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Peut-On Se Mentir à Soi-Même

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lui rappelle les normes juridiques auxquelles il est soumis, la volonté de l'Homme est « éclairée » par la raison. Un Homme n'ayant que sa volonté, ce serait un Homme ne voyant que son intérêt, ce serait le retour à la loi du plus fort, à la loi de la nature. Or, vivre en société, c'est avant tout penser à ceux qui nous entourent. Pour cela, l'Homme est responsable de ses actes, et par sa volonté raisonnée, il est à même de choisir en connaissance de cause. Selon Saint Thomas d'Aquin, l'Homme agit d'après un jugement libre, qui « n'est pas l'effet d'un instinct naturel s'appliquant à une action particulière, mais d'un rapprochement de données opéré par la raison. »

Alors, l'Homme disposant d'un jugement libre semble capable de se mentir à lui-même. Si la réalité à laquelle il fait face ne lui convient pas, ou le blesse, ou si elle est différente de ce qu'il espérait a priori, alors ne va-t-il pas volontairement travestir le vrai ? L'Homme, parce qu'il est libre de choisir, est capable de se bercer d'illusions et maquiller la réalité. Sa conscience, parce qu'elle est mémoire, parce qu'elle l'ouvre à la réflexion, elle lui permet de choisir. L'Homme peut donc choisir de se tromper lui-même volontairement.

Et pourtant, n'est-ce pas une chose impensable que de se tromper soi-même ? N'est-ce pas là nier l'unité de la conscience, et donc de la connaissance de soi et du monde ? En effet, la conscience permet à l'Homme de prendre connaissance de ce qui nous habite – c'est la conscience de soi -, et de ce qui fait le monde – c'est la conscience immédiate -.

II] L'Homme, un être ayant connaissance de la réalité par sa conscience

Si l'Homme par sa conscience peut se représenter aussi bien le monde que lui-même et en avoir le savoir, alors il semble qu'il lui soit impossible de pouvoir se mentir à lui-même.

En effet, comment l'Homme qui par sa conscience est à même de connaitre la réalité des choses pourrait-il nier ce savoir ? Dès lors, s'il nie ce savoir, il n'en demeure pas moins qu'il sait toujours ce qui est vrai. A défaut d'un mensonge envers soi-même, ce serait plutôt se bercer d'illusions vaines, tout en ayant connaissance de la réalité. La conscience de l'Homme est une et indivisible, elle apporte un savoir sur ce qui entoure l'Homme et sur ce qu'il y a en l'Homme.

L'Homme, par sa conscience immédiate, est en relation avec le monde, il perçoit ce qui l'entoure, il y est sensible, il y réagit. C'est la conscience qui accompagne nos perceptions. Quant à la conscience de soi, c'est celle qui permet à l'Homme de se saisir lui-même, d'avoir une identité, de savoir qui il est malgré les changements. Après tout, à trente ans, nous ne sommes plus le même qu'il y a quinze ans, mais notre conscience nous permet d'avoir la certitude de notre personne, de notre passé, de notre unité. En clair, cette conscience permet à l'être humain d'accéder à la vérité, même si les perceptions peuvent parfois le tromper. Cette vérité, qu'il l'accepte ou non, il en a conscience, il en a surtout la connaissance. Il peut la bercer d'illusions, mais cette connaissance demeure malgré tout.

De ce fait, si l'Homme s'illusionne, se trompe lui-même, ce n'est que se voiler ce dont il a le savoir. Il se ment à lui-même alors qu'il sait la réalité des choses. Ce mensonge tend donc à la mauvaise foi.

III] Mauvaise foi, orgueil, fierté : des conséquences du péché originel

Si l'Homme accède par sa conscience à la connaissance du monde et de lui-même, alors se mentir à soi-même relève d'un certain orgueil.

Comment l'Homme peut-il s'assurer du contraire de ce dont il a le savoir ? Comment peut-il travestir volontairement ce qu'il sait véritable ? Effectivement, l'Homme est confronté à une réalité qui parfois le blesse, à laquelle il ne peut croire. Sans doute qu'en s'assurant du contraire, il acceptera avec le temps cette réalité dont il a connaissance. Seulement, c'est faire preuve de mauvaise foi, soit par fierté, soit par orgueil, c'est-à-dire par une opinion très avantageuse concernant sa valeur personnelle, par laquelle on se place au-dessus des autres. Accepter la réalité, c'est agir avec humilité, que cette réalité soit en accord ou contraire à nos attentes.

L'orgueil, la fierté, se voiler la réalité, ne sont-ce pas là des conséquences intrinsèques du péché originel selon la doctrine chrétienne ? De fait, par rapport au péché originel, il y a un avant et un après. Avant le péché originel, « l'Homme [...] est élevé au-dessus de toute la nature, rendu comme semblable à dieu et participant de la divinité ». Après la Faute, et donc « en l'état de la corruption et du péché, il est déchu de cette état et rendu semblable aux bêtes. » Par ces paroles, Pascal montre les conséquences de la chute, de cette Faute, de ce péché originel. L'Homme qui recevait la Grâce, qui était protégé du péché, est depuis lors confronté au mal. La fierté, l'orgueil,

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