L'Affaire Calas
Compte Rendu : L'Affaire Calas. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresdu. Ils expliquent ce revirement de déclaration en disant qu’ils voulaient éviter le déshonneur de Marc-Antoine et de la famille, le cadavre d’un suicidé étant, à l’époque, traîné en public sur une claie. Ces différentes versions n’avantagent guère Jean Calas. De plus, l’opinion publique, hostile envers les protestants, prétend qu’il aurait tué son fils pour l’empêcher de se convertir au
2) L’enquête
Le 15 octobre, le professeur Lamarque donne son rapport d’autopsie. D’après l’analyse de la digestion de son dernier repas, Marc-Antoine serait mort trois ou quatre heures après le souper. Or, les Calas, la servante et Lavaïsse affirment que ce repas a commencé vers 19h30 et que Marc-Antoine serait parti vers 20h pour se rendre aux Quatre Billards. Son corps a été trouvé vers 23h. Il y a dès lors un problème dans les comptes.
Les témoins sont interrogés par un brief interdit, un questionnaire tout fait de quelques questions soumis : ont-ils entendu de quelconques menaces de mort de la part de Jean et Jean-Pierre Calas envers la victime, s’ils ne la maltraitaient pas quotidiennement, etc. Bref, ce sont des questions sous-entendant que Jean Calas a plus que probablement tué son fils et qui retracent dans l’esprit des témoins les « faits ». Les témoins ne peuvent que se sentir contraints et forcés d’aller dans le sens des autorités car un texte « avertit les fidèles de révéler ce qu’ils connaissent d’un crime sous peine d’excommunication contre ceux qui ne viendraient pas à révélation ».
Un monitoire est rédigé par le grand Vicaire, l’abbé de Cambon, et lu lors de messes. Il menace d’excommunication ceux qui ayant appris par « ouï-dire ou autrement » des éléments montrant des signes d’hostilité de Jean Calas envers Marc-Antoine qui ne rapporteraient pas leur témoignage, « ceux qui ont connaissance des faits contenus audit monitoire et ne le révéleront pas ». La population est ainsi alimentée d’informations allant à l’encontre de Jean Calas et se forge ainsi une opinion publique en sa défaveur.
Une enquête plus poussée que celle réalisée la nuit du fait est ensuite réalisée. La maison familiale est inspectée. Ensuite, les prévenus subissent un interrogatoire visant à les faire avouer qu’ils ont tué Marc-Antoine parce que ce dernier voulait effectuer sa première communion catholique et renoncer publiquement au protestantisme.
Le 27 octobre, le procureur du roi introduit une procédure « extraordinaire », amorçant une enquête en accusation « pour crimes graves pouvant mériter quelques peines afflictives ou infamantes ». Ensuite, le procureur remet ses conclusions, non motivées, au greffe, avec l’ensemble des pièces du procès. Ensuite, les juges prennent connaissance du dossier. Puis, l’accusé est interrogé, avant que les juges ne délibèrent et rendent leur verdict. Si les preuves s’avèrent trop faible (jugement interlocutoire), les juges tentent d’obtenir par des aveux de l’accusé une certitude quant à sa culpabilité. Pour cela, ils ont recours à la torture. Après quoi intervient le jugement de condamnation.
Ensuite, les accusés sont confrontés aux témoins. Mais les Calas réfutent nient avoir voulu empêcher que Marc-Antoine se convertisse, d’autant plus que celui-ci ne semblait pas user des pratiques liées aux cultes catholiques. Ils affirment également que les cris « On m’étrangle » entendus par les témoins ont été mal compris par ceux-ci.
Les accusés sont une nouvelle fois entendus, après que la thèse du suicide soit écartée pour des raisons matérielles (absence d’escabeau ou de chaise, de trace de pression sur les battants de la porte, où la corde serait passée). De plus, la victime n’a apparemment pas donné de signe de fragilité psychologique durant le repas d’après les dires des prévenus. Enfin, elle n’avait aucun ennemi et personne n’est venu de l’extérieur du bâtiment, vu que la porte était restée verrouillée. En raison de ses cris qui ont ameuté le voisinage, les assassins n’ont pas eu le temps de dissimuler le corps à la cave. Le mobile serait le désir de la victime de se convertir, ce qui déplût fortement à la famille.
Jean Calas est le suspect numéro 1. En effet, selon les autorités, il aurait étranglé son fils pour l’empêcher de se convertir au catholicisme. Le parlement de Toulouse, ainsi que l’opinion publique toulousaine tend à démontrer la culpabilité de Jean Calas. Malgré les 87 dépositions l’accusant, le curé affirme que Marc-Antoine n’avait pas manifesté de volonté de se convertir à la religion catholique.
3) Le procès
Avant la Révolution française, pour les affaires criminelles, il n’y avait pas d’audience publique au cours de laquelle l’avocat de l’accusé plaidait. Les arguments étaient mis par écrit et présentés ainsi aux magistrats ainsi qu’à tous ceux s’intéressant à l’affaire. Les lecteurs pouvaient ainsi aisément influer sur la prise de décision des magistrats.
Au cours du procès, ce sont des témoignages se basant sur des ouï-dire qui sont entendus pour déclarer que Jean Calas voulait empêcher son fils aîné de se convertir au catholicisme. Cette version est renforcée par le fait que Marc-Antoine Calas est inhumé par l’Eglise catholique.
Dans ce contexte de passion et d’intolérance religieuse, le 18 novembre 1762, les conclusions du procureur du roi sont connues : les trois Calas doivent être pendus, puis brûlés. Leurs biens seront confisqués. Lavaïsse est condamné à perpétuité aux galères. Ils interjettent appel devant le Parlement de Toulouse.
Le parlement de Toulouse condamne Jean à mort le 9 mars 1762. Dès le lendemain, après avoir eu ses membres rompus, il est roué, sur une place publique. Après deux heures, il est étranglé. Comme Jean a toujours proclamé son innocence, la veuve de Calas, la servante et Lavaïsse ne sont pas condamnés et sont libérés. Quant à Jean-Pierre, il est condamné au bannissement perpétuel pour déclarations antireligieuses.
Le procès au parlement de Toulouse consiste essentiellement à savoir si Marc-Antoine pratiquait le culte catholique traduisant une volonté proche de se convertir. Il s’agit également de savoir si son père le maltraitait pour cette raison. Bien que quelques témoignages le déclarent pacifique, d’autres prétendent avoir vu des signes de violence envers le défunt. Contrairement au procès conduit devant les capitouls, les accusés peuvent désormais être défendus par un avocat. Ainsi, les Calas se font aider par Théodore Sudre.
Au mois de décembre, les Calas sont confrontés aux témoins. Ils persistent à dire qu’ils ignoraient les désirs de conversion de Marc-Antoine. Au contraire, il pratiquait avec enthousiasme le culte protestant.
Sudre évoque tout d’abord les vices de procédure commis. Premièrement, Beaudrigue a dressé le procès-verbal de découverte du corps non pas sur les lieux-même mais à l’hôtel de ville. Deuxièmement, le rapport des deux médecins et des deux chirurgiens mandatés pour observer le décès et ses causes n’a pas non plus été rédigé immédiatement. Troisièmement, le monitoire ne peut être lancé que par des juges ecclésiastiques, et non par les vicaires généraux, comme ce fut le cas ici. De ce fait, les témoignages n’ont aucune valeur.
Ensuite, l’avocat toulousain évoque les raisons qui ont poussé les Calas à mentir sur la mort de Marc-Antoine. Jean, Jean-Pierre et Lavaïsse ont voulu cacher le suicide, même à Mme Calas et à la servante, pour éviter le sort réservé en pareil cas. De plus, autant les accusés que le défunt ne présentaient pas de signe de lutte. Il n’y donc pas eu de bagarre pour amener à la mort.
Par après, Sudre évoque des arguments plus affectifs, en se demandant comment des meurtriers seraient capables de partager un repas avec leur future victime. De surcroit, même pour des raisons religieuses, un homme de peut ôter la vie à un membre de sa famille.
Par ailleurs, tuer quelqu’un dans une rue tellement habitée, à une heure où circulent encore bon nombre de personnes serait stupide en raison des cris potentiels pouvant attirer la foule. Sudre s’emploie également à dénoncer le manque de crédit des témoignages, basés pour la plupart sur des ouï-dire.
Le père de Gaubert Lavaïsse, avocat, émet avec un autre de ses fils une thèse selon laquelle Marc-Antoine aurait pu être tué par des voleurs ou des ennemis. Mais elle n’est pas prise en compte (on remarquera que, pour reprendre les propos de Sudre pour défendre ses clients, il n’y aurait pu avoir de voleur ou d’assassins venant de l’extérieur au vu du monde dans le quartier, d’autant plus que la porte était fermée à clefs).
Le 9 mars 1762, le verdict est rendu. Face aux doutes, seul Jean Calas est pour l’homicide sur son fils. Préalablement, il sera interrogé une dernière fois pour avouer son crime. Il sera placé sur un échafaud, tourné vers le ciel, reins, bras, jambes et cuisses brisés. Ensuite, son corps sans vie sera brûlé et les cendres répandues par le vent. L’exécution a lieu dès le lendemain. Malgré les supplices dus à la torture, Jean Calas ne cesse de clamer son innocence. Les cruches d’eau que des dominicains lui font avaler de force par un entonnoir dans la bouche n’y font rien.
Le Parlement de Toulouse condamne Jean-Pierre au bannissement à perpétuité. Madame Cals, Gaubert Lavaïsse et Jeanne Viguière ne sont plus poursuivis.
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