Commentaire Arrêt Ben Haddadi
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Le pourvoi est rejeté confirmant ainsi la décision de la cour d’appel de l’application dans cette affaire d’un concours réel d’infraction (A), solution justifiée par l’atteinte à plusieurs valeurs sociales protégées (B)
A. Le rejet de pourvoi : la confirmation d’un concours réel d’infraction
L’argument essentiel du pourvoi est que pour un même fait (avoir lancé une grenade dans un café), les 2 accusés sont condamnés à la peine de mort par le chef de deux qualifications distinctes. Ainsi, le pourvoi argumente qu’il s’agit ici d’un concours idéal de qualification et que d’après la règle de « non bis in idem » lorsqu’un même fait tombe sous le coup de plusieurs qualifications, le juge se doit d’en choisir une, et une seule.
La Cour de Cassation répond : « il ne s'agit pas, en tel cas d'un crime unique dont la poursuite sous deux qualifications différentes serait contraire au vœu de la loi, mais de deux crimes simultanés commis par le même moyen, mais caractérisé par des intentions coupables essentiellement différentes »
Par le rejet du pourvoi, la cour de Cassation remet en cause le cumul idéal de qualifications, au profit du cumul réel d’infractions au motif que l’acte est bien caractérisé par 2 intentions coupables distinctes.
La cour de cassation ajoute « Qu’il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre d’accusation a retenu la double qualification critiquée, laquelle pourra donner éventuellement lieu à une double déclaration de culpabilité sous cette réserve qu’une seule peine soit effectivement prononcée » Elle confirme ici la légalité de du choix du concours réel d’infraction et de sa non atteinte au principe du non cumul des peines de même nature posé à l’alinéa 2 de l’article 132-3 (non atteinte à la règle « non bis in idem »).
B. Une solution justifiée par l’atteinte à plusieurs valeurs sociales protégées
Le cumul réel d’infractions est normalement prévu par l’article 132-2 du code pénal, et consiste dans la possibilité, si une personne a commis plusieurs faits distincts les uns les autres dont aucun n’a fait l’objet d’une condamnation définitive, de donner une qualification, donc une peine distincte pour chacun d’eux, selon les principes du cumul des peines de nature différente.
La solution de cet arrêt permet de retenir le cumul réel d’infractions alors même que l’action délictueuse est composée d’un fait unique.
La Cour de cassation justifie cette décision aux motifs qu’ici l’acte consistant à lancer une grenade dans un café même si il constitue un fait unique est bien rattaché à 2 crimes distincts. Ces 2 crimes sont distincts par leur nature et leurs éléments constitutifs comme le met en avant la Cour de cassation. Il s’agit d’une part d’une atteinte portée aux biens (destruction d’immeuble) et d’autre part d’une atteinte portée aux personnes (tentative d’homicide volontaire avec préméditation).
Par son acte Ben Haddadi a par conséquent porté atteinte à deux valeurs sociales protégées : le droit à la vie et le droit à la sécurité et à la protection de sa propriété. La décision se justifie donc par la défense de l’ordre social : des valeurs sociales d’une telle importance ne peuvent rester sans protection.
II. UNE REGLE SUSCITANT DES DIFFICULTES DE MISE EN OEUVRE
A. Une solution de principe opportune en théorie
La Cour de cassation indique, pour justifier la solution adoptée, que les deux crimes relevés dans le fait unique se caractérisent par « des intentions coupables essentiellement différentes ». Elle met ici en avant que les intentions criminelles pouvant être divisées au sein d’un même fait, et donc justifier deux condamnations : il y aurait, en l’espèce, par le lancer de cette grenade, un double dessein criminel, justifiant donc une double culpabilité.
Cependant, ce critère de distinction semble insuffisant, à lui seul, pour justifier un cumul réel d’infractions : en effet, il est possible de trouver des conflits de qualification dans le domaine des infractions non intentionnelles. Le critère de la double intention criminelle est donc insuffisant à lui seul pour justifier une telle solution.
lLa Cour de cassation justifie l’application d’un cumul réel d’infractions au nom des différentes valeur sociales atteintes par les agissements des accusés. En effet, le cumul réel d’infractions se justifie ici, surtout pour la défense de l’ordre social : des valeurs sociales d’une telle importance ne peuvent rester sans protection.
L’arrêt Ben Haddadi va faire office d’arrêt de principe, cette solution sera par la suite suivie comme par exemple dans la décision du 22 novembre 1983.
Serge Coutel et André Prébet avaient contrôlé un aéronef en vol en menaçant le pilote et en l’arrêtant comme otage, ils avaient favorisé l’évasion avec violence d’individus détenus, et avaient fait du recel de vols. De plus, Mr Coutel avait transporté des armes hors de son domicile, et Mr Prébet avait obtenu une carte d’identité sous une fausse identité via la falsification de documents administratifs. La cour de cassation avait retenu 2 qualifications distinctes au motif que les deux crimes dont les individus étaient accusés étaient très différents là aussi dans leur nature et dans leurs éléments constitutifs. En effet, la prise d’otage n’était pas nécessairement un crime associé au détournement d’aéronef. Le deuxième crime présentait un caractère matériel très marqué, qui n’etait pas présent dans le crime de prise d’otage, nécessairement humain.
Par leurs actes Les 2 condamnés avaient porté atteinte à 2 valeurs sociales distinctes. De même les 2 crimes étaient bien distincts par les éléments moraux mis en cause.
B. Une solution qui pose des difficultés pratiques
Tout d’abord, même si cette décision est justifiée elle porte tout de même atteinte au principe de « non bis in idem », cependant l’application de cette décision
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