Les propositions et les obstacles à la réforme du conseil de sécurité de l'ONU
Dissertation : Les propositions et les obstacles à la réforme du conseil de sécurité de l'ONU. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Tatoune008 • 18 Mars 2020 • Dissertation • 6 970 Mots (28 Pages) • 911 Vues
« Les propositions et les obstacles à la réforme du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies »
Le Conseil de sécurité des Nations Unies est l'objet de nombreuses critiques qui nourrissent le désir d'instaurer une réforme efficace. Sur ce point, en mars 2005, Kofi Annan, ancien secrétaire général de l'ONU, soulignait qu' « il est nécessaire de modifier la composition de Conseil de sécurité afin qu'il soit plus largement représentatif de la communauté internationale dans son ensemble et des réalités géopolitiques modernes, et acquière ainsi une plus grande légitimité aux yeux de la communauté internationale ».
En vertu de l'article 2 paragraphe premier de la Charte des Nations Unies, le droit international reconnaît le principe de l'égalité souveraine de tous les États, principe en vertu duquel tous les États disposent théoriquement des mêmes droits et des mêmes devoirs internationaux. Néanmoins, force est constater que les États les plus puissants ont toujours cherché à imposer des exceptions à cette règle, en particulier dans des domaines sensibles comme le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Ainsi, l'appartenance des grands États à des organisations internationales semble avoir été conditionnée par cette reconnaissance d'un statut privilégié au sein de l'organisation. Le principe de l'égalité souveraine des États connaît par conséquent des exceptions, et le Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies paraît être la plus flagrante d'entre-elles.
Le Conseil de sécurité se compose de 15 membres, dont 5 membres permanents, à savoir la Chine, les États-Unis d'Amérique, la Fédération de Russie et le Royaume-Uni, ainsi que 10 membres élus par l'Assemblée générale des Nations Unies pour un mandat de 2 ans, membres qui sont actuellement l'Angola, le Chili, l'Espagne, la Jordanie, la Lituanie, la Malaisie, le Nigeria, la Nouvelle-Zélande, le Tchad et la République bolivarienne du Vénézuela. En outre, le Conseil de sécurité est l'organe le plus puissant du système des Nations Unies. Assurément, il est le seul compétent pour constater la violation par un État de ses obligations en matière de respect de la paix et de la sécurité internationale et, à ce titre, il peut décider un embargo économique, ou, dans les cas les plus extrêmes, des actions militaires. Ces prérogatives sont exercées conjointement par les 15 de ses membres mais il convient de souligner que la caractéristique principale du Conseil de sécurité est d'être composé de 5 membres permanents, ce qui représente également une particularité. En effet, il aurait pu être imaginé la mise en œuvre d'un mécanisme permettant une rotation optimale au sein de ce Conseil, cela de sorte que tous les États aient la possibilité d'exercer une influence propre sur les questions de sécurité internationale.
De plus, et surtout, ces cinq membres permanents disposent d'un droit de veto. L'article 27 paragraphe 3 de la Charte des Nations Unies prévoit à cet effet que « les décisions du Conseil de sécurité, sur des questions autres que de procédure, sont prises par un vote affirmatif de neuf de ses membres dans lequel sont comprises les voix de tous les membres permanents ». Cette exigence de vote affirmatif fut assouplie par la suite par un avis de la Cour internationale de Justice en date du 21 juin 1971 sur les « Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie » selon lequel l'abstention d'un membre permanent n'empêche pas l'adoption d'une décision. Cependant, il faut bien reconnaître que les 5 membres permanents se voient reconnaître un pouvoir exorbitant par l'intermédiaire de la Charte, cela à travers le droit de veto qu'elle leur reconnaît, ce pourvoir étant en mesure, et il l'a toujours été, de paralyser complètement l'action des Nations Unies sur certaines questions importantes de sécurité internationale. A ce titre, bien que ce même article 27 paragraphe 3 de la Charte prévoit, en contrepartie, qu'un État partie à un différend s'abstiendra de voter si une procédure de règlement pacifique des différends est en cours, il est nécessaire de remarquer que la pratique a dénaturé plus qu'appliqué cette disposition, 18 cas de non application de cette règle ayant été relevés pour la période 1948-1990.
Face à une telle situation, il paraît aisément compréhensible que des voix se soient toujours élevées pour exiger une modification du système, soit par la suppression des prérogatives des membres permanents, soit, le plus souvent, par l'augmentation du nombre de ces membres permanents. Parmi les principales critiques émises à l'encontre du Conseil de sécurité, son manque de représentativité est régulièrement mis en exergue car sa composition actuelle et les modalités de cette composition ne refléteraient plus la société internationale contemporaine. Effectivement, d'une part il existe une perception répandue selon laquelle la composition du Conseil de sécurité n'est pas bien équilibrée géographiquement. A ce sujet, par exemple, l'Afrique qui rassemble à elle seule plus d'un quart des membres de l'ONU n'est toujours pas représentée par un membre permanent au Conseil de sécurité, tout comme l'Amérique latine ou les Caraïbes. Ensuite, certains pays réclament une meilleure prise en compte de leur poids économique et politique ainsi que de leur contribution à l'ONU, à l'image de l'Allemagne et du Japon qui figurent parmi les plus grands contributeurs financiers de l'ONU. Il faut également ajouter que la composition du Conseil de sécurité n'a pas été modifiée depuis les années 1960. Alors que l'ONU comptait originellement 51 membres lors de sa création en 1945, elle en comptait 114 en 1963 suite à l'adoption de la résolution 1991 le 17 décembre par l'Assemblée générale des Nations Unies, résolution qui engendra l'ajout de 4 nouveaux membres non permanents au Conseil de sécurité pour porter le total à 15 membres. Aujourd'hui, l'ONU compte 193 États-membres mais la composition du Conseil de sécurité demeure inchangée.
Pour toutes ces raisons, beaucoup affirment que le fossé entre les réalités internationales et les membres permanents du Conseil de sécurité menacerait la légitimité de ce dernier, cela de sorte que beaucoup réclament un Conseil de sécurité plus représentatif, responsable, légitime, démocratique, équitable et efficace. Face à ce besoin urgent de réforme, de nombreuses suggestions ont été faites ces dernières années quant à la manière dont pourrait être réformé le Conseil de sécurité, tant de la part des groupes de travail mis en place par l'ONU que des groupes d’États formés en son sein. La plupart recommande un élargissement en ce sens qu'une meilleure représentation des régions sous-représentées augmenterait la légitimité du Conseil de sécurité. Les critiques craignent toutefois que sa capacité à agir efficacement ne s'en trouve encore plus affaiblie. Ce tiraillement entre légitimité et efficacité représente un grand obstacle dans le processus de réforme laborieusement mis en place.
En conséquence, le fait que les différentes propositions se bloquent mutuellement complique encore davantage le problème. En plus des divergences d'intérêts qui peuvent exister entre les membres non permanents et les membres permanents du Conseil de sécurité, ainsi qu'entre les membres non permanents eux-mêmes, une transformation du Conseil de sécurité requiert un amendement de la Charte des Nations Unies, ce qui exige non seulement une majorité de deux tiers à l'Assemblée générale mais aussi une ratification de l'amendement par les deux tiers des membres, les 5 membres permanents du Conseil de sécurité devant tous l'approuver. Du fait de ce blocage institutionnel et normatif, aucune des propositions de réforme émises n'a pu franchir cette barrière jusqu'à présent. Il semblerait alors cohérent de pouvoir attribuer cet échec au cercle constitué par les 5 membres permanents qui font preuve, en théorie, d'une certaine disposition à un élargissement modéré du Conseil de sécurité, mais qui, en pratique, n'ont aucun intérêt à ce que le système actuellement mis en place vienne à être modifié, car il emporterait l'abolition des privilèges qui leur sont actuellement accordés.
Conséquemment, il semblerait relativement pertinent de s'interroger sur la chose suivante : une profonde réforme du Conseil de sécurité tendant à une meilleure représentation de la situation internationale actuelle est-elle possible dans un système dans lequel l'Organisation des Nations Unies paraît fonctionner de manière à mettre en place un déséquilibre en faveur des membres permanents du Conseil de sécurité ?
Pour mener à bien à cette étude, au regard de ce qui fut précédemment présenté, il paraîtrait relativement cohérent d'examiner d'abord en quoi une réforme du Conseil de sécurité semble se heurter à de nombreux obstacles institutionnels du fait de la prééminence des pouvoirs et des intérêts de ses membres permanents au sein de l'Organisation des Nations Unies (I), afin d'être en mesure d'apprécier par la suite en quoi les différentes propositions émises par les membres non permanents, c'est à dire ceux qui souhaitent avant tout une réforme complète du Conseil de sécurité, paraissent contradictoires et semblent devoir se résigner face à l'hégémonie des membres permanents de celui-ci si elles souhaitent un jour apporter un changement, aussi minime soit il (II).
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