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Eugène Delacroix

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’Orient, celle d’une Antiquité actualisée. Rome n’est plus dans Rome, et l’Orient lui offre la vision « des personnages consulaires, des Caton, des Brutus, auxquels il ne manque même pas l’air dédaigneux que devaient avoir les maîtres du monde ». Le débat dans lequel on l’avait enfermé et qui opposait classicisme et romantisme se réconcilie par Orient interposé. Delacroix aborde le mythe de Médée très tôt, dès 1818-1823, en même temps qu’il travaille à deux autres compositions qui sont La Grèce sur les ruines de Missolonghi et Saint Sébastien soigné par les Saintes Femmes. En 1824, dans son Journal, il évoque sa future composition mais ce n’est qu’en 1836 qu’il commence véritablement sa toile, peut être l’un des plus beaux exemples de l’exaltation romantique de Delacroix mêlé à sa dévotion pour l’intensité de l’instant. De nombreuses esquisses montrent les différentes étapes de la recherche de Delacroix qui construit véritablement sa toile autour de son vécu, de ses influences et d’une tradition dans l’utilisation de la composition pyramidale des traditionnelles Madone de Raphaël ou de Léonard de Vinci. L’œuvre Médée furieuse est la traduction picturale des textes d’Euripide, Sénèque et Corneille : Médée, furieuse de la trahison de Jason, le père de ses enfants, emporte ceux-ci pour les tuer et ainsi venger son amour perdu. Les différentes parties du corps de Médée, la tête, les bras, les jambes, dans une torsion qui est renforcée par le choix du moment représenté, montrent la connaissance de Michel Ange et de ses corps exaltées. Entre épisode dramatique et dimension mythique, Delacroix, livre avec cette œuvre, l’exemple de son anti conformisme et de son attachement à la véracité des formes et des couleurs. Médée furieuse, fruit d’un long travail de maturation, est simplement présentée en 1838, dans le livret du Salon, par cette notice succincte : « Elle est poursuivie et sur le point de tuer ses deux enfants. » L’histoire de Médée est avant tout celle d’une femme trahie par son époux, infidèle et qui, par la vengeance tuera ses propres enfants. Selon les textes qui entourent le mythe, Médée est soit décrite comme une princesse orientale, soit l’abominable monstre qui commet l’infanticide, soit, dans la pièce de Sénèque, une facette de Médée qui fait ressortir son caractère irascible. Il semble que Delacroix, admirateur de Sénèque, se soit appuyé sur la pièce pour faire ressortir dans son tableau une Médée à la fois déterminé, mais confuse. Le peintre resserre sa composition autour des trois protagonistes : Médée regarde dans le sens opposé au tableau et tient ses deux enfants différemment, l’un sur ses genoux, tenu par le creux du coude du bras droit de Médée, l’autre qu’elle empoigne par la main droite a la tête collé contre le ventre de sa mère. Vue de trois quart face, Médée semble fuir le danger qui la poursuit et s’engouffre dans la grotte afin d’y commettre l’impensable. La pyramide formée par le groupe est atténuée par un rythme sinueux, crée par les corps des enfants qui semblent vouloir s’échapper de l’emprise de leur mère. Tous les deux sont dans une posture qui suggère à la fois la précipitation de Médée et la violence avec laquelle elle tient ses deux enfants. La composition pyramidale qui régit les personnages montre l’influence des Madones italiennes et l’attitude de Médée est digne des figures féminines de Raimondi. Delacroix accentue également l’attention du spectateur sur le geste sanguinaire que s’apprête à commettre Médée qui, en même temps qu’elle étreint sa progéniture, serre sa dague de l’autre main. Le décor dans lequel se déroule la scène est une grotte, décor naturel et réaliste, cette grotte est sombre, peu de végétaux l’ornent et renforce l’unité du tableau : unité de temps, de lieu et d’action, sorte de « microcosme complet ». On ne voit qu’un losange de ciel bleu dans le coin gauche de la toile comme si Médée, se retrouvait prisonnière de cette grotte, prisonnière de son geste. De grandes roches s’élèvent perpendiculairement et de longues plantes aux feuilles aiguisées et aux épines menaçantes rappellent le féroce combat de cette princesse déchue. La lumière, violente, rentre par cette brèche et illumine le corps de Médée et de ses enfants. Lumière naturelle mais puissante, elle illumine le buste de la mère comme pour signifier une dernière fois le rôle maternel de Médée, mais plonge la moitié de son visage dans l’ombre, le regard déjà perdu dans sa folie meurtrière.

L’expressivité du visage de Médée rend compte de toute l’intensité émotionnelle qui s’empare de la magicienne. Elle exprime par son seul regard toute « la blessure narcissique d’un animal traqué ».

Les couleurs jouent un rôle évidemment essentiel dans la toile de Delacroix. Loin d’être les couleurs pures et exaltantes des toiles inspirées de son voyage au Maroc, elles prouvent que Delacroix revisite inlassablement sa technique. Avec Médée, il livre une vision intimiste liée à la réduction de la palette chromatique et au fort clair obscur qui divise la toile, installant Médée au centre d’une composition atemporelle. L’orientalisme passe par le parti prix de Delacroix de représenter Médée comme une femme simple, dont le naturel instinctif, impulsif et sauvage est retranscrit avec une chevelure désordonnée, un corps massif et puissant. Les seuls attributs qui permettent de relier la figure féminine à Médée sont le poignard et son diadème. Le rouge, couleur dominante dans le drapé de Médée, renvoie à l’acte sanguinaire qu’elle

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