Pour Faire Le Portrait d Un Oiseau
Mémoire : Pour Faire Le Portrait d Un Oiseau. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresdans les souliers ? — Excepté les désobéissants et les menteurs, à ce que dit maman. Moi, j’ai toujours trouvé quelque chose. »
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De nouveau seul sur le chemin, Jean-Marie songeait. Trouver des noix, du chocolat, des dragées dans un soulier, quelle belle chose ! Des dragées, il n’en avait mangé qu’une fois dans sa vie, mais il en avait gardé le goût au bout de la langue. Et pourquoi n’essaierait-il pas, lui aussi ? Marius avait dit : excepté les désobéissants et les menteurs. Or Jean-Marie était bien sûr de n’être ni l’un ni l’autre. Le jour où il avait cassé la terrine des dindons, quand on lui avait demandé qui avait fait ce malheur, il avait répondu que c’était lui, malgré sa grande peur d’être grondé ;; et Mme Espagnac, la fermière, lui avait pardonné sa maladresse en faveur de sa franchise. Mais quoi ! Tout à coup Jean-Marie s’est arrêté. L’oeil agrandi, la bouche ouverte, il contemple avec une sorte d’effroi le bout de ses pieds nus. Comment mettra-t-il ses souliers dans la cheminée, lui qui n’a pas de souliers ? Il ne se souvient pas d’en avoir jamais eus, et jusqu’ici cela lui a été bien égal : la peau de ses pieds s’est durcie comme une semelle, il ne sent pas les cailloux de la route. Mais ne pas pouvoir mettre son soulier dans la cheminée, quel malheur ! Jamais comme en ce moment l’orphelin n’a senti sa
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Non, cependant. Jean-Marie est courageux, habitué à se tirer idée se présente à son cerveau. Des souliers, on en trouve quelquefois dans les fossés, le long des haies... Oh ! pas des souliers neufs, pour sûr ;; mais le bonhomme Noël, qui descend dans les cheminées, les mains pleines de cadeaux, ne doit pas regarder à cela. Il doit savoir que quand on est pauvre, on n’a pas toujours des souliers neufs à sa disposition... De ses yeux de sept ans, Jean-Marie inspecte les bords du chemin. Sur les berges garnies de ronces, dans les fossés boueux, sous les touffes d’églantiers, il tâte, il fouille... et voilà que tout à coup son regard brille : il a trouvé ce qu’il cherchait. Pourtant cet objet sans forme ni couleur, dont un chiffonnier ne voudrait pas, mérite-t-il encore le nom de soulier ? N’importe. Le petit garçon le serre dans ses bras avec amour. En cinq minutes il est à la ferme d’Estacobiau. souches, il a placé le vieux soulier. Et maintenant, tout en pelant les pommes de terre pour le dîner du soir, il le surveille du coin de l’œil : on ne le voit pas trop dans cet angle un peu obscur ;; Jean-Marie fait des voeux pour qu’il échappe aux regards vigilants de Mme Espagnac.
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Celle-ci justement, voulant remettre de la braise sous le pot où cuit la soupe, s’approche du feu : pour se donner du coeur, Jean-Marie jouer à la « baloche » de Montastruc. « Qu’est-ce que c’est que cette saleté-là ? s’écrie la fermière. Qui est-ce qui m’a traîné cette vieille semelle dans le coin de la cheminée ? C’est toi, Briquette ! » Un coup de pied à l’innocente petite chienne, qui le reçoit sans protester. Puis Mme Espagnac attrape le vieux soulier du bout de ses pincettes et l’envoie se promener dans la cour. Le nez sur les pommes de terre qu’il épluche, Jean-Marie se « J’irai le rechercher tout à l’heure, » se dit-il. Sa besogne terminée, il sort doucement. Retrouver le soulier, c’est bien facile : ce qui l’est moins, c’est de s’en servir. Le replacer où il était, il n’y faut pas songer à présent : Mme Espagnac est une bonne femme, mais qu’il faut se garder d’impatienter. Cependant il n’y a pas dans la ferme d’autre cheminée que celle de la cuisine. Venir ce soir à tout petits pas, quand tout le monde sera couché, remettre le soulier ? Mais Mme Espagnac se couche si tard ! La savate à la main, le pauvre petit reste là, bien perplexe...
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« Eh ! Bonsoir, Jean-Marie ! » dit une petite voix tout près de lui. Levant la tête, il a reconnu Marguerite, ordinairement appelée de six ans. Presque chaque jour, elle vient avec sa bonne à l’heure où l’on trait les vaches, chercher le lait. Elle est gentille et a toujours un mot aimable pour le petit pâtre d’Estacobiau, qu’elle plaint de tout son coeur en pensant qu’il n’a plus de maman. soucis à Margalidou : qui sait si elle n’aura pas une bonne idée ? Bien sûr, elle mettra ce soir dans la cheminée ses mignonnes petites bottines. Tandis que de nouveau la cloche argentine de Saint-Geniès annonce la fête, joyeusement, les deux enfants causent à voix basse. « Rien de plus aisé, Jean-Marie, a dit Margalidou. Donne-moi le soulier. Ce soir je le mettrai près du mien dans la cheminée de maman. Chez nous, pas de danger qu’on te
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