage propice à la réflexion.
Transition : L’ironie, installant un monde qui a la tête en bas, propose du même coup un monde sens dessus dessous favorable à une analyse critique.
Troisième axe : les cibles de Voltaire
Dans ce texte, Voltaire aborde quelques-uns des grands thèmes du combat philosophique propre aux Lumières à savoir la lutte contre toutes les formes d’intolérance et contre la tyrannie des dogmes.
Dans cet épisode, l’Inquisition est la cible principale de Voltaire. Partout où passe Scarmentado, sa liberté et son libre-arbitre sont contrecarrés par des autorités religieuses intolérantes et répressives. Le fanatisme, les préjugés, le pouvoir de la monarchie, les superstitions mènent le monde que traverse Scarmentado. Les hommes intolérants ne supportent pas la différence. Les victimes sont des juifs ou des chrétiens, c’est dire si l’Inquisition frappe dans tous les sens ; personne ne peut donc se penser à l’abri. Les actes répréhensibles qui sont énoncés figurent la dénivellation incroyable entre le prétendu crime et la terrifiante sanction : on peut perdre la vie dans d’effroyables souffrances pour ne pas avoir « adoré Notre-Dame d’Atocha ». L’anticléricalisme de Voltaire transparaît dans la description satirique de « armée de moines » qui précède les condamnés ou dans le comportement sournois des inquisiteurs : c’est pour avoir été dénoncé par « un grave Espagnol » que Scarmentado se retrouve au cachot mais on ne lui dira rien des raisons de son arrestation. En effet, des hommes le « menèrent sans (lui) dire un seul mot, dans un cachot très frais ». Ce silence des bourreaux est une marque de leur cruel pouvoir.
Ce cancer de la cruauté touche tout le monde : de la famille royale « extrêmement édifiée » par le supplice, au peuple qui se presse au spectacle et chante «
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