Les espaces frontaliers en France

« Les frontières ne sont que des coups de crayons sur des cartes. Elles tranchent des mondes mais ne les séparent pas. On peut parfois les oublier aussi vite qu’elles sont tracées. ». Nous définissons la frontière comme une limite qui sépare deux zones, une limite de séparation établie, très nette et souvent matérialisée dans l’espace comme nous pouvons l’observer avec les postes frontières. Néanmoins les critères que nous prenons en considération pour définir cette limite rendent son tracé flou et variable. Chaque frontière est entourée de part et d’autre d’espaces frontaliers. L’espace frontalier est ainsi soumis aux contraintes nationales et peut se trouver en partie frêné dans son développement par une position excentrée favorisant la discontinuité spatiale du territoire et le retard économique. Cela est d’autant plus vrai en France étant donné que son centre d’impulsion se trouve être sa capitale Paris. Toutefois nous pouvons aussi remarquer que la France est caractérisée par sa position stratégique au sein de l’Europe. Cela suppose des échanges de natures variées avec les pays qui l’entourent. De plus l’utilisation du terme espace implique des contours indéfinis et généralement indéterminés. Nous étudierions ici les espaces frontaliers continentaux de la France, excluant ainsi ses façades maritimes. Comment cet espace souvent marginalisé s’intégre-t-il au territoire ? Nous verrons que les caractéristiques variables des espaces frontaliers influent sur leurs dynamiques respectives de plus en plus valorisées mais qui générent aussi des disparités et des tensions.

Ainsi la France possède plusieurs espaces frontaliers plus ou moins éloignés les uns des autres. Elle partage des frontières terrestres avec six pays voisins qui sont la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, l’Italie et deux Etats, Monaco et Andorre. Les espaces frontaliers qui les entourent, présentent des caractéristiques différentes et donnent lieu à des situations diverses. Le climat est un des éléments qui permet la distinction de ces espaces. La France métropolitaine se trouve dans une zone tempérée. Néanmoins cette zone englobe aussi des régions climatiques variées. Ainsi Lille se trouve dans le climat océnanique de type breton tandis que Metz, Strasbourg et Mulhouse sont situées dans le climat semi-continental. Ce climat ne concerne ensuite plus le Jura qui comme les Alpes et les Pyrénées sont marqués par le climat montagnard. Nice, située dans l’extrême sud-ouest de la France continentale et à seulement trente kilomètres de la frontière italienne est quant à elle concernée par le climat méditerranéen. Nous remarquons donc que les différents climats présents en France permettent déjà d’établir une certaine délimitation des ensembles géographiques.

De plus le relief peut également former une limite bien nette et constitue donc une frontière « naturelle ». Cette notion désigne les montagnes, les fleuves et les côtes mais est aujourd’hui assez controversée chez les géographes. Ainsi le Rhin sert de frontière entre la France et l’Allemagne. Ce fleuve qui traverse plusieurs pays est ainsi considéré comme un fleuve d’Europe et joue un rôle économique important puisqu’il constitue un axe de transport et d’échange. C’est ainsi une des voies navigables les plus fréquentées au monde. La frontière entre la France et l’Espagne est matérialisée par une chaîne de montagnes, les Pyrénées. Cette frontière constitue un obstacle aux échanges entre les deux pays. Elle limite le développement des transports transfrontaliers ainsi que les échanges de part et d’autre de la frontière. Les points de passage sont peu nombreux et le nombre de travailleurs frontaliers y est d’ailleurs moins important que pour d’autres espaces frontaliers. Cette problématique est par conséquent largement prise en compte dans les discussions entre acteurs transfrontaliers. Alors si certaines frontières matérialisées dans l’espace peuvent servir d’atout aux dynamiques des espaces frontaliers, d’autres peuvent au contraire empêcher l’évolution de ces espaces comme nous l’avons vu avec les Pyrénées. En effet les espaces frontaliers continentaux en France ne sont pas tous intégrés de la même manière au territoire.

Les espaces frontaliers ont ainsi acquis de nouvelles logiques de fonctionnement depuis la construction européenne. La nouvelle centralité européenne modifie les rapports entre les pays et les enjeux économiques et politiques. La frontière se définit alors progressivement comme une interface entre les espaces et non plus comme une stricte séparation. Cela donne cours à une évolution vers des réseaux de villes et des agglomérations transfrontalières, qui constituent un enjeu essentiel étant donné qu’elles associent une métropole puissante à une autre ville moins développée se trouvant de l’autre côté de la frontière. C’est le cas avec Strasbourg-Kehl. Ces procédés réduisent progressivement le caractère marginalisé des régions qui sont situées à proximité des frontières. Cela est aussi représenté par le cheminement vers l’espace transfrontalier qui est composé de deux territoires distincts mais devenus complémentaires. Cet espace met en valeur les échanges, la mobilité des personnes et des biens. Les espaces frontaliers sont davantage pris en compte dans la logistique du pays et leur mise en valeur devient un enjeu territorial. Par conséquent des structures ont été créées dans ce but, telles que l’Association des Régions Frontalières Européennes. Des représentants des régions frontalières se réunissent pour améliorer la coopération transfrontalières. Elles viennent notamment en aide aux collectivités qui se heurtent à des difficultés d’intégration.

En effet certaines dynamiques sont plus développées que d’autres. La Guyane française située sur le continent sud-américain et qui partage des frontières communes avec le Brésil et Surinam, connaît une situation d’enclavement institutionnel et politique. Néanmoins il existe un projet de pont transfrontalier avec le Brésil qui améliorerait le réseau routier de