La grève dans les services publics
Dissertation : La grève dans les services publics. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Ahabaki • 8 Avril 2016 • Dissertation • 6 333 Mots (26 Pages) • 1 149 Vues
Ana Paula SCHUSTER
Diego SANCHEZ
Le 18 mars 2016
LA GRÈVE DANS LES SERVICES PUBLICS
A partir de la reconnaissance constitutionnelle du droit de grève en France dans le préambule de la Constitution de 1946, la grève a été objet d´une importante régularisation et institutionnalisation par le législateur et la jurisprudence, en raison à son importance sociale et à l´influence du Droit international et européen, spécialement par les articles 8 du Pacte des Nations unies relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, 28 de la Charte des droits fondamentaux de l´Union européenne de 2000 et 11 de la Convention européenne de sauvegarde de droits de l´homme de 1950[1].
La Constitution de 1958, par renvoi normatif au préambule de la Constitution de 1946, affirme que : « le droit de grève s´exerce dans les cadres des lois qui la réglementent ». D’abord, la loi 11 février 1950 a interdit le licenciement des salariés grévistes en raison de l´exercice du droit de grève. Puis, la loi 17 juillet 1978 a interdit toute discrimination salariale ou relative aux avantages sociaux contre le salarié gréviste. Après, les lois des 3 janvier et 25 juillet 1985 ont déclaré nul de plein droit le licenciement en raison de la grève. Actuellement, le Code du travail –CT- a prévu des dispositions très protectrices à son exercice en prohibant toute mesure discriminatoire contre le salarié gréviste et la rupture de son contrat de travail. Ainsi, l´article L. 1132-2 du CT interdit toute sanction ou mesure discriminatoire. Bien plus, l´article L. 2511-1 du CT prohibe toute discrimination et expressément prévoit la nullité de plein droit du licenciement du salarié sans faute lourde[2].
Au Brésil jusqu’en 1946 la grève était considérée comme illégale, antisociale et préjudicielle à l’économie. En effet, en 1938 la grève a été considérée comme un crime par le Code pénal[3]. Mais en 1946, sous la pression de la communauté internationale, une nouvelle loi[4] a été promulguée et la grève n’a plus été considérée comme un crime et est devenue un droit protégé par l’ordre juridique.
Cependant le droit de grève a été constitutionnalisé seulement en 1967, mais cette Constitution avait assuré le droit de grève seulement aux travailleurs du secteur privé, interdisant le droit de grève aux travailleurs du secteur public et dans les activités considérées essentielles. L’actuelle Constitution brésilienne de 1988 prévoit dans l’article 9[5] le droit de grève a tous les travailleurs, dans les secteurs public et privé, mais sous la condition d’une réglementation spécifique. Dans ce sens la loi n° 7783 du 28 juin 1989 a été promulguée et définit quelles sont les exigences légales d’une grève licite[6].
En Colombie, le droit de grève a été constitutionnalisé en 1991. L´article 56 de la Constitution précise que le droit de grève est un droit fondamental et doit être garanti sauf dans les services publics essentiels définis par le législateur. La loi a défini en tant qu´essentiels les services publics suivants : la banque centrale, les services publics domiciliaires, la sécurité sociale de la santé et de paiement des retraites, le transport terrestre, maritime et aérien, les services judiciaires et l´exploitation du pétrole[7]. Aussi, la Cour constitutionnelle peut en déterminer d´autres[8]. Aussi comme en France, il n´est pas possible de licencier ou de discriminer un salarié en raison de la grève.
Également, en l´absence d´une définition légale de la grève, la Cour de cassation l´a définie comme une cessation collective et concertée du travail qui a pour objet l´obtention de revendications professionnelles[9]. Il s´agit d´un « … droit individuel, exercé collectivement, qui consiste en une cessation volontaire du travail en vue de satisfaire des revendications d´ordre professionnel[10] ». La grève doit réunir trois conditions pour qu´elle soit licite : une interruption de travail ; cette interruption doit être collective et concertée ; et sa finalité doit avoir des revendications à caractère professionnel[11]. Quant aux effets de la grève, la jurisprudence a précisé que la grève ne cause pas la rupture du contrat de travail sinon qu’elle le suspend, et l´employeur peut seulement licencier un salarié après la constatation d´une faute lourde[12]. Aussi, la chambre sociale a sanctionné des mesures discriminatoires salariales et des avantages sociaux imposés par l´employeur, par exemple dans le cas de primes d´assiduité[13].
En Colombie, l´article 429 du Code substantif du travail -CST- définit la grève comme « … la suspension collective, temporelle et pacifique du travail, par les salariés d´un établissement ou entreprise afin de solliciter des revendications économiques et professionnelles à ses employeurs… ». Quant à ses effets, aussi comme en France la grève suspend le contrat de travail. Toutefois, pour licencier un salarié gréviste, il doit exister une autorisation du juge du travail[14].
Au Brésil, la définition de grève est dans l’article 2 de la Loi n° 7.783/89. Selon cet article la grève est « la suspension collective, temporaire et pacifique, totale ou partielle, de la prestation personnelle de services à l’employeur ». En relation aux effets, la participation à la grève suspend le contrat de travail, et les relations pendant la période gréviste sont régies par accord, convention, sentence arbitrale ou décision de la justice du travail[15].
En France, le 25 juillet 1979 le Conseil constitutionnel a affirmé la valeur constitutionnelle du droit de grève et en même temps le principe de la continuité nécessaire du service public[16]. En raison de cette constitutionnalisation, le droit de grève doit être concilié avec ce principe. C´est la raison pour laquelle il existe un régime spécial de la grève dans les services publics. En règle générale, les salariés ne doivent mettre en œuvre aucune procédure préalable afin de déclencher une cessation licite de travail. Simplement, « l'employeur doit avoir connaissance [des revendications professionnelles] au moment de l'arrêt de travail, peu importe les modalités de cette information »[17]. En revanche, dans les services publics, la loi a prévu une procédure préalable pour l´exercice du droit de grève qui sera objet du présent exposé[18].
Au Brésil, la Constitution promulguée en 1988 a reconnu expressément la grève comme un droit fondamental pour tous les travailleurs. Néanmoins, le droit de grève n’est pas absolu, parce que les intérêts sociaux doivent être superposés aux droits collectifs d’une catégorie de travailleurs. En relation à la procédure, il est obligatoire une négociation préalable. En cas de frustration de la négociation ou impossibilité de recours par voie arbitrale, sera possible la cessation collective de travail[19]. Toutefois, pour les grèves dans les services publics essentiels, après la frustration de la négociation, la grève est autorisée mais il est obligatoire le respect à la continuité de prestation des services indispensables aux nécessités basiques de la population[20].
En Colombie, avant d´exercer le droit de grève, les articles 432 et suivants du CST exigent aux parties la mise en œuvre d´une négociation pendant vingt jours à la suite d´une demande des revendications professionnelles[21]. Cette négociation préalable est obligatoire pour toutes les entreprises même en s´agissant des services publics qui ne sont pas essentiels. Dans le cas contraire, si le service est essentiel, il est interdit d´exercer le droit de grève.
En résumé, le respect du droit de grève doit garantir l´intérêt général des citoyens destinataires des services publics. Ainsi, il apparaît légitime de s’interroger sur la manière dont a été concilié ce droit avec le principe de la continuité du service public et les limites légales de son exercice ? Aussi, sur quels mécanismes administratifs et judiciaires peut compter le responsable de la prestation du service pour garantir sa continuité ?
En effet, il convient d’analyser tout d´abord la conciliation du droit de grève avec le principe de la continuité nécessaire du service public (I) et ensuite les mécanismes administratifs et judiciaires qui garantissent le principe de la continuité du service (II).
- L´exercice du droit de grève, un droit concilié et limité dans les services publics.
L´intérêt général prévaut sur l´intérêt particulier. Dans cette direction, un service minimum public doit être garanti (A), donc la loi doit limiter l´exercice du droit de grève (B).
- La conciliation de la grève et la continuité du service public.
Afin de construire la notion du service public, le Droit administratif a utilisé deux critères. D´abord, le critère organique par rapport à l´organisme public chargé de la prestation du service mais les entreprises privées aussi peuvent le faire. Puis, le critère matériel ou fonctionnel, relatif à toute activité qui à pour objectif la satisfaction des besoins d´intérêt général, a été imposé sur le critère organique. « Le service public répond, par définition, à un besoin d´intérêt général ; or, la satisfaction de l’intérêt général ne saurait être discontinue ; toute interruption risque d´entraîner, dans la vie de la collectivité, les troubles les plus graves. La jurisprudence a donc posé le principe de la continuité du service public, en vertu duquel le fonctionnement du service ne peut tolérer d´interruptions[22] ».
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