Descartes, « Changer Mes Désirs Plutôt Que l'Ordre Du Monde »
Note de Recherches : Descartes, « Changer Mes Désirs Plutôt Que l'Ordre Du Monde ». Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoirese. L’emploi de «tâcher» implique une méthode, une marche méthodique à suivre pour atteindre un objectif. Le titre de l’oeuvre dont est extrait le texte, Discours de la Méthode, n’est d’ailleurs pas anodin : c’est une véritable philosophie de la maîtrise de soi et des choses que nous propose Descartes.
La marche à suivre pour «se rendre content» se ferait en deux étapes, ou une seule si la première se révèle fructueuse : tout d’abord en essayant de combler son désir en influant sur le réel, en transformant ce dernier. En effet la doctrine ne sous-entend pas un renoncement à la tentative de changement sous prétexte qu’il serait de toute manière voué à l'échec. L’homme pourra se considérer comme étant impuissant seulement quand il aura tenté d’intervenir sur «les choses extérieures», ces choses sur lesquelles il n’a que très peu de pouvoir. Malgré les recommandations de ses parents, un jeune enfant ne se rendra compte du danger du feu que lorsqu’il aura essayé de le toucher, de voir si il a une influence ce dernier. Alors comme pour l’enfant, après l’expérience de la frustration, après avoir fait de notre mieux «touchant les choses qui nous sont extérieures» et que cela a échoué, Descartes nous invite à changer nos désirs, les transformer, plutôt que de s’obstiner à ne vouloir changer autre chose que la réalité immuable, l’ordre pré-établi et inflexible du monde.
Une autre voie du contentement est possible car je sais qu’à l'intérieur, je dispose d’un pouvoir absolu, je suis maître de mes représentations, «il n’y a rien qui ne soit en notre pouvoir que notre pensée», contrairement à la «fortune», expression de l’ordre du monde, hasard heureux ou malheureux qui ne dépend pas de moi. Or le désir est une pensée, on peut donc en conclure que le désir est modifiable, comme tout produit de notre pensée consciente : à défaut de pouvoir agir sur ce qui nous fait souffrir, nous pouvons agir sur nous-même.
Si le désir ne peut être anéanti, car il est infini, il peut néanmoins être contrôlé, transformé en «volonté». Car désirer est une chose, vouloir en est une autre. La volonté c’est le désir entendu, qui prend en compte la loi du réel. On peut désirer l’impossible, pas le vouloir. On peut désirer voler comme un oiseau, être indestructible, «aussi peu corruptible que les diamants», mais en aucun cas le vouloir. Notre volonté possède une certaine logique, «ne se portant naturellement à désirer que les choses que notre entendement lui représente comme possible», dit le texte. Par entendement, on considère un élan de lucidité; l’entendement est, avec la volonté, l’une des deux facultés essentielles de l’âme humaine. Nous ne pouvons rien connaitre, même par les sens, sans user de l’entendement. Descartes pense que lorsque et seulement lorsque nous sommes confronté à l’impossible, considérer «tous les biens qui sont hors de nous comme également éloignés de notre pouvoir» pourrait mener au contentement. Ceci nécessite néanmoins de l’entrainement.
Descartes fait partie de ce type de philosophes qui considère que l’on pourra toujours tirer parti des difficultés que nous rencontrons tout au long de notre vie. Il parlera de «faire de nécessité vertu», ou comment profiter des problèmes inévitables de la vie, ne pouvant pas ne pas être, plutôt que de les subir uniquement. Cela exige une certaine force, un exercice complexe de sa force d’âme. Avec un travail de moi sur moi-même consistant à faire l’effort de se résigner, se condamner à l'échec, se «vaincre», on se rend compte progressivement qu’il est inutile de désirer des choses sur lesquelles nous n’avons aucun pouvoir, que ce soit désirer posséder le Royaume de Chine ou du Mexique, ou désirer être sain en étant malade. Ce dernier exemple nécessite cependant un exercice plus courageux de l’entendement, étant donné qu’être malade, c’est nous priver «sans notre faute» de ce dont nous sommes dotés à la naissance, la santé. Ce type de désir, un désir de récupération de ce qui nous est du, nécessite donc une lutte intérieure plus ardue. C’est dans tous les cas parce que nous sommes des sujets désirants que nous ne sommes pas heureux et rencontrons tant de difficultés à l’être : il y a constamment chez nous une distinction entre ce qui est et ce que nous voudrions qui soit... Notre volonté se porte «naturellement à désirer», et ces sentiments que nous ressentons comme la déception, la désillusion, l’échec, illustrent ce non-accord entre le désir et le réel, les aspirations humaines et l’ordre du monde, cette réalité inchangeable.
Le contentement, puis le bonheur, dépendraient donc de nous, si l’on considère la morale provisoire de Descartes. Certes, les circonstances extérieures pèsent sur nous et nous font éprouver ponctuellement par notre nature d’être désirant, tristesse ou joie. Mais ce désir peut être contrôlé par notre capacité à accepter les événements, capacité néanmoins non-exempte de difficultés et
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