Montaigne, Essais, III, VI « Des coches », 1588.

Parcours : « Notre monde vient d’en trouver un autre »

Montaigne, Essais, III, VI « Des coches », 1588.

Notre monde vient d'en trouver un autre (et qui nous garantit que c'est le dernier de ses frères, puisque les Démons, les Sibylles et nous, avons ignoré celui-ci jusqu'à cette heure ?) non moins grand, plein et fourni de membres que lui, toutefois si nouveau et si enfant qu'on lui apprend encore son a, b, c ; il n'y a pas cinquante ans qu'il ne savait ni lettre, ni poids, ni mesure, ni vêtements, ni céréales, ni vignes. Il était encore tout nu dans le giron de sa mère nourricière et ne vivait que par les moyens qu'elle lui fournissait. Si nous concluons bien quand nous disons que nous sommes à la fin de notre monde, et si ce poète fait de même au sujet de la jeunesse de son siècle, cet autre monde ne fera qu'entrer dans la lumière quand le nôtre en sortira. L'univers tombera en paralysie ; l'un des deux membres sera perclus, l'autre en pleine vigueur. Nous aurons très fortement hâté, je le crains, son déclin et sa ruine par notre contagion et nous lui aurons fait payer bien cher nos idées et nos techniques. C'était un monde enfant ; pourtant nous ne l'avons pas fouetté et soumis à notre enseignement en nous servant de l'avantage de notre valeur et de nos forces naturelles ; nous ne l'avons pas non plus séduit par notre justice et notre bonté, ni subjugué par notre magnanimité. La plupart de leurs réponses et des négociations faites avec eux témoignent qu'ils ne nous devaient rien en clarté d'esprit naturelle et pertinence. La merveilleuse magnificence des villes de Cuzco et de Mexico, et, entre plusieurs choses pareilles, le jardin de ce roi, où tous les arbres, les fruits et toutes les herbes, selon l'ordre et grandeur qu'ils ont en un jardin, étaient excellemment façonnés en or, comme, dans son cabinet, tous les animaux qui naissaient dans son État et dans ses mers ; et la beauté de leurs ouvrages en pierreries, en plume, en coton, dans la peinture, montrent qu'ils ne nous étaient pas non plus inférieurs en habileté. Mais, quant à la dévolution, l'observance des lois, la bonté, la libéralité, la loyauté, la franchise, il nous a bien servi de n'en avoir pas autant qu'eux ; ils se sont perdus par cet avantage, et vendus et trahis eux-mêmes.

Adjectifs coordonnés soulignés par l’intensif : font ressortir l’idée de nouveauté et de jeunesse -> métaphore de l’enfance qui est développée dans la suite du texte et reprise plus tard dans l’expression « monde enfant »

• On considère tous au long du texte le NM comme un monde enfant d’une certaine façon inferieur à l’AM

Proposition consécutive : fait référence à l’univers d’enfance

• M considère le nouveau monde comme un enfant qui vient juste de naitre

Négation + répétition de « ni » 

• insiste sur l’ignorance des éléments de base des sociétés européennes

Métaphore de la nature comme mère nourricière (périphrase métaphorique), protectrice (image du giron)

• Le nv monde vit grâce à la nature

Négation absolue : seule la nature leur apporte de quoi survivre

• Monde enfant pas encore instruit

Montaigne choisie une image anthropomorphe

X

Verbe indique que M résume, tente analyser

• M passe d’une situation, d’un exemple, à une idée ⬄ raisonnement inductif

Conj. Sub introduit une prop. Sub de condition ou d’hypothèse

• Ce n’est qu’une hypothèse

Opposition, antithèse entre l’AM et le NM : « entrer, sortit », « fin, lumière »

• AM s’efface pour laisser place au NV

X

Parallélisme de construction

• On insiste sur la décadence de l’AM

Métaphore anthropomorphe : NM est comme un adulte en plaine possession de ses moyens et AM est comme un vieillard condamné à l’immobilisme

X

Philosophe + Européen

Métaphore médicale et hyperbolique : M poursuit un raisonnement anthropomorphe

• l’AM contamine le NM par sa culture = culture présentées comme un virus

On perçoit un paradoxe définissant un renversement des valeurs