Baudelaire - parfum exotique

la nature donne des arbres singuliers et des fruits savoureux » vers 5-6). Bien entendu, on y voit un paradoxe voulu par Baudelaire : puisque l’île concilie fertilité et oisiveté. On remarque donc ici deux composantes du paradis Baudelairien : l’exotisme et la sensualité. Le vers 6 et la structure syntaxique renforcent l’harmonie.

Un vers, le 7ème, met l’accent sur la beauté et la santé physique des hommes à laquelle répond la vertu des femmes. Toutefois « étonne » vers 8, précise que cette innocence n’a plus lieu d’être dans notre civilisation et que Jeanne DUVAL, comme toute femme de couleur, se révèle franche.

Pendant le premier tercet, la vision passe de l’île au port, lieu de voyage, de grand départ. Le port est un lieu protégé, mouvementé, mais aussi un lieu d’expansion et donc un endroit propre à incarner le rêve, le voyage. C’est dans ce sens que Baudelaire utilise l’mage portuaire. Il utilise les assonances en –a- et en –oua- qui cherchent à mettre de l’harmonie. D’ailleurs, la très grande richesse des rimes aux vers 12 et 14 fait écho au vers 6 et connote donc la générosité de l’île, lieu d’expansion et de bien être. Ce bien-être est caractérisé par un jeu de correspondance entre les relations (synesthésie : propre au symbolisme). Il y a en effet dans les vers 2 et 3, un lien étroit entre l’odorat et la vue. « Quand » permet de mettre en symétrie les vers 2 et 3 par l’utilisation au début de l’hémistiche de deux verbes « je respire » et « je vois ». Cette symétrie rappelle la toute puissance du parfum qui engendre une vision d’exotisme. Ainsi, du vers 3 à 4, on passe de l’odorat à la vue. Tout cela laisse à penser que le sens du toucher est exacerbé. Au vers 6 « les fruits savoureux » évoquent le goût ; le vers 10 la sensation visuelle ; le vers 12 celle de l’odorat (olfactive) ; et enfin au vers 14, l’ouïe « le chant des mariniers ». La rêverie s’épanouie en fonction de toutes ses sensations. Elles sont mises en relief par un jeu d’écho exprimé par les assonances et les allitérations (au vers 6 allitération aux deux derniers vers). On peut souligner que le dernier vers met en avant l’audition et donc permet de passer du plan sensuel au plan spirituel. Le champ caractérise en effet le souvenir de voyage de Baudelaire.

La recherche d’idéal se trouve au sein d’un sonnet classique (quatrains, tercets). Mais les caractéristiques esthétiques de Baudelaire et du symbolisme permettent une correspondance entre les sensations et une élévation du plan spirituel, sur le plan de la conscience. Pour Baudelaire, le bonheur ne peut exister que par cette recherche d’idéal et l’intermédiaire d’une rêverie. C’est pour cela qu’il utilise la figure de Jeanne DUVAL qui, à son sens, permet d’illustrer, de caractériser, cette sensation de bien-être cette beauté idéale.