L'Ordre Juridique Français, Conception Moniste Ou Dualiste Des Rapports Entre Droit International Et Droit Interne ?
Rapports de Stage : L'Ordre Juridique Français, Conception Moniste Ou Dualiste Des Rapports Entre Droit International Et Droit Interne ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresest que la traduction imparfaite. Le droit objectif a pour unique fondement les nécessités sociales. Dès lors, il est inexact de parler de diversité des sources du droit interne et du droit international. Ces deux droits ont la même source, et visent les mêmes sujets, puisque les individus demeurent in fine les destinataires de la norme.
Si cette opposition théorique présente un grand intérêt, c’est qu’elle a des conséquences pratiques sur l’imbrication du droit interne et du droit international au sein de l’Etat : elle commande à la fois le mode d’introduction de normes internationales dans l’ordre interne, et indirectement leur place au sein de ce dernier. Cependant, il convient de souligner que la distinction entre monisme et dualisme n’a de sens que du point de vue de l’ordre interne puisque du point de vue de l’ordre international, le droit interne est considéré comme relevant du domaine du fait juridique. Cela explique d’ailleurs pourquoi certains débats tenant à la hiérarchie entre droit interne et droit international sont par nature insolubles, notamment s’agissant des rapports entre la norme suprême de droit interne et le droit international.
Il convient, enfin, dans l’étude des rapports entre droit international et droit interne, de distinguer entre le droit international général, ayant une vocation universelle mais une autorité très incertaine, et le droit international conventionnel, issu des traités, ayant une portée relative mais une valeur clairement affirmée. Enfin, au sein même du droit international conventionnel, il convient de souligner le particularisme du droit de l’Union européenne, qui constitue, comme la Cour de Justice des Communautés européennes a pu l’affirmer en 1963 dans l’arrêt Van Gend en Loos, « un ordre juridique propre, spécifique, distinct à la fois de l’ordre juridique interne des Etats membres et de l’ordre international ».
Tenant compte de ces importantes distinctions, nous pourrons envisager l’intégration conditionnée (I), puis la position intermédiaire (II) du droit international dans l’ordre juridique interne français.
I. L’intégration conditionnée du droit international dans l’ordre interne
Si le droit français n’exige pas la réception du droit international dans l’ordre interne et permet son intégration (A), cette intégration obéit cependant à certaines exigences (B).
A. L’absence de mécanisme de réception du droit international dans l’ordre interne
Selon la conception dualiste, droit international et droit interne sont deux ordres juridiques indépendants et séparés. Dès lors, un traité ne peut produire d’effets en droit interne que s’il y est introduit par un mécanisme juridique qui en opère la réception.
Remarquons d’emblée qu’un tel système ne vaut que pour les conventions internationales et n’a jamais été appliqué s’agissant de la coutume internationale et des principes généraux du droit, qui s’intègrent de plein droit au droit interne.
La réception du traité intervient notamment sous la forme d’une norme nationale reprenant les dispositions exactes de la norme internationale. On parle alors de « nationalisation » du traité. Ses dispositions seront appliquées par le juge national non pas en tant que règles de droit international mais bien en tant que règles de droit interne.
Un tel système existe au Royaume-Uni, où les juridictions ne peuvent appliquer les traités internationaux que dans la mesure où ils ont été incorporés dans une loi du Parlement. En tant que tels, les traités n’ont aucune valeur en droit interne.
Rien de tout cela en France, où le traité s’intègre dans le système de règles que doivent appliquer les juridictions nationales. Dès 1946, La Constitution de la IVe République affirmait que « les traités régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi sans qu’il soit besoin d’autres dispositions législatives que celles qui auraient été nécessaires pour assurer sa ratification ». La Constitution de 1958 confirme cette conception moniste des rapports entre droit international et ordre juridique interne, affirmant en son article 55 que « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois ».
Les mesures autorisant la ratification ou l’approbation, prévues à l’article 53 de la Constitution (cf. infra I. B.), ne sauraient être assimilées à des mesures de réception du droit international dans l’ordre interne. En effet, elles visent à donner au Parlement une faculté d’examen du traité en cause, et n’ont pas pour objet de réceptionner la norme internationale en droit interne à l’issue d’un processus de « nationalisation » du traité.
La conception française des rapports entre droit international et droit interne a beau être d’inspiration moniste, le traité ne s’insère pas de plein droit dans l’ordre juridique interne. En effet, s’il n’est pas nécessaire d’adopter des mesures de réception, il existe cependant des règles contraignantes tenant à l’intégration de la norme internationale dans l’ordre interne.
B. L’existence d’un cadre de règles gouvernant l’intégration du droit international dans l’ordre interne
La Constitution de 1958 pose, en son titre VI, un cadre de règles relatives à l’intégration du droit international dans l’ordre interne.
Les traités et accords internationaux rentrant dans le champ de l’article 53 de la Constitution (traités de paix, de commerce, relatifs à l’organisation internationale, engageant les finances de l’Etat, modifiant des dispositions législatives, relatifs à l’état des personnes, comportant cession ou adjonction de territoire), « ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi ». De tels traités sont considérés comme trop importants pour pouvoir être conclus en forme simplifiée. C’est pourquoi leur signature n’emporte pas l’engagement de l’Etat, qui ne sera effectif qu’à compter de la ratification. Il est arrivé que le Parlement refuse de voter une loi autorisant la ratification d’un traité. L’exemple le plus marquant à cet égard remonte à la IVe République, lorsque l’Assemblée Nationale refusa d’autoriser la ratification du projet de Communauté européenne de défense, en août 1954.
Le vote d’une loi autorisant la ratification n’est donc pas qu’une simple formalité. D’ailleurs, l’article 55 de la Constitution subordonne la supériorité des traités à la loi au caractère « régulier » de leur ratification ou de leur approbation.
Le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, veille au respect de ces disposition constitutionnelles, comme en témoigne l’arrêt rendu en son Assemblée le 18 décembre 1998 SARL du parc d’activité de Blotzheim, qui précise que « les traités ou accords relevant de l’article 53 de la Constitution et dont la ratification ou l’approbation est intervenue sans avoir été autorisée par la loi, ne peuvent être regardés comme régulièrement ratifiés ou approuvés au sens de l’article 55 [de la Constitution] ». Les prérogatives du Parlement en matière de droit international doivent impérativement être respectées par l’exécutif, sous peine d’annulation des décrets de publication. Une telle sanction pourrait avoir de fâcheuses conséquences du point de vue de la crédibilité internationale de la France, car son respect impliquerait une violation du principe pacta sunt servanda.
Outre cette nécessité d’une ratification régulière, la Constitution pose en ses articles 54 et 55 deux autres règles tenant à l’intégration du traité dans l’ordre interne. L’article 54 de la Constitution, constitue une limite en ce qu’il subordonne la ratification de traités contraires à la Constitution à une révision constitutionnelle (cf. infra II, A, 2°). La réserve de l’« application par l’autre partie » posée par l’article 55 de la Constitution soulève quant à elle un certain nombre de questions : faut-il distinguer les traités bilatéraux des traités multilatéraux, en admettant la réserve dans le premier cas et en l’excluant dans le second ? Il semble en réalité que le véritable critère de distinction soit ailleurs : si la réserve de réciprocité concerne, en principe, l’ensemble des traités, certains y échappent en raison de leur contenu (ainsi, les traités relatifs aux droits de l’Homme). Il convient de souligner ici la singularité profonde du droit de l’Union qui exclut, en pratique, cette réserve de réciprocité par le biais de mécanismes contraignants : les Etats membres sont toujours tenus de respecter leurs engagements.
L’ordre juridique français se caractérise donc par une conception moniste des rapports entre droit international et droit interne, en permettant, sous certaines conditions, l’intégration des normes issues du droit international dans l’ordre interne. Cette conception moniste soulève alors la question de la place réservée au droit international dans la hiérarchie des normes internes. Car s’il n’est pas possible de parler de hiérarchie dans un système dualiste, celle-ci existe dans tout système moniste. Elle peut donner la primauté au droit interne, où au contraire placer le droit international au-dessus de lui. L’ordre juridique français semble conférer au droit international une position intermédiaire.
II.
...