Test de lecture cursive sur Le Chercheur d'or de Jean-Marie Gustave Le Clézio et son corrigé

CORRIGÉ DU TEST DE LECTURE CURSIVE SUR LE CHERCHEUR D’OR (1985)

I Un roman d’aventures ? (7 pts)

1. a) À partir de quand le rêve du père de découvrir un trésor devient-il véritablement l’obsession d’Alexis ? (1 pt) Après la destruction de la maison familiale du Boucan par un cyclone et l’anéantissement du projet paternel d’électrification de cette partie de l’île Maurice, les L’Étang se voient forcés de vivre à l’intérieur des terres dans des conditions plus que rudes. C’est à ce moment qu’Alexis va reprendre en héritage le rêve paternel de découvrir le trésor du Corsaire inconnu. 

b) Quelle fonction existentielle l’obsession d’Alexis remplit-elle ? (1 pt) La rêverie d’Alexis autour du Corsaire inconnu remplit une évidente fonction de compensation après la ruine du domaine familial : « Il partageait ma vie, ma solitude. Dans l’ombre froide et pluvieuse de Forest Side, puis au Collège Royal de Curepipe, c’était avec lui que je vivais vraiment. » (« Forest Side », p. 103)

2.   Ce roman est-il celui d’une quête réussie ? (1 pt) Le bilan événementiel de la quête d’Alexis se révèle en somme très mince : le héros ne sera parvenu ni à découvrir le trésor du Corsaire inconnu, ni à refonder le domaine familial grâce à ce trésor.

3.  Quelle image de l’Europe et de sa civilisation se dégage du roman ? (2 pts) De l’Europe et de sa civilisation se dégage du roman une image négative avec l’exploitation coloniale (assurée dans le roman par l’oncle Ludovic et son fils raciste, Ferdinand) des indigènes et des ressources naturelles à l’île Maurice et à Rodrigues et avec le déluge de feu de la Première Guerre mondiale, à laquelle participe Alexis.

4. Quelle image des peuples indigènes se dégage du roman ? (2 pts) À l’inverse des Européens, les indigènes de Maurice ou de Rodrigues sont vus de façon positive dans le sens où ils vivent en harmonie avec le milieu naturel. D’autre part, Le Clézio laisse transparaître son engagement en leur faveur parce qu’ils sont les victimes de la cupidité des Occidentaux, dont Alexis et sa sœur, Laure, ont honte.

II Un roman d’initiation ? (4 pts)

5.  Précisez comment Denis et Ouma jouent un rôle d’initiateurs à l’égard d’Alexis. (2 pts) Les deux personnages de Denis et d’Ouma jouent chacun un rôle d’initiateur auprès d’Alexis dans le sens où ils représentent une culture différente de celle d’Alexis. Denis, le petit-fils de Cook (ancien esclave noir), est l’aîné et l’ami d’Alexis. Tout en le protégeant, « il a la garde de [s]on âme » (« Enfoncement du Boucan, 1892 », p. 15), il l’initie aux secrets de la nature, aux noms de la faune et de la flore : « Les leçons de Denis sont les plus belles. Il m’enseigne le ciel, la mer, les cavernes au pied des montagnes, les champs en friche où nous courons ensemble […] » (ibid., p. 38). Ouma est une métisse née d’un père manaf et d’une mère bengalaise, qui vit avec les « marrons » (esclaves noirs fugitifs) dans les hauts de Rodrigues. Elle assume les fonctions de protection en soignant Alexis d’une insolation (cf. « Rodrigues, Anse aux Anglais », p. 205), mais aussi nourricières en pêchant et en accommodant le poisson. Surtout elle prend l’initiative de la relation amoureuse. Ouma incarne une Laure débarrassée d’un amour exclusif et jaloux.

6.  Quelles leçons Alexis a-t-il retiré de son aventure à Rodrigues ? (2 pts) De son aventure à Rodrigues, Alexis a retiré les leçons suivantes. Le trésor pourrait être l’amour comme le suggère cette phrase : « Je voudrais parler à Laure de Nada the Lily, que j’ai trouvée au lieu du trésor, et que est retourné dans son île. » (« Mananava, 1922 », p. 374) À moins que ce ne soit la beauté du monde que la mémoire fixe en nous : « Avec elle [Mam] je voudrais parler à voix basse de ces choses qui ne finissent pas, notre maison au toit d’azur, fragile, transparente comme un mirage, et le jardin plein d’oiseaux où vient la nuit, le ravin, et même l’arbre du bien et du mal qui est aux portes de Mananava. » (Ibid.).

III Un roman mythologique ? (4 pts)

7. Comparez les première et dernière phrases du roman. Quelle conclusion en tirez-vous sur l’organisation interne du roman ? (1 pt). En comparant les première et dernière phrases du Chercheur d’or, l’on observe la présence du bruit de la mer comme si la vie du narrateur-personnage avait formé durant les trente ans de l’action du roman, compris entre 1892 et 1922, une sorte de boucle. Le Clézio préfère en effet le temps cyclique plutôt que le temps historique linéaire considéré comme facteur de l’aliénation de l’humanité.

8. Comment Le Clézio réécrit-il, dans la première section « Enfoncement du Boucan, 1892 », la chute du paradis terrestre ? (1 pt) La douleur d’avoir été chassé du domaine familial est exprimée par Alexis au moyen de références au paradis terrestre : « […] nous perdons tout cela, la grande maison du Boucan où nous sommes nés […] et ce jardin touffu comme l’Éden […]. » (« Enfoncement du Boucan, 1892 », p. 99).

9. Comment Le Clézio réécrit-il l’expédition mythique de Jason et des Argonautes  ? (1 pt) Alexis fait lui-même le rapprochement entre sa quête et celle de la toison d’or par Jason à la tête des Argonautes. Il cite les vers de Valerius Flaccus (« Vers Rodrigues, 1910 », p. 139) et pense à Typhis le marin du navire Argo. La nuit, il cherche l’étoile Argo et songe à la galère grecque : « Je pense à Argo, et le pont du Zeta est autre, se transfigure. » (Ibid., p. 181).