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Aubugne , les tragiques « france mere affligee »

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nces douces [u]) - Vers 12 : "Ayant dompté longtemps en son cœur son ennui" (opposition entre les allitérations de début de vers en [d] et en [t] et l'allitération en [s] de la fin) - Vers 18 : "si bien que leur courroux par leurs coups se redoublent" (le redoublement des coups est mimé par les assonances en [u] et les allitérations en [k] et [r].

C. L'union des 2 thèmes dans la prosopopée finale

Les 2 lexiques se rejoignent dans une horrible union formulée dans les paroles de la France à la fin (vers 31 à 34) : l'union du sang et du lait

- "Vous avez (…) ensanglanté / le sein qui vous nourrit" : v. 31-32 : association mise en valeur par l'enjambement.

- "Je n'ai plus que du sang pour votre nourriture" v. 34

TRANSITION

L'allégorie de la mère affligée frappe l'imagination par la violence des images du combat entre 2 frères. Si l'on ressent autant cette violence, c'est que l'auteur ne néglige pas les procédés d'amplification.

II - LES PROCEDES D'AMPLIFICATION

En étant engagé au service d'une cause, l'écrivain refuse de rester simple spectateur d'un fait historique : il veut convaincre son lecteur, le persuader et l'émouvoir. C'est pourquoi les procédés d'amplification ont une importance déterminante dans son écrire.

A. Figures de l'exagération

* vers 14 "Rend à l'autre un combat dont le champ est la mère" = le corps de la mère métamorphosée en champ de bataille

* La gradation : v. 15-16 : "soupirs…cris…pleurs" = on est dans la recherche du sublime

* L'imprécation finale (ou prosopopée) qui donne une tournure tragique et grandiloquente au texte

 Bilan : Ces tournures contribuent à prouver au lecteur l'importance du sujet et la force de conviction du poète. B. Reprises de type anaphorique produisant de puissants effets oratoires

* Répétition emphatique du démonstratif v. 7 : "Ce voleur… cet Esau"

* Répétition mise en valeur en début de vers de "ni" v. 15-16 (anaphore)

* Reprise insistante du possessif "leur" v. 17, 18, 19, répétée phonétiquement en écho par "pleurs, malheur, douleur, cœur…"

 Bilan : Un effet oratoire certain qui dramatise volontairement le ton du texte et le rend très solennel.

C. Les rythmes confèrent aussi de l'ampleur à l'évocation

* Le souffle puissant de l'alexandrin soutenu par des enjambements amplificateurs : v. 13-14, 19-20, 27-28…

* Parfois ce souffle est volontairement brisé de façon à créer des effets de surprise et d'insistance : après l'annonce solennelle des vers 1 et 2, les vers 3, 4 et 5, par leur rythme brisé introduisent la violence et le désordre.

Conclusion : Sans s'engager en tant que tel dans le texte (il ne dit qu'une fois "je" au vers 1) le poète donne la mesure de son engagement par la force des paroles rédigées qui donnent au texte une tournure solennelle qui n'élude jamais la notion de violence et de souffrance.

III - L'ENGAGEMENT D'AUBIGNE EN FAVEUR D'UN CAMP

A. Utilisation des figures bibliques pour marquer son engagement personnel dans le conflit

Dans la Bible (Genèse, verset XXV), Jacob, le cadet, le préféré du père, a racheté le droit d'aînesse à Esaü (pour un plat de lentilles), ainsi dépossédé de son héritage.

* "Esaü" est "le plus fort, orgueilleux" v. 3 : il symbolise l'Eglise catholique, l'aîné qui agit d'abord sans rencontrer la résistance. Voir le lexique dévalorisant : "ce voleur acharné…" v. 7

* v. 11 : la révolte de l'opprimé introduit une transformation dans le récit : Jacob symbolise le parti protestant, dont la cause est présentée comme légitime : "ayant dompté longtemps en son cœur son ennui", "sa juste colère" v. 12-13, "celui qui a le droit et la juste querelle" v. 26

 A priori, d'Aubigné se situe donc clairement dans le camp des Protestants (fidèle en cela à son engagement).

B. Une seule vraie victime : la France

Mais, en réalité, la position du protestant d'Aubigné n'est pas aussi manichéenne qu'on peut le croire : si la balance penche en faveur du plus jeune, cependant, la prosopopée finale condamne les 2 frères : "sanglante géniture" v. 33

L'idée majeure du texte : c'est la France qui se stérilise et s'empoisonne de ce combat fratricide :

- "vivez de venin", "Je n'ai plus que du sang pour votre nourriture" v. 34-35

- "aux derniers abois de sa proche ruine"

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